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Le relativisme
Définition
Le relativisme est une théorie selon laquelle tout se vaut ; il n’y a pas de théorie « objective » car c’est le « sujet » qui crée sa propre « vérité ». Pascal disait : « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà » ; en cela nous comprenons que chacun établit son propre système et alors, ce qui est vrai pour l’un peut être faux pour l’autre. Il n’y a là aucun ordre moral mais seulement des opinions et la notion même de « vérité objective » devient inconcevable. Tout est relatif au sujet qui pense : « c’est MOI qui détermine MA vérité ». Dans le Relativisme, on est confronté au primat du « multiple » et du « pluriel » et même dans la question religieuse on trouve cette attitude de bricoleur sans souci d’objectivité ; un « credo » est alors inaudible ; chacun crée sa propre foi en faisant son « marché spirituel ». Ce phénomène existe dans le New Age où il n’y a pas de doctrine et où chacun essaie de capter les énergies positives. C’est l’individualisme de la foi ! Or l’homme, qui a besoin de sens, se met alors à la source d’un projet au lieu de le recevoir.
Comme le disait le Cardinal Ratzinger
Une foi que j’ai construite, au moment où je vacille, sur quoi vais-je m’appuyer ? En revanche, une foi que je reçois, je m’appuie sur elle dans les difficultés !"
La notion de credo semble enlever une part de liberté ; elle est vue comme une menace pour une certaine autonomie. Pourtant le dogme protège la Foi : on ne peut pas croire en n’importe quoi ! Dans le New Age la manière de vivre est centrée sur soi ; on y parle bien d’un Jésus mais je me le fabrique. Nous vivons bien dans une société plurielle mais l’unité se construit dans la Foi ! Lorsque l’homme se met à la source des choses, le dialogue n’est plus possible car un corps implique une obéissance à une finalité commune : on entre dans une Eglise et donc dans une obéissance féconde qui offre une possibilité immense de travail… mais il y a des limites !
Relativisme et Constructivisme
Chacun répond à une quête de bonheur sans souci d’objectivité et sans limites en assemblant les éléments qu’il considère importants pour être heureux, l’essentiel étant d’être cohérent avec soi-même ! Et si un jour je ne suis plus heureux ? Et si c’est moi qui ai construit mon bonheur… Tout s’écroule alors ! Et de là découle une culpabilité, une anxiété parce que cela dépend de moi : je veux construire les choses au lieu de les accueillir. Dans le relativisme on trouve la quête de la cohérence et non de la vérité. La seule vérité est celle que j’ai construite et l’idée même d’un critère extérieur est inadmissible. (Cf. le mariage homosexuel) Comme on ne reconnaît plus l’être des choses, c’est le sujet qui se met au centre. Au nom des droits de l’homme on n’accepte plus les limites et on en arrive à ce que Benoît XVI qualifie de « dictature de la tolérance ». L’homme se met à la mesure de l’homme et le totalitarisme, c’est justement l’homme qui n’accepte pas d’autre mesure que lui-même. Il n’admet pas la nature humaine et la vérité dépend simplement de la majorité, sans référence à quelque chose de réel. Dans le relativisme le tout, tout de suite, est primordial. Le relativisme est une forme déviante du christianisme.
Dans le christianisme, avec l’accueil de la grâce de Jésus, la dignité humaine a été élevée à un niveau inégalé. La liberté humaine a pris d’un seul coup une amplitude : avec la liberté humaine, l’homme peut accueillir ou non la grâce, mais il en dépendra toujours ; ce n’est pas l’homme qui est à la source !
Le relativisme, lui, garde du christianisme ce qui l’intéresse en rejetant Dieu : « Liberté, égalité, fraternité » sont des valeurs chrétiennes mais l’homme veut en devenir la source. Pour la pensée relativiste, le christianisme n’est pas allé assez loin mais le relativisme n’est possible que dans une ambiance chrétienne. N’oublions pas que toute notre culture est façonnée par l’Evangile.
Le relativisme n’est également possible qu’avec le développement des sciences ; l’homme est alors libéré de la nature qui lui rappelle sa condition : tout étant fabriqué par l’homme, nous sommes de moins en moins en contact avec la nature qui nous fait réaliser notre dépendance vis à vis de Dieu. On atteint un degré tel au niveau des sciences (« messianisme scientifique ») et l’homme, avec la science, a acquis une telle puissance qu’elle lui donne les moyens de ses projets. Avec la science, l’homme n’est pas tenu à une obéissance à la nature ; l’homme devient son propre chef : il doit toujours se créer, s’inventer et la nature humaine est un matériau disponible au profit de la science.
Relativisme et éthique de la discussion
On peut mettre le relativisme en parallèle avec l’éthique de la discussion, du dialogue. La vérité n’est pas ce qui est, mais ce que la majorité pense être vrai ! C’est une vérité consensuelle. Jean-Paul II disait : « On n’est pas sorti des idéologies totalitaires ». L’idée même d’une autorité extérieure est vue comme un obstacle au dialogue et cette mentalité entraîne une certaine neutralisation des discours qui n’acceptent pas l’autorité du réel. Derrière le Relativisme apparaît toute la crise de l’autorité.
Et si le consensus déraille ? Pour éviter cela il faut à tout prix créer un consensus le plus englobant possible dans lequel la recherche du vrai n’a pas de sens : on discute de tout ; on met le doute sur tout… l’intelligence n’accepte pas d’être fécondée par le réel ! Et selon Jean-Paul II une intelligence qui ne part pas de quelque chose de réel finit par piétiner.
Relativisme et mentalité sécuritaire
Avec le relativisme on trouve encore une mentalité sécuritaire (normes d’hygiène…excessives). Ce principe de précaution impose de tout prévoir. Je ne fais plus confiance car sinon je devrais accepter quelque chose qui ne dépend pas de moi !
Or il faut maîtriser les choses et donc ne rien laisser au hasard
L’homme étant la mesure de lui-même, il ne peut être mesuré par rien ; il faut donc qu’il se protège. Il n’y a pas de place pour la vulnérabilité, encore moins pour la souffrance. Là se trouve finalement la question de l’accueil de la souffrance ! Il s’agit de tout faire pour ne pas souffrir, ce qui paralyse l’existence. Plus personne ne veut rien faire car on n’accepte pas les failles. Relisons le passage de la Genèse dans lequel Dieu interdit à l’Homme de manger du fruit de la connaissance du Bien et du Mal alors que Satan lui souffle en Genèse III, 5 « Vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal ». C’est-à-dire que l’Homme lui-même décidera du bien et du mal… Or, il nous faut accueillir ce Bien et ce Mal …
L’interdit est ce qui rend possible la communion.
Ce qui est dit entre nous est ce qui va permettre la communion ! L’interdit est structurant. De nos jours, on développe une certaine paranoïa, la sensation d’une menace permanente. Le relativiste aura de la difficulté à s’engager, surtout pour la vie, car il y voit la perte de sa liberté : à un moment donné de l’engagement pris, il faudra accueillir quelque chose de non choisi et qui entravera inévitablement cette liberté. Dans le relativisme ambiant il y a une non-acceptation de la frustration, de l’interdit, de la limite. Et cela crée des sociétés puériles basées sur la satisfaction immédiate, le plaisir instantané, où la notion même d’effort est vue comme une menace ; c’est la culture de la facilité ainsi que de la permissivité qui ne rend pas l’homme heureux. Et ce qui s’applique aux choses, s’applique également aux relations : Quand l’autre s’oppose à moi en étant différent de moi, il devient une menace !
Les manifestations du relativisme dans la société
Questions relatives à la vie
La science permet beaucoup de choses concernant la vie humaine. Seul est pris en compte le projet parental : l’enfant n’existe que s’il y a ce projet sur lui !
- L’IVG a été consensuellement décidée ; auparavant l’embryon était reconnu comme personne humaine et bénéficiait du droit des personnes. Depuis cette loi il est passé dans la catégorie bénéficiant du droit des choses. De là découle une multiplicité de lois car on n’est plus dans l’acceptation du réel.
- La contraception est une mentalité : le couple n’accueille pas la loi qui est inscrite dans le corps de la femme ; la contraception supprime toute règle et c’est MOI qui suis à la source ; je veux maîtriser les choses, je ne pense plus en fonction de la vie qui est extérieure à moi-même : il y a là aussi non-acceptation des règles.
- La FIV est un acharnement créatif : l’enfant est dû ; c’est un droit et je ferais tout pour y arriver… L’enfant devient MA fabrication.
La position de l’Eglise est très souvent incomprise parce que le fait d’être conçu dans une relation amoureuse fait partie des droits de l’enfant. Dans le relativisme il n’y a pas de notion de Dieu, ni de vie éternelle ; l’homme est un amas de cellules et l’intelligence est le sommet de la progression de la matière. Et cet enfant qui a été voulu, s’il s’avère qu’il est anormal ? Ce n’est pas compliqué : c’est un produit, une personne qui passe dans le domaine des choses. Ma volonté prime !!!
- Acharnement thérapeutique et euthanasie : on n’accepte pas la mort qui est une lutte : j’ai droit de vie ou de mort sur moi-même du moment que je l’ai décidé (cf. en Belgique) Dans le relativisme moral tout est permis si je suis consentant et que je n’impose rien aux autres. Je détermine le Bien et le Mal et cela aboutit à l’anesthésie des consciences. L’idée même d’une hiérarchie des valeurs morales n’est pas acceptable car ce serait l’acceptation de quelque chose auquel j’aurais à adhérer. A chacun sa vérité, du moment que je n’impose rien. Cf. le Pape :
Le relativisme sous son aspect très libérant cache une nature totalitaire"
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Dans tous les cas, le sentiment est la norme alors que l’amour humain engage intelligence et volonté et non pas seulement le ressenti.
En matière politique
Il y a comme un égalitarisme ambiant. Tout est politique et engendre une profonde discrimination. On veut faire une humanité à notre image et à notre ressemblance : ce qui provoque émiettement et parcellisation ; la notion même de corps est difficile à accepter. L’individualisme est la norme et sacrifier un plaisir immédiat pour le bien de tous ne résiste pas ! Cet individualisme se retourne obligatoirement contre l’individu. Et qu’est-ce qui demeure fixe si tout peut être mis en cause ?
En matière d’éducation
Elle est, elle-même, devenue difficile car l’autorité des parents est mise en cause. L’autorité d’un groupe est toujours plus forte que celle d’un individu : c’est la tyrannie de la majorité. Dans ce sens, le relativisme infantilise, rend puéril. Au nom de la tolérance on ne doit rien imposer à l’enfant et cela le fragilise alors que l’éducation permet à l’enfant de poser des actes libres ; l’enfant doit entrer dans ce que ses parents possèdent de meilleur pour se construire. Dans ce contexte, la notion même de famille est toute relative.
En matière économique
Là, le relativisme pourrait être le libéralisme sans frein : simple rencontre de l’offre et de la demande sans autre régulation.
Pourtant, l’économie de marché se doit d’être au service de la personne humaine et non l’inverse. Si je n’ai rien à offrir en échange ? Je ne suis rien. Et les droits et les devoirs de la personne humaine ? (cf. la pyramide de Maslow et les besoins qui sont dans l’homme). Un libéralisme sans frein ne tient pas compte des particularités de chacun. Et l’économie doit être régulée entre autre par l’Etat, par quelque chose d’extérieur qui lui donne une limite.
Le relativisme culturel
Toutes les cultures se valent et en prétendant le contraire on est accusé de discrimination.
Le relativisme esthétique
On n’y trouve aucun critère de Beau alors qu’il est le resplendissement de l’ordre et de l’harmonie. Dans cette vision relativiste, le Beau dépend de mon émotion et cela peut créer une vraie pauvreté artistique, philosophique… parce qu’elle n’est pas fécondée par la contemplation. Or le Beau est l’expression d’une contemplation ; l’artiste se laisse féconder par quelque chose qui n’est pas de lui. Dire que c’est beau ou laid est encore, dans cette pensée, discrimination.
Le relativisme religieux
Il existe dans toutes les couches de la société. Benoît XVI disait aux jeunes à la veillée du samedi soir aux JMJ 2005 :
« Au cours du siècle qui vient de s’écouler, nous avons vécu les révolutions dont le programme commun était de ne plus rien attendre de Dieu, mais de prendre totalement dans ses mains le destin du monde. Et nous avons vu que, ce faisant, un point de vue humain et partial était toujours pris comme la mesure absolue des orientations. L’absolutisation de ce qui n’est pas absolu mais relatif s’appelle totalitarisme. Cela ne libère pas l’homme, mais lui ôte sa dignité et le rend esclave. Ce ne sont pas les idéologies qui sauvent le monde, mais seulement le fait de se tourner vers le Dieu vivant, qui est notre créateur, le garant de notre liberté, le garant de ce qui est véritablement bon et vrai. La révolution véritable consiste uniquement dans le fait de se tourner sans réserve vers Dieu, qui est la mesure de ce qui est juste et qui est, en même temps, l’amour éternel. Qu’est-ce qui pourrait bien nous sauver sinon l’amour ? »
Dans son homélie du dimanche aux mêmes JMJ : « Mais dans ce contexte, la religion devient presque un produit de consommation. On choisit ce qui plaît, et certains savent aussi en tirer un profit. Mais la religion recherchée comme une sorte de »bricolage« , en fin de compte ne nous aide pas. Elle est commode, mais dans les moments de crise, elle nous abandonne à nous-mêmes. Aidez les hommes à découvrir la véritable étoile qui nous indique la route : Jésus Christ ! »
Dans l’Eglise elle-même on constate une certaine non-obéissance notamment en matière de liturgie ; alors qu’on doit y entrer, beaucoup la bricolent ! Il est indispensable de se laisser porter par elle. De même en exégèse, certains refusent le magistère de l’Eglise dans l’interprétation des Ecritures… Entrer dans l’obéissance fait grandir !
Cette question du relativisme prend beaucoup d’espace et atteint beaucoup de couches de la société et des manières de penser, or tout est relatif à Dieu.
Si l’homme se met comme mesure de l’homme on en arrive à une négation de l’homme. Et derrière la revendication à la différence, il y a la négation de la différence.
Dictature du relativisme
Là où le relativisme apparaît comme libérateur, on constate qu’il part d’un certain égalitarisme et refuse même l’altérité. Si je pars de moi il me sera difficile d’aller à la rencontre de l’autre ; cela provoque inévitablement une grande solitude et un enfermement : « j’ai peur de l’autre qui est différent et qui bouscule ma manière de faire. » En cela, la shoah est un bon exemple du refus de l’autre ! Celui qui aura le pouvoir, l’avoir et le savoir sera dominateur ! Le totalitarisme est l’idée d’une totalité : ce que je pense doit être totalisant et engendre une pensée unique, une humanité à réformer et la création d’un homme nouveau, d’une humanité nouvelle. Tout ceux qui sont en situation de fragilité sont comme des ratés par rapport à ce critère.
Le relativisme est donc une culture de mort : en voulant tout contrôler, on finit par tuer la vie ; on n’accepte pas, dans la vie, le plus fragile et le plus vulnérable. Dans un système relativiste, les plus faibles sont en danger car sans moyen de se défendre. Le droit des personnes quelque soit leur état n’existe pas !
Il y a pourtant des choses qui ne sont pas dépendantes de notre volonté. L’objectivité fondée sur l’être des choses évite l’arbitraire de la volonté humaine.
Jean Paul II écrit dans « Mémoire et Identité » :
Pourquoi tout cela arrive-t-il ? Quelle est la racine de ces idéologies de l’après-lumières ? En définitive, la réponse est simple : cela arrive parce que Dieu en tant que Créateur a été rejeté, et du même coup la source de détermination de ce qui est bien et de ce qui est mal. On a aussi rejeté la notion de ce qui, de manière plus profonde, nous constitue comme êtres humains, à savoir la notion de « nature humaine » comme « donnée réelle », et à sa place, on a mis un « produit de la pensée » librement formée et librement modifiable en fonction des circonstances."
Le réalisme
A quoi s’oppose le relativisme ?
Il s’oppose à une philosophie réaliste dont Aristote est le porteur : elle part de l’être des choses.
La Vérité, c’est quand mon intelligence est en adéquation avec l’être des choses ; c’est l’être des choses qui me féconde. Et l’être est forcément bon, beau et vrai à l’origine.
L’intelligence est fécondée par le réel et l’objet est premier dans la connaissance. Dans ce réel il y a un ordre et donc une finalité aux choses et à la nature humaine.
La Beauté est le resplendissement de l’ordre et le Bonheur est d’agir conformément à ma nature humaine et de la perfectionner. « L’agir suit donc l’être » selon Aristote
L’Etre humain implique un agir humain. Je dois accueillir l’être selon la loi de l’incarnation.
Chez Platon la philosophie était beaucoup plus tentante pour un chrétien car l’être des choses n’était pas dans la chose ; c’est le monde des idées qui est le réel.
L’Eglise est partie de la philosophie réaliste qui est le fait d’accueillir le réel et de le laisser féconder.
Le grand défi actuel est philosophique car il est dans la manière de penser de nos contemporains or je perçois les choses par mes cinq sens.
Attention donc aux expériences spirituelles suprasensibles qui veulent dépasser les mots et qui se passeraient des sens comme le bouddhisme et autres…Pensons plutôt aux sacrements dont les signes sont simples et qui font tout à fait appel aux sens. (cf. Le Père Joseph-Marie Verlinde)
Accepter les chemins humbles des sens c’est aboutir à une connaissance sensible qui permet de rejoindre l’incarnation
Pour Aristote, la partie spirituelle (qui transcende la matière) de l’homme est l’intelligence et la volonté (facultés spirituelles et non matérielles). Notre religion est particulièrement incarnée et passe nécessairement par les relations humaines : c’est, en effet, par la médiation humaine de Marie que Jésus est venu sur terre. L’homme devient un chemin vers Dieu. L’homme est finalisé, se bonifie en posant des actes bons dans le sens de sa finalité.
En politique, il y a des finalités communes (un bien commun) qui sont plus grandes que la somme des biens particuliers : c’est l’amour qui va me faire agir. Accepter une donnée réelle c’est d’abord s’accueillir soi-même ainsi que les circonstances de sa vie. C’est tout l’enjeu de l’éducation ; l’homme est plus qu’un amas de cellules ; il a aussi à éduquer l’intelligence. On reçoit un enfant avec sa capacité à être en lien avec le réel. Il est impératif que l’enfant retourne au réel et ne reste pas dans l’imaginaire ; alors seulement son intelligence pourra se développer. Pensons aux handicapés : ils ne sont pas blessés dans leur intelligence qui une partie spirituelle et ne peut donc être touchée ; c’est la matière qui est blessée et fait obstacle au développement de l’intelligence.
Une philosophie réaliste protège les personnes plus fragiles ; et par le fait même c’est l’accueil de la souffrance et de l’autre, tel qu’il est, qui est en jeu.
L’apport de Jean-Paul II
En partant de Saint Thomas (12e siècle) jusqu’à nos jours, que s’est-il passé pour que nous en arrivions à ce relativisme ?
Descartes a créé la fracture dans le Discours sur la Méthode énonçant que « les sens nous trompent parfois » ; il voulait arriver à une méthode absolument sûre en doutant de tout (de nos sens, de l’être des choses…) Par ce raisonnement il en conclut qu’il ne peut douter du fait qu’il doute et en arrive à sa théorie du « je pense donc je suis » : l’être est le fruit de la pensée. Je suis sûr quand « je pars de moi » et l’objet dépend de mes sens. Ce renversement cartésien part du sujet lui-même et redécouvre Dieu en partant de là. Dieu devient le fruit de ma pensée. C’est vraiment le point de rupture qui a ouvert la porte à la philosophie moderne (Hegel, Marx et Sartre). Dans ce contexte, la philosophie d’Aristote est devenue inaudible.
Le génie de Jean Paul II se trouve dans sa philosophie. Le personnalisme voit en la personne humaine quelque chose d’objectif, une fin en soi. Il met la personne humaine dans un domaine métaphysique. Jean-Paul II prend appui sur la philosophie thomiste mais récupère la partie plus intimiste de la conscience (Sheller). Il remet ensemble à la fois le côté objectif mais tient compte des émotions. Il y a quelque chose d’objectif dans ce que ressent l’homme : Jean-Paul II part du sujet lui aussi. Il y a dans la nature humaine une objectivité mais aussi l’expérience de la conscience qui est libre. On arrive par ce raisonnement à la question de la liberté religieuse qui vient de la liberté de conscience : c’est l’expérience interne. Avec Jean-Paul II on a acceptation d’une donnée réelle mais prise en compte de l’être intime.
La personne humaine ne peut jamais être instrumentalisée… Elle acquiert une dignité (cf. prière à Assise : prier ensemble pour la paix). Tout ne se vaut pas mais dans chaque homme il y a un désir d’absolu qui permet de prier ensemble. Il y a de l’objectivité dans la liberté de conscience (cf. signes religieux, homophobie…). La normalité n’est plus du tout acceptable. Jean-Paul II écrit
Si nous voulons parler de manière sensée du Bien et du Mal nous devons revenir à Saint Thomas d’Aquin, c’est-à-dire, à la philosophie de l’être…On ne peut cependant oublier que toutes ces analyses présupposent implicitement la réalité de l’être-homme, à savoir qu’il existe un être créé, et aussi un être absolu. Si on ne part pas de tels présupposés « réalistes » on finit par se mouvoir dans le vide."
L’intelligence ne peut pas être à elle-même sa propre source.
Le Bien est ce qui est, et le mal, la privation du Bien.