(1) Les fondements de l’Espérance

Enseignement de la halte spirituelle pour femmes (Octobre 2017 - Ourscamp)

L’Espérance est l’un des trois grands caps de la vie chrétienne, les deux autres étant la Foi et la Charité : les vertus théologales. Ainsi, il n’y a pas de possibilité de se dire Chrétien sans le désir de vivre selon l’Espérance.
Selon son rôle d’enseignement, le Catéchisme de l’Église Catholique nous offre un beau programme. C’est ce que nous approfondirons tout au long de ce cycle de conférences.

Père Éric
Père Éric

Le Nouveau Testament les cite dès les premiers écrits : « Nous nous rappelons en présence de notre Dieu et Père l’activité de votre foi, le labeur de votre charité, la constance de votre espérance, qui sont dus à notre Seigneur Jésus Christ. » (1 Th 1, 3).
Nombreuses sont les difficultés à surmonter dans cette vie, et c’est pourtant dans ce monde que le Seigneur a choisi de s’incarner. Sans attendre la félicité de l’au-delà, Il nous appelle à espérer et à témoigner dans ce monde !

Première partie :

Introduction :

Je voudrais tout d’abord vous dire comment m’est venue l’idée de ce thème : un jeune couple qui dressait l’oreille lorsque j’évoquais l’Espérance lors d’une préparation au baptême, particulièrement en lien avec le jugement dernier.
J’avais en tête les lignes écrites par Benoît XVI dans son encyclique sur l’Espérance - Spe salvi – dans lesquelles il assure que tout le monde désire le jugement. Si l’on fait abstraction de l’image lugubre de la balance, on perçoit bien qu’il y a une différence entre Hitler et Mère Térésa, et que même plongées dans la lumière de l’Espérance, leurs deux vies sont loin de revenir au même…

Ceci amène la notion du bien et du mal, et de ce que la Résurrection vient transformer dans tout cela. J’ai ainsi eu l’intuition qu’il y a beaucoup à développer au sujet des lieux où l’on peut grandir dans l’Espérance et que cela vaut la peine de l’approfondir afin d’entrer plus profondément dans le mystère de la Foi. Et ceci a été confirmé par les catéchèses que donne le pape François depuis décembre 2016.

Le Seigneur nous appelle à ne pas désespérer de ce monde qui va mal, mais t’être des témoins de l’Espérance.

De fait, les papes en ont beaucoup parlé ces dernières décennies : le pape François, Benoît XVI, Jean-Paul II, le catéchisme, le concile via Gaudium et spes. Nous avons également de beaux textes ainsi que de beaux témoignages d’hommes et de femmes vivant de notre temps.

Mais, comment définir l’espérance. Il faut redire qu’elle n’est pas une invention de l’Église, qui s’est contentée de mettre des mots sur une réalité humaine dès les premiers écrits du nouveau testament, comme on peut le lire dans Saint Paul.

« Gardons indéfectible la confession de l’espérance, car celui qui a promis est fidèle » (He 10,23).
« Cet Esprit, il l’a répandu sur nous à profusion, par Jésus Christ notre Sauveur, afin que, justifiés par la grâce du Christ, nous obtenions en espérance l’héritage de la vie éternelle » (Tt 3,6-7).

Plus tard, le catéchisme de l’Église Catholique s’autorise à en donner quelques ingrédients (1817) :

« L’espérance est la vertu théologale par laquelle nous désirons comme notre bonheur le Royaume des cieux et la Vie éternelle, en mettant notre confiance dans les promesses du Christ et en prenant appui, non sur nos forces, mais sur le secours de la grâce du Saint-Esprit. » (CEC 1817)

Rappelons aussi l’acte d’espérance, une prière fréquemment récitée par les religieux :

« Mon Dieu, j’espère avec une ferme confiance que vous me donnerez, par les mérites de Jésus-Christ, votre grâce en ce monde et le bonheur éternel dans l’autre, parce que vous l’avez promis et que vous tenez toujours vos promesses. »

Le fondement de l’espérance en Dieu

Dieu tout puissant

Distinction de l’espoir et de l’espérance
  • L’espérance est l’œuvre de Dieu ; l’espoir est l’œuvre de l’homme.
  • L’espoir s’estime à l’aide de la raison. L’espérance se vit sous le regard de la foi !
  • L’objet de l’espérance est le salut, le bonheur béatifique, la participation à la gloire de Dieu. L’objet de l’espérance n’est pas le paradis sur terre.
Attention à l’espérance sécularisée :

Ce n’est pas la résurrection qui fonde l’espérance, mais l’espérance qui fonde la résurrection. L’espérance sécularisée minimise le péché.

Seul un Dieu tout-puissant est fiable

Le salut est donné par Dieu.

Dieu est amour

Prière à la « Vierge Marie » de Saint François de Sales :

« Ayez mémoire et souvenance, très douce Vierge, que vous êtes ma Mère et que je suis votre fils ; que vous êtes puissante et que je suis un pauvre homme vil et faible. (…) Ne dites pas, gracieuse Vierge, que vous ne pouvez ; car votre bien-aimé Fils vous a donné tout pouvoir, tant au ciel comme en la terre. Ne dites pas que vous ne devez ; car vous êtes la commune Mère de tous les pauvres humains et particulièrement la mienne.
Si vous ne pouviez, je vous excuserais disant : il est vrai qu’elle est ma mère et qu’elle me chérit comme son fils, mais la pauvrette manque d’avoir et de pouvoir.
Si vous n’étiez ma Mère, avec raison je patienterais disant : elle est bien assez riche pour m’assister ; mais hélas, n’étant pas ma mère, elle ne m’aime pas.
Puis donc, très douce Vierge, que vous êtes ma Mère et que vous êtes puissante, comment vous excuserais-je si vous ne me soulagez et ne me prêtez votre secours et assistance ?
Vous voyez, ma mère, que vous êtes contrainte d’acquiescer à toutes mes demandes !… »

Ce n’est pas une force impersonnelle et aveugle qui gouverne le monde, mais c’est un Dieu personnel qui nous aime. La racine de l’espérance chrétienne est la foi dans la miséricorde et la bonté de Dieu.

« Dieu est le fondement de l’espérance – non pas n’importe quel dieu, mais le Dieu qui possède un visage humain et qui nous a aimés jusqu’au bout – chacun individuellement et l’humanité tout entière. Son Règne n’est pas un au-delà imaginaire, placé dans un avenir qui ne se réalise jamais ; son règne est présent là où il est aimé et où son amour nous atteint. Seul son amour nous donne la possibilité de persévérer avec sobriété jour après jour, sans perdre l’élan de l’espérance, dans un monde qui, par nature, est imparfait… » (Spe Salvi n° 31)

La promesse et la fidélité de Dieu

L’espérance, ce n’est pas imposer à Dieu ses propres désirs. Il est vrai que cela est décapant car nous avons quelquefois de fausses idées sur les promesses de Dieu. Il ne s’agit pas d’instrumentaliser Dieu pour que nos affaires marchent. D’ailleurs, on ne met pas la main sur Dieu et il reste libre.

Le contenu de l’espérance

L’espérance concerne à la fois le terme du voyage (la vie éternelle) et le chemin pour y aller (la grâce).
L’objet premier de l’espérance est Dieu lui-même. Il ne faut pas espérer moins. Par l’espérance, nous désirons comme notre bonheur le Royaume des cieux et la Vie éternelle. L’espérance porte aussi sur les moyens pour l’atteindre.

La vie éternelle

Après la mort, nous vivrons dans un état de joie parfaite, sous le regard de Dieu. C’est ce qu’on appelle la vie éternelle. Elle concerne tous les hommes qui en ont le désir et peut déjà s’expérimenter sur la terre.
Dans les évangiles, la vie éternelle n’est pas seulement une autre vie après celle que nous connaissons maintenant, mais la vie qui continue malgré la mort du corps. Une vie centrée sur l’essentiel, c’est-à-dire sur les valeurs éternelles que sont la foi, l’espérance et l’amour (comme le dirait l’apôtre Paul), une telle vie me semble être la vraie vie.

« Voulons-nous vraiment vivre éternellement ? Peut-être aujourd’hui de nombreuses personnes refusent-elles la foi simplement parce que la vie éternelle ne leur semble pas quelque chose de désirable. Ils ne veulent nullement la vie éternelle, mais la vie présente. » (Spe Salvi n° 10)

La grâce

(1996) Notre justification vient de la grâce de Dieu. La grâce est la faveur, le secours gratuit que Dieu nous donne pour répondre à son appel : devenir enfants de Dieu (cf. Jn 1, 12-18), fils adoptifs (cf. Rm 8, 14-17), participants de la divine nature (cf. 2 P 1, 3-4), de la vie éternelle (cf. Jn 17, 3).
(1997) La grâce est une participation à la vie de Dieu, elle nous introduit dans l’intimité de la vie trinitaire.

Le sujet de l’espérance

La confiance

Comment définir la confiance ?

« Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous » (Rm).
« Tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu » (Rm 8, 28).
« Jetez en lui tous vos soucis et il prendra soin de vous » (1 P).

La Lettre aux Hébreux parle de l’espérance comme d’une ancre jetée non en terre mais au ciel : elle est « l’ancre de l’âme », sûre et ferme, « qui pénètre … là où est entré pour nous, en précurseur, Jésus » (He 6,19-20). « Je sais en qui je me suis confié ».
Une autre image employée par le pape François : le casque. l’invitation de saint Paul aux premières communautés de « porter l’espérance du salut » comme un casque « bien accroché » sur la tête, face aux épreuves de la vie.

L’Espérance est une antidote à nos peurs humaines. Dieu est notre Rocher. Saint Pierre qui marche sur les eaux illustre bien l’attitude d’espérance.

« Le cœur des saints est constant comme un rocher au milieu de la mer. » (Curé d’Ars, Monnin II 535)

Le dynamisme

« Il y a tout un dynamisme dans l’Espérance. C’est la vertu du désir. Charles Péguy dit que les trois vertus théologales sont comme trois sœurs : deux d’entre elles sont grandes tandis que la troisième est une petite fille. Elles avancent ensemble en se tenant par la main, la petite fille espérance au centre. A les voir il semblerait que ce sont les grandes qui entraînent la petite, mais c’est tout le contraire : c’est la petite qui entraîne les deux grandes. C’est l’espérance qui entraîne la foi et la charité. Sans l’espérance tout s’arrêterait (cf. C. Péguy, Le Porche du mystère de la deuxième vertu).
L’Espérance nous ouvre un avenir. Saint Paul dit aux Thessaloniciens : « Vous ne devez pas être abattus comme les autres, qui n’ont pas d’espérance » (1 Th 4, 13).

Ici aussi, apparaît comme élément caractéristique des chrétiens le fait qu’ils ont un avenir : ce n’est pas qu’ils sachent dans les détails ce qui les attend, mais ils savent de manière générale que leur vie ne finit pas dans le néant. C’est seulement lorsque l’avenir est assuré en tant que réalité positive que le présent devient aussi vivable. » (Benoît XVI Spe Salvi n° 2)

La patience

L’Espérance c’est continuer à croire, toujours et malgré tout (…) C’est savoir que le mal ne triomphera pas, que les souffrances finiront. « Qu’il est laid de voir un chrétien qui a perdu toute espérance », un chrétien qui « n’a devant son cœur qu’un mur et croit que tout est fini pour lui », s’est exclamé le Pape. Non, « soyons des hommes et des femmes d’espérance », qui se laissent « toucher par Dieu », appelait-il deux semaines avant Noël.
Un moyen pour savoir si vous avez l’espérance en vous : la patience à l’égard des autres. C’est la certitude que l’amour du Christ agit chez les autres, même s’ils le refusent encore et encore. Toute impatience traduit un manque d’espérance. Il faudrait nous confesser d’avoir désespérer de l’autre.

La vertu

Il s’agit de collaborer à la grâce. Nous ne pouvons rien sans la grâce mais la grâce ne fera rien sans nous (image du vélo à assistance électrique).
Comme toute vertu, l’espérance est acquise par la répétition d’acte. Elle nous est donnée en germe dans le baptême mais il nous appartient de la faire grandir.

Conclusion

« Montrer l’espérance est une tâche fondamentale de l’Église. Le Concile Vatican II nous a laissé à ce propos une note lumineuse : "On peut légitimement penser que l’avenir est entre les mains de ceux qui auront su donner aux générations de demain des raisons de vivre et d’espérer" (Gaudium et spes, n. 31). Dans cette perspective, j’ai plaisir à re-proposer l’appel à la confiance que j’ai lancé dans mon discours aux Nations unies, en 1995 : « Nous ne devons pas avoir peur de l’avenir […] Nous sommes capables de sagesse et de vertu. Avec ces dons et avec l’aide de la grâce de Dieu, nous pouvons construire dans le siècle qui est sur le point d’arriver et pour le prochain millénaire, une civilisation digne de la personne humaine, une vraie culture de la liberté. Nous pouvons et nous devons le faire ! Et, en le faisant, nous pourrons nous rendre compte que les larmes de ce siècle ont préparé la voie d’un nouveau printemps de l’esprit humain. » (cf. Insegnamenti XVIII/2 [1995], p. 744, cf. ORLF n. 41, du 10 octobre 1995) »
(Jean-Paul II, 24 janvier 2001)


Deuxième partie :

L’objet de l’espérance :

La vie éternelle

L’objet de l’espérance : la grâce en ce monde et le bonheur éternel dans l’autre. L’objet premier de l’espérance est Dieu lui-même. Il ne faut pas espérer moins. Par l’espérance, nous désirons comme notre bonheur le Royaume des cieux et la Vie éternelle. L’espérance porte aussi sur les moyens pour l’atteindre. L’espérance ne porte pas d’abord sur des biens matériels que l’on désire mais sur une relation avec Dieu.

Catéchisme de l’Église Catholique détaille la phrase du credo : « Je crois à la vie éternelle »

« Le chrétien qui unit sa propre mort à celle de Jésus voit la mort comme une venue vers Lui et une entrée dans la vie éternelle. Lorsque l’Église a, pour la dernière fois, dit les paroles de pardon de l’absolution du Christ sur le chrétien mourant, l’a scellé pour la dernière fois d’une onction fortifiante et lui a donné le Christ dans le viatique comme nourriture pour le voyage, elle lui parle avec une douce assurance : « Quitte ce monde, âme chrétienne, au nom du Père Tout-Puissant qui t’a créé, au nom de Jésus-Christ, le Fils du Dieu vivant, qui a souffert pour toi, au nom du Saint-Esprit qui a été répandu en toi. Prends ta place aujourd’hui dans la paix, et fixe ta demeure avec Dieu dans la sainte Sion, avec la Vierge Marie, la Mère de Dieu, avec saint Joseph, les anges et tous les saints de Dieu (…). Retourne auprès de ton Créateur qui t’a formé de la poussière du sol. Qu’à l’heure où ton âme sortira de ton corps, Marie, les anges et tous les saints se hâtent à ta rencontre (…). Que tu puisses voir ton Rédempteur face à face … » (" Commendatio animæ ") » (CEC 1020)

Spe Salvi, La vie éternelle – qu’est-ce que c’est ?

« Voulons-nous vraiment vivre éternellement ? Peut-être aujourd’hui de nombreuses personnes refusent-elles la foi simplement parce que la vie éternelle ne leur semble pas quelque chose de désirable. Ils ne veulent nullement la vie éternelle, mais la vie présente, et la foi en la vie éternelle semble, dans ce but, plutôt un obstacle. Continuer à vivre éternellement – sans fin – apparaît plus comme une condamnation que comme un don. Certainement on voudrait renvoyer la mort le plus loin possible. Mais vivre toujours, sans fin – en définitive, cela peut être seulement ennuyeux et en fin de compte insupportable. » (Spe Salvi n° 10)
« L’élimination de la mort ou même son renvoi presque illimité mettrait la terre et l’humanité dans une condition impossible et ne serait même pas un bénéfice pour l’individu lui-même. Il y a clairement une contradiction dans notre attitude, qui renvoie à une contradiction intérieure de notre existence elle-même.
D’une part, nous ne voulons pas mourir ; surtout celui qui nous aime ne veut pas que nous mourions. D’autre part, nous ne désirons même pas cependant continuer à exister de manière illimitée et même la terre n’a pas été créée dans cette perspective.
Alors, que voulons-nous vraiment ? Ce paradoxe de notre propre attitude suscite une question plus profonde : qu’est-ce en réalité que la « vie » ? Et que signifie véritablement « éternité » ? Il y a des moments où nous le percevons tout à coup : oui, ce serait précisément cela – la vraie « vie » – ainsi devrait-elle être.
Par comparaison, ce que, dans la vie quotidienne, nous appelons « vie », en vérité ne l’est pas. Dans sa longue lettre sur la prière adressée à Proba, une veuve romaine aisée et mère de trois consuls, Augustin écrivit un jour : dans le fond, nous voulons une seule chose - « la vie bienheureuse », la vie qui est simplement vie, simplement « bonheur ».
En fin de compte, nous ne demandons rien d’autre dans la prière. Nous ne marchons vers rien d’autre – c’est de cela seulement dont il s’agit. Mais ensuite, Augustin ajoute aussi : en regardant mieux, nous ne savons pas de fait ce que, en définitive, nous désirons, ce que nous voudrions précisément. Nous ne connaissons pas du tout cette réalité ; même durant les moments où nous pensons pouvoir la toucher, nous ne la rejoignons pas vraiment. « Nous ne savons pas ce que nous devons demander », confesse-t-il avec les mots de saint Paul (Rm 8, 26). Nous savons seulement que ce n’est pas cela.
Toutefois, dans notre non-savoir, nous savons que cette réalité doit exister. « Il y a donc en nous, pour ainsi dire, une savante ignorance (docta ignorantia) », écrit-il. Nous ne savons pas ce que nous voudrions vraiment ; nous ne connaissons pas cette « vraie vie » ; et cependant, nous savons qu’il doit exister un quelque chose que nous ne connaissons pas et vers lequel nous nous sentons poussés. » (Spe Salvi n° 11)

Au passage, il faudrait tout de même corriger la publicité qui dit : « Auchan, la vie, la vraie ! »

« Je pense qu’Augustin décrivait là de manière très précise et toujours valable la situation essentielle de l’homme, la situation d’où proviennent toutes ses contradictions et toutes ses espérances. Nous désirons en quelque sorte la vie elle-même, la vraie vie, qui n’est même pas touchée par la mort ; mais, en même temps, nous ne connaissons pas ce vers quoi nous nous sentons poussés. Nous ne pouvons pas nous arrêter de nous diriger vers cela et cependant nous savons que tout ce dont nous pouvons faire l’expérience ou que nous pouvons réaliser n’est pas ce à quoi nous aspirons.
Cette « chose » inconnue est la véritable « espérance », qui nous pousse et le fait qu’elle soit ignorée est, en même temps, la cause de toutes les désespérances comme aussi de tous les élans positifs ou destructeurs vers le monde authentique et vers l’homme authentique. L’expression « vie éternelle » cherche à donner un nom à cette réalité connue inconnue. Il s’agit nécessairement d’une expression insuffisante, qui crée la confusion.
En effet, « éternel » suscite en nous l’idée de l’interminable, et cela nous fait peur ; « vie » nous fait penser à la vie que nous connaissons, que nous aimons et que nous ne voulons pas perdre et qui est cependant, en même temps, plus faite de fatigue que de satisfaction, de sorte que, tandis que d’un côté nous la désirons, de l’autre nous ne la voulons pas. Nous pouvons seulement chercher à sortir par la pensée de la temporalité dont nous sommes prisonniers et en quelque sorte prévoir que l’éternité n’est pas une succession continue des jours du calendrier, mais quelque chose comme le moment rempli de satisfaction, dans lequel la totalité nous embrasse et dans lequel nous embrassons la totalité. Il s’agirait du moment de l’immersion dans l’océan de l’amour infini, dans lequel le temps - l’avant et l’après - n’existe plus.
Nous pouvons seulement chercher à penser que ce moment est la vie au sens plénier, une immersion toujours nouvelle dans l’immensité de l’être, tandis que nous sommes simplement comblés de joie. C’est ainsi que Jésus l’exprime dans Jean : « Je vous reverrai, et votre cœur se réjouira ; et votre joie, personne ne vous l’enlèvera. » (16, 22)

Nous devons penser dans ce sens si nous voulons comprendre ce vers quoi tend l’espérance chrétienne, ce que nous attendons par la foi, par notre être avec le Christ. » (Spe Salvi n° 12)

La bienheureuse espérance : la manifestation de la gloire de Jésus

L’entrée en matière de la lettre à Tite est claire :

« Paul, serviteur de Dieu, apôtre de Jésus Christ au service de la foi de ceux que Dieu a choisis et de la pleine connaissance de la vérité qui est en accord avec la piété. Nous avons l’espérance de la vie éternelle, promise depuis toujours par Dieu qui ne ment pas. » (Tite 1, 1-2)
« La grâce de Dieu s’est manifestée pour le salut de tous les hommes. Elle nous apprend à renoncer à l’impiété et aux convoitises de ce monde, et à vivre dans le temps présent de manière raisonnable, avec justice et piété, attendant que se réalise la bienheureuse espérance : la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur, Jésus Christ. Car il s’est donné pour nous afin de nous racheter de toutes nos fautes, et de nous purifier pour faire de nous son peuple, un peuple ardent à faire le bien. » (Tite 2, 11-14 ; cf. baptême du Seigneur)

C’est de cette épître qu’est tirée la prière après le Notre Père pendant la messe :

« Délivre-nous de tout mal, Seigneur, et donne la paix à notre temps ; par la miséricorde, libère-nous du péché, rassure-nous devant les épreuves en cette vie où nous espérons le bonheur que tu promets et l’avènement de Jésus-Christ notre Sauveur. »

Comme bien souvent, ce ET signifie "c’est-à-dire". Il faut entendre "Nous espérons le bonheur que tu promets QUI EST l’avènement de Jésus-Christ notre Sauveur". Ce n’est pas une manière de nous voiler la face sur les lenteurs de cette transformation du monde, c’est un acte de foi : nous osons affirmer que l’amour du Christ aura le dernier mot.

La vie éternelle est déjà commencée

Après la mort, nous vivrons dans un état de joie parfaite, sous le regard de Dieu. C’est ce qu’on appelle la vie éternelle. Elle concerne tous les hommes qui en ont le désir et peut déjà s’expérimenter sur la terre.
Par l’espérance, nous n’attendons pas seulement le bonheur dans l’au-delà mais aussi dans une vie surnaturelle dès ici-bas.

« On me demande souvent si je crois à la vie dans l’au-delà. Quand nous mourons, partons-nous ailleurs, allons-nous au paradis ? Ce n’est pas vraiment comme cela que le Nouveau Testament exprime notre espérance chrétienne. Dans l’Évangile de Jean, Jésus dit : "Celui qui croit a la vie éternelle" (Jean 6,47).
La vie éternelle commence maintenant, quand nous participons à la vie de Dieu par l’amour et le pardon. Selon Saint Paul, nous sommes baptisés dans la mort et la résurrection de Jésus, la mort n’a donc pas d’emprise sur nous, même ici-bas. Ainsi, le paradis est-il l’entrée complète, entière et définitive dans la plénitude d’une vie qui a déjà commencé. (…)
Le paradis, c’est la victoire définitive de l’amour sur la haine et de la vie sur la mort. Nous prendrons part à la résurrection du Christ et toutes nos divisions seront annulées dans le Christ. À chaque petite victoire sur la haine, nous avons donc un avant-goût du paradis dans nos vies terrestres. Ces pensées sont-elles irréalistes ? Si nous croyons que Dieu est celui qui crée à partir de rien, pourquoi ne croirions-nous pas que Dieu peut nous recréer, en faisant de nous des êtres que l’amour habite complètement ?
Et pourquoi Dieu aurait-il mis dans nos cœurs le désir de quelque chose que nous ne pourrions pas recevoir ? Si le cœur humain est rempli, comme l’écrivait Shakespeare, "d’aspirations immortelles", elles ne nous sont certainement pas données en vain. » (Timothy Radcliffe, la Vie, 05/08/2010)

La vie éternelle est déjà là, vers sa plénitude. La vie éternelle est quelque chose que le Christ nous donne dans cette vie présente, ce n’est pas seulement une vie future (après la mort de notre corps), mais une vie présente qui est éternelle par certains aspects.

Dans les évangiles, la vie éternelle n’est pas seulement une autre vie après celle que nous connaissons maintenant, mais la vie qui continue malgré la mort du corps. C’est une invitation à vivre vraiment cette vie présente. Ce serait une erreur de la négliger car c’est elle, cette vie présente, qui doit être de qualité.

Révélation progressive de la résurrection

« La résurrection des morts a été révélée progressivement par Dieu à son Peuple. L’espérance en la résurrection corporelle des morts s’est imposée comme une conséquence intrinsèque de la foi en un Dieu créateur de l’homme tout entier, âme et corps. Le créateur du ciel et de la terre est aussi Celui qui maintient fidèlement son alliance avec Abraham et sa descendance. C’est dans cette double perspective que commencera à s’exprimer la foi en la résurrection. Dans leurs épreuves, les martyrs Maccabées confessent : « Le Roi du monde nous ressuscitera pour une vie éternelle, nous qui mourons pour ses lois (2 M 7, 9). Mieux vaut mourir de la main des hommes en tenant de Dieu l’espoir d’être ressuscité par lui (2 M 7, 14 ; cf. 7, 29 ; Dn 12, 1-13). » » (CEC 992)
« Les Pharisiens (cf. Ac 23, 6) et bien des contemporains du Seigneur (cf. Jn 11, 24) espéraient la résurrection. Jésus l’enseigne fermement. Aux Sadducéens qui la nient il répond : « Vous ne connaissez ni les Écritures ni la puissance de Dieu, vous êtes dans l’erreur » (Mc 12, 24). La foi en la résurrection repose sur la foi en Dieu qui « n’est pas un Dieu des morts, mais des vivants. » (Mc 12, 27) » (CEC 993)
« Mais il y a plus : Jésus lie la foi en la résurrection à sa propre personne : "Je suis la Résurrection et la vie" (Jn 11, 25). C’est Jésus lui-même qui ressuscitera au dernier jour ceux qui auront cru en lui (cf. Jn 5, 24-25 ; 6, 40) et qui auront mangé son corps et bu son sang (cf. Jn 6, 54). Il en donne dès maintenant un signe et un gage en rendant la vie à certains morts (cf. Mc 5, 21-42 ; Lc 7, 11-17 ; Jn 11), annonçant par là sa propre Résurrection qui sera cependant d’un autre ordre. De cet événement unique Il parle comme du « signe de Jonas » (Mt 12, 40), du signe du Temple (cf. Jn 2, 19-22) : il annonce sa Résurrection le troisième jour après sa mise à mort (cf. Mc 10, 34). » (CEC 994)

La vie éternelle : une relation avec le Dieu de vie

« Celui qui est touché par l’amour commence à comprendre ce qui serait précisément « vie ». Il commence à comprendre ce que veut dire la parole d’espérance que nous avons rencontrée dans le rite du Baptême : de la foi j’attends la « vie éternelle » – la vie véritable qui, totalement et sans menaces, est, dans toute sa plénitude, simplement la vie. Jésus, qui a dit de lui-même être venu pour que nous ayons la vie et que nous l’ayons en plénitude, en abondance (cf. Jn 10, 10), nous a aussi expliqué ce que signifie « la vie » : « La vie éternelle, c’est de te connaître, toi le seul Dieu, le vrai Dieu, et de connaître celui que tu as envoyé, Jésus Christ » (Jn 17, 3). La vie dans le sens véritable, on ne l’a pas en soi, de soi tout seul et pas même seulement par soi : elle est une relation. Et la vie dans sa totalité est relation avec Celui qui est la source de la vie.
Si nous sommes en relation avec Celui qui ne meurt pas, qui est Lui-même la Vie et l’Amour, alors nous sommes dans la vie. Alors « nous vivons ». » (Spe Salvi n° 27)

« Dieu nous a donné la vie éternelle, et cette vie est dans son Fils. Celui qui a le Fils possède la vie ; celui qui n’a pas le Fils de Dieu ne possède pas la vie. » (1 Jn 5, 11-12)
« Père, l’heure est venue. Glorifie ton Fils afin que le Fils te glorifie. Ainsi, comme tu lui as donné pouvoir sur tout être de chair, il donnera la vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés. Or, la vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus Christ. » (Jn 17, 1-3)

La grâce

La grâce, participation à la vie de Dieu
« Notre justification vient de la grâce de Dieu. La grâce est la faveur, le secours gratuit que Dieu nous donne pour répondre à son appel : devenir enfants de Dieu (cf. Jn 1, 12-18), fils adoptifs (cf. Rm 8, 14-17), participants de la divine nature (cf. 2 P 1, 3-4), de la vie éternelle (cf. Jn 17, 3). » (CEC 1996)
« La grâce est une participation à la vie de Dieu, elle nous introduit dans l’intimité de la vie trinitaire : Par le Baptême le chrétien participe à la grâce du Christ, Tête de son Corps. Comme un « fils adoptif », il peut désormais appeler Dieu « Père », en union avec le Fils unique. Il reçoit la vie de l’Esprit qui lui insuffle la charité et qui forme l’Église. » (CEC 1997)
« Cette vocation à la vie éternelle est surnaturelle. Elle dépend entièrement de l’initiative gratuite de Dieu, car Lui seul peut se révéler et se donner Lui-même. Elle surpasse les capacités de l’intelligence et les forces de la volonté humaine, comme de toute créature (cf. 1 Co 2, 7-9). » (CEC 1998)
« La grâce du Christ est le don gratuit que Dieu nous fait de sa vie infusée par l’Esprit Saint dans notre âme pour la guérir du péché et la sanctifier : C’est la grâce sanctifiante ou déifiante, reçue dans le Baptême. Elle est en nous la source de l’œuvre de sanctification (cf. Jn 4, 14 ; 7, 38-39) : Si donc quelqu’un est dans le Christ, c’est une création nouvelle ; l’être ancien a disparu, un être nouveau est là. Et le tout vient de Dieu qui nous a réconciliés avec lui par le Christ (2 Co 5, 18). » (CEC 1999)
Grâce habituelle et grâces actuelles
« La grâce sanctifiante est un don habituel, une disposition stable et surnaturelle perfectionnant l’âme même pour la rendre capable de vivre avec Dieu, d’agir par son amour. On distinguera la grâce habituelle, disposition permanente à vivre et à agir selon l’appel divin, et les grâces actuelles qui désignent les interventions divines soit à l’origine de la conversion soit au cours de l’œuvre de la sanctification. » (CEC 2000)
Notre collaboration à la grâce
« La préparation de l’homme à l’accueil de la grâce est déjà une œuvre de la grâce. Celle-ci est nécessaire pour susciter et soutenir notre collaboration à la justification par la foi et à la sanctification par la charité. Dieu achève en nous ce qu’il a commencé, « car il commence en faisant en sorte, par son opération, que nous voulions : il achève, en coopérant avec nos vouloirs déjà convertis » (S. Augustin, grat. 17 : PL 44, 901) : Certes nous travaillons nous aussi, mais nous ne faisons que travailler avec Dieu qui travaille. Car sa miséricorde nous a devancés pour que nous soyons guéris, car elle nous suit encore pour qu’une fois guéris, nous soyons vivifiés ; elle nous devance pour que nous soyons appelés, elle nous suit pour que nous soyons glorifiés ; elle nous devance pour que nous vivions selon la piété, elle nous suit pour que nous vivions à jamais avec Dieu, car sans lui nous ne pouvons rien faire (S. Augustin, nat. Et grat. 31 : PL 44, 264). » (CEC 2001)

Avez-vous un vélo à assistance électrique ? Si j’ai bien compris, il s’agit d’un vélo muni d’un moteur. Mais la particularité, par rapport à un « cyclomoteur » (vélomoteur, mobylette ou scooter), c’est que le moteur ne se met en route que lorsque l’on pédale. C’est seulement ensuite une fois cette mise en marche réalisée qu’un moteur électrique peut entrer en action avec l’objectif de soulager l’effort. Si l’on s’arrête de pédaler, le moteur s’arrête lui aussi. Si l’on freine, le moteur s’arrête.

Grâces sacramentelles et charismes
« La grâce est d’abord et principalement le don de l’Esprit qui nous justifie et nous sanctifie. Mais la grâce comprend aussi les dons que l’Esprit nous accorde pour nous associer à son œuvre, pour nous rendre capables de collaborer au salut des autres et à la croissance du Corps du Christ, l’Église. Ce sont les grâces sacramentelles, dons propres aux différents sacrements. Ce sont en outre les grâces spéciales appelés aussi « charismes » suivant le terme grec employé par S. Paul, et qui signifie faveur, don gratuit, bienfait (cf. LG 12). Quel que soit leur caractère, parfois extraordinaire, comme le don des miracles ou des langues, les charismes sont ordonnés à la grâce sanctifiante, et ont pour but le bien commun de l’Église. Ils sont au service de la charité qui édifie l’Église (cf. 1 Co 12). » (CEC 2003)
La grâce est de l’ordre de la foi
« Étant d’ordre surnaturel, la grâce échappe à notre expérience et ne peut être connue que par la foi. Nous ne pouvons donc nous fonder sur nos sentiments ou nos œuvres pour en déduire que nous sommes justifiés et sauvés (cf. Cc. Trente : DS 1533-1534). Cependant, selon la parole du Seigneur : « C’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez » (Mt 7, 20), la considération des bienfaits de Dieu dans notre vie et dans la vie des saints, nous offre une garantie que la grâce est à l’œuvre en nous et nous incite à une foi toujours plus grande et à une attitude de pauvreté confiante : On trouve une des plus belles illustrations de cette attitude dans la réponse de Sainte Jeanne d’Arc à une question piège de ses juges ecclésiastiques : « Interrogée, si elle sait qu’elle soit en la grâce de Dieu ; répond : ‘Si je n’y suis, Dieu m’y veuille mettre ; si j’y suis, Dieu m’y veuille garder’ » (Jeanne d’Arc, proc.). » (CEC 2005)

L’attitude de l’homme

La confiance

L’image de l’ancre et du casque

La Lettre aux Hébreux parle de l’espérance comme d’une ancre jetée non en terre mais au ciel : « Saisissons l’espérance qui nous est offerte. En elle, nous avons comme une ancre de notre âme, sûre autant que solide, et pénétrant par-delà le voile du sanctuaire, là où est entré pour nous Jésus » (cf. He 6, 18-19). L’espérance nous aide à ne pas faire naufrage spirituellement face aux tempêtes de la vie :

« Voici la consigne que je te transmets, Timothée mon enfant, conformément aux paroles prophétiques jadis prononcées sur toi : livre ainsi la bonne bataille, en gardant la foi et une conscience droite ; pour avoir abandonné cette droiture, certains ont connu le naufrage de leur foi. » (1 Tm 1, 18-19)

Ces tempêtes peuvent être des déceptions, des pertes matérielles, une maladie chronique, la mort d’un être aimé et toute autre menace à notre intégrité. Lors de son audience du 1er février, le pape François a retenu l’invitation de saint Paul aux premières communautés de « porter l’espérance du salut » comme un casque « bien accroché » sur la tête, face aux épreuves de la vie. L’espérance chrétienne, c’est « avoir la certitude de marcher vers quelque chose qui existe, et non vers quelque chose que l’on aimerait voir exister » (PF audience du 1er février 2017). )]

Citations des saints

Paul : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous. » (Rm)
« Tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu. » (Rm 8, 28)
« Je sais en qui je me suis confié. » (2 Tm 1,12)
« Rien ne nous séparera de l’amour de Dieu (Rm 8, 38s). Il le rend fier et constant dans l’épreuve (Rm 5,1-5). Cette confiance que l’Apôtre affirme, même aux heures de crise (Ga 5,10), lui donne une assurance indéfectible pour annoncer en toute liberté, (parrèsia) la parole de Dieu (1 Th 2,2 ; Ac 28,31).

Pierre : « Jetez en lui tous vos soucis et il prendra soin de vous. » (1 P) La confiance de Pierre pour la pêche miraculeuse (Lc 5,1-15).

Curé d’Ars : « Le cœur des saints est constant comme un rocher au milieu de la mer. » (Monnin II 535)

Thérèse de l’Enfant Jésus : C’est « méconnaître la bonté infinie de Dieu que de restreindre ses désirs et ses espérances » (PA 1332). « Gardez votre confiance. Il est impossible que Dieu n’y réponde pas, car il mesure toujours ses dons à notre confiance » (PA 1334). « Il faut attendre tout du Seigneur… Il faut espérer tout de sa bonté » (PA 787).

Prière d’Abandon de Charles de Foucauld :

« Mon Père Je m’abandonne à toi. Fais de moi ce qu’il te plaira. Quoi que tu fasses de moi, je te remercie. Je suis prêt à tout, j’accepte tout.
Pourvu que ta volonté se fasse en moi et en toutes tes créatures, je ne désire rien d’autre mon Dieu.
Je remets ma vie entre tes mains. Je te la donne, mon Dieu, avec tout l’amour de mon cœur parce que je t’aime, et que ce m’est un besoin d’amour de me donner, de me remettre entre tes mains sans mesure avec une infinie confiance, car tu es mon Père. »

La confiance pour surmonter nos peurs

L’espérance est une antidote à nos peurs humaines. Dieu est notre Rocher. Saint Pierre qui marche sur les eaux illustre bien l’attitude d’espérance.

« Aussitôt après avoir nourri la foule dans le désert, Jésus obligea ses disciples à monter dans la barque et à le précéder sur l’autre rive, pendant qu’il renverrait les foules. Quand il les eut renvoyées, il se rendit dans la montagne, à l’écart, pour prier.
Le soir venu, il était là, seul. La barque était déjà à une bonne distance de la terre, elle était battue par les vagues, car le vent était contraire.
Vers la fin de la nuit, Jésus vint vers eux en marchant sur la mer. En le voyant marcher sur la mer, les disciples furent bouleversés. Ils disaient : « C’est un fantôme », et la peur leur fit pousser des cris.
Mais aussitôt Jésus leur parla : « Confiance ! c’est moi ; n’ayez pas peur ! »
Pierre prit alors la parole :
— « Seigneur, si c’est bien toi, ordonne-moi de venir vers toi sur l’eau. »
Jésus lui dit :
— « Viens ! »
Pierre descendit de la barque et marcha sur les eaux pour aller vers Jésus. Mais, voyant qu’il y avait du vent, il eut peur ; et, comme il commençait à enfoncer, il cria :
— « Seigneur, sauve-moi ! »
Aussitôt Jésus étendit la main, le saisit et lui dit :
— « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? »
Et quand ils furent montés dans la barque, le vent tomba. Alors ceux qui étaient dans la barque se prosternèrent devant lui, et ils lui dirent : « Vraiment, tu es le Fils de Dieu ! » » (Mt 14,22-33)

Dans l’évangile de Jésus qui marche sur l’eau, nous voyons beaucoup une succession de peurs et d’actes de foi. Notre itinéraire est un itinéraire de foi. Mais nous avons beaucoup de peurs à surmonter. Nous sommes appelés à mettre notre confiance non en nous-mêmes mais en Dieu.

« Après avoir nourri la foule au désert, Jésus oblige ses disciples à monter dans la barque et à le précéder sur l’autre rive, pendant qu’il renvoie les foules. »

D’eux-mêmes, les disciples seraient sans doute restés auprès des foules pour savourer la gloire d’être les disciples de celui qui a multiplié les pains. Mais Jésus les envoie en barque vers l’autre rive. Ce ne sont pas les disciples qui ont l’initiative mais Jésus lui-même. Cela veut-il dire pour autant que la traversée sera facile ?
La suite du récit montre bien que non. Alors pourquoi Jésus, s’il savait qu’ils auraient à affronter un vent contraire, leur demande d’aller sur l’autre rive ? C’est certainement parce que ce passage est capital pour eux et qu’il vaut bien la peine de supporter l’effort de la traversée.

Jésus vient à la quatrième veille de la nuit, c’est-à-dire entre trois et six heures du matin. Cela veut dire qu’ils ont dû ramer pendant les trois premières veilles de la nuit, pendant plus des trois quarts de la nuit. Ils ont dû affronter les ténèbres. Pendant ce temps, Jésus était en prière. « La barque était déjà à une bonne distance de la terre » mais ils ne sont pas arrivés. Les vents contraires les empêchent d’avancer, d’atteindre l’autre rive. L’important, c’est moins d’arriver que de suivre l’ordre de Jésus, de s’efforcer de répondre à ce qu’il a demandé.
Ce que Jésus regarde d’abord, ce sont leurs efforts.

« Jésus vint vers eux en marchant sur la mer. »

Jésus arrive d’une façon un peu déconcertante. Pour les Juifs qu’étaient les disciples, il ne s’agit pas seulement d’une performance bouleversant les lois physiques (le corps humain étant plus lourd que l’eau, il devrait couler). Il y a beaucoup plus car la mer était pour eux le domaine des forces mauvaises, le lieu où habitent et agissent les puissances démoniaques (Jb 7, 12 ; Is 27, 1 ; 51, 9s ; Dn 7 ; Mt 8, 32 ; Ap 7, 2s ; 13, 1). C’est pour cela que la tempête apaisée (Mt 8, 26s) n’est pas seulement la preuve d’une domination de Jésus par rapport aux éléments naturels mais aussi la preuve de la supériorité de Jésus sur toutes les forces du mal. C’est pour cela aussi que les esprits impurs de l’homme du pays des Géraséniens précipite le troupeau de porcs dans la mer (Mt 8, 28-34).
Lorsque Jésus marche sur l’eau, il ne défie pas seulement les lois physiques mais surtout les forces du mal. Elles ne peuvent rien sur lui, elles ne peuvent pas l’engloutir. Le mal n’a pas de prise sur Jésus.

Les disciples commencent par se méfier et disent : « c’est un fantôme ». Ils ne courent pas après le merveilleux ; ils ne sont pas facilement crédules. Mais ils se laissent vite gagner par la peur et se mettent à crier. Jésus ne les laisse pas dans la peur. « Aussitôt » il leur dit : « Confiance ! c’est moi ; n’ayez pas peur ! » C’est moi, c’est-à-dire c’est bien moi Jésus ; mais c’est aussi Celui qui est, Dieu, qui est au dessus de toutes choses, celui qui est le maître de tous les éléments naturels et qui est plus puissant que toutes les forces du mal.
C’est d’ailleurs sous ces deux visages que Dieu se présente à Job au terme de son épreuve : le créateur et le maître de tous les éléments du monde (Jb 38-39) et la maîtrise de Dieu sur les forces du mal (Jb 40-41).
Pierre veut discerner si c’est bien Jésus. Et c’est son rôle particulier de chef du collège des apôtres. Il prend des risques pour lui-même pour le bien de tous.

« Voyant qu’il y avait du vent, il eut peur. »

À ce moment-là, ce n’est plus Jésus qu’il voit, mais le vent. Tant qu’il regardait Jésus, tout allait bien. Lorsque son regard quitte Jésus pour se porter sur les obstacles, la peur l’envahit. En fait, à partir de ce moment, il croit moins à la force de Dieu qu’à celle du vent.
« Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? » Le doute entre en lui et il s’enfonce. Jésus ne dit pas : « incrédule » mais « homme de peu de foi » car Pierre a tout de même un peu de foi. Sinon, il n’aurait pas fait le pas d’aller à la rencontre de Jésus en marchant sur l’eau. Il a un peu de foi mais pas assez pour persévérer. On peut faire le parallèle entre ce que Pierre vit ici et ce qu’il vivra à la Passion. C’est le premier à vouloir accompagner Jésus jusqu’au bout. Mais il est aussi celui qui renie.
« Comme il commençait à s’enfoncer, il cria : »Seigneur, sauve-moi !«  » Pierre a le bon réflexe. Et alors, Jésus ne se manifeste pas seulement comme le Dieu qui domine la masse des eaux, mais aussi comme le Dieu qui sauve. Jésus ne se révèle pas seulement comme Dieu mais comme Sauveur.
Dès que Jésus monte dans la barque, le vent tombe. Saint Jean ajoute même qu’« aussitôt la barque fut au rivage vers lequel ils se dirigeaient » (Jn 6, 21).

L’appel de Jean-Paul II : N’ayez pas peur ! Entrez dans l’Espérance

« Quand, le 22 octobre 1978, sur la place Saint-Pierre j’ai lancé : « N’ayez pas peur ! », je ne pouvais évidemment pas savoir jusqu’où ces paroles nous entraîneraient, moi et l’Église. Le message qu’elles transmettaient venait bien plus de l’Esprit Saint, ce « consolateur » promis par le Seigneur Jésus à ses Apôtres, que de l’homme qui les prononçait. Au fil des années, j’ai eu maintes occasions de renouveler cet appel.
Ce « N’ayez pas peur ! » doit être pris dans son acception la plus large. C’était un encouragement adressé à tous les hommes, afin qu’ils surmontent la peur que leur inspirait l’état du monde contemporain, aussi bien à l’Est qu’à l’Ouest, au Nord qu’au Sud : n’ayez pas peur de ce que vous avez vous-mêmes créé, n’ayez pas peur de tout ce qui, dans ce que l’homme a produit, risque de se retourner contre lui ! En un mot, n’ayez pas peur de vous-mêmes !
Pourquoi ne devons-nous pas avoir peur ? Parce que l’homme a été racheté par Dieu ! Quand j’ai prononcé ces mots sur la place Saint-Pierre, il m’apparaissait déjà clairement que ma première encyclique et tout mon pontificat devaient donner la priorité à la vérité sur la Rédemption. C’est dans cette vérité que s’enracine ce « N’ayez pas peur ! » : « Car Dieu a tant aimé le monde, qu’Il a donné son Fils unique. » Ce Fils demeure au cœur de l’histoire de l’humanité comme le Rédempteur. La Rédemption imprègne toute l’histoire humaine, y compris celle qui se situe avant le Christ, elle prépare l’avenir eschatologique de l’homme. Elle est cette lumière qui « brille dans les ténèbres et que les ténèbres ne parviennent pas à étouffer ». La puissance de la Croix du Christ et de sa Résurrection est toujours plus grande que tout le mal dont l’homme pourrait et devrait avoir peur. (…)

À la fin du deuxième millénaire, nous avons plus que jamais besoin d’entendre cette parole du Christ ressuscité : « N’ayez pas peur ! ». C’est une nécessité pour l’homme d’aujourd’hui qui, même après la chute du communisme, ne cesse pas d’avoir peur en son for intérieur et non sans raisons. C’est une nécessité pour les nations qui renaissent, une fois libérées du joug soviétique, mais aussi pour celles qui assistent de l’extérieur à cette expérience. C’est également une nécessité pour tous les peuples et toutes les nations du monde entier. Il faut que, dans la conscience de chaque être humain, se fortifie la certitude qu’il existe Quelqu’un qui tient dans ses mains le sort de ce monde qui passe, Quelqu’un qui détient les clefs de la mort et des enfers, Quelqu’un qui est l’Alpha et l’Oméga de l’histoire de l’homme, qu’elle soit individuelle ou collective ; et surtout la certitude que ce Quelqu’un est Amour, l’Amour fait homme, l’Amour crucifié et ressuscité, l’Amour sans cesse présent au milieu des hommes ! Il est l’Amour eucharistique. Il est source inépuisable de communion. Il est le seul que nous puissions croire sans la moindre réserve quand Il nous demande : « N’ayez pas peur ! ». »

Témoignage

Afin de ne pas être pas trop abstrait, je me suis dit qu’il serait bien que je témoigne d’un aspect de ma vie. Mon témoignage est simple : à 17 ans, dans la prière, j’ai perçu que Jésus m’appelait à lui consacrer ma vie. A cette époque, la seule communauté que je connaissais était Ourscamp. Cette communauté correspondait à mes attentes : j’y suis rentré et j’y suis resté !
Cependant, au moment où il fallait faire ma demande de vœux perpétuels, j’avais conscience qu’il y avait quelques nuages bien sombres à l’horizon de la congrégation. N’était-il pas dangereux de prononcer des vœux perpétuels alors que je pressentais qu’il y aurait sans doute des difficultés dans l’avenir ?
J’étais dans cette perplexité lorsque nous sommes allés en pèlerinage à Medjugorje en mars 1984. Il n’y avait pas encore de lieux d’accueil. Nous avons dormi dans la tribune de l’église. Et nous avons pu être présent dans la pièce où se trouvaient les « voyants » au moment des apparitions. Savez-vous quel est le texte d’évangile qui nous a été donné à cette occasion ? Je vous le cite :

« Ne vous souciez pas, pour votre vie, de ce que vous mangerez, ni, pour votre corps, de quoi vous le vêtirez. La vie ne vaut-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que les vêtements ?
Regardez les oiseaux du ciel : ils ne font ni semailles ni moisson, ils n’amassent pas dans des greniers, et votre Père céleste les nourrit. Vous-mêmes, ne valez-vous pas beaucoup plus qu’eux ? Qui d’entre vous, en se faisant du souci, peut ajouter une coudée à la longueur de sa vie ?
Et au sujet des vêtements, pourquoi se faire tant de souci ? Observez comment poussent les lis des champs : ils ne travaillent pas, ils ne filent pas. Or je vous dis que Salomon lui-même, dans toute sa gloire, n’était pas habillé comme l’un d’entre eux. Si Dieu donne un tel vêtement à l’herbe des champs, qui est là aujourd’hui, et qui demain sera jetée au feu, ne fera-t-il pas bien davantage pour vous, hommes de peu de foi ?
Ne vous faites donc pas tant de souci ; ne dites pas : “Qu’allons-nous manger ?” ou bien : “Qu’allons-nous boire ?” ou encore : “Avec quoi nous habiller ?” Tout cela, les païens le recherchent. Mais votre Père céleste sait que vous en avez besoin.
Cherchez d’abord le royaume de Dieu et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît. 34 Ne vous faites pas de souci pour demain : demain aura souci de lui-même ; à chaque jour suffit sa peine. » (Mt 6)

La Parole de Dieu nous rejoint souvent dans nos préoccupations du moment. J’ai senti que Dieu m’invitait à lui remettre ma vie dans la confiance.
Bien sûr, il y a toujours un discernement à faire. Mais je ne devais pas remettre en cause mon engagement pour une difficulté hypothétique qui se présentait devant moi.
De fait, la difficulté que je pressentais s’est effectivement posée plus de 10 ans après. Mais le Seigneur m’a donné les grâces nécessaires non seulement pour la traverser mais aussi pour mûrir à travers elle.

Dieu s’émeut devant la confiance de ses enfants
« Dieu s’émeut devant l’espérance de ses créatures : « La foi que j’aime le mieux, dit Dieu, c’est l’espérance. La foi ça ne m’étonne pas. Mais l’espérance, dit Dieu, voilà qui m’étonne. Que ces pauvres enfants voient comme tout ça se passe et qu’ils croient que demain ça ira mieux. Ça c’est étonnant et c’est bien la plus grande merveille de notre grâce. Et j’en suis étonné moi-même. Et il faut que ma grâce soit en effet d’une force incroyable. » (C. Péguy, op. cit.)

Aucune tentative, même si elle n’aboutit à rien, n’est jamais vaine et inutile, si elle est sincère. Dieu tient compte de tout et sa grâce sera proportionnée, un jour, à toutes les fois que nous avons eu le courage de recommencer à nouveau, comme si cent démentis ne comptaient pour rien. « Ceux qui espèrent dans le Seigneur - est-il écrit - renouvellent leur force, ils déploient leurs ailes comme des aigles, ils courent sans s’épuiser, ils marchent sans se fatiguer. » (Is 40,31)

« Nous devons espérer qu’il n’y a pas de chaîne, aussi solide et ancienne qu’elle soit, qui ne puisse être brisée. Ce Jésus qui, en Esprit, alla visiter ceux qui gisaient dans les ténèbres des enfers, et qui « a brisé les portes de bronze et fracassé les barres de fer » (cf. Ps 106,16) peut délivrer de n’importe quelle situation d’emprisonnement spirituel et de mort. Il peut crier — et de fait il crie — pour moi, ici et maintenant, ce qu’il cria pour Lazare qui était dans le tombeau : « Viens dehors ! » Saisissons, donc, la main tendue du Sauveur, comme Adam et Eve, dans l’icône, et ressuscitons-nous aussi avec Jésus. Disons nous l’un à l’autre en nous rencontrant, surtout pendant le temps pascal, ces saintes paroles de Séraphin de Sarov : « Ma joie, Christ est ressuscité ! » » (Cantalamessa)
La confiance n’est pas un encouragement à la paresse

« Aide-toi et le Ciel t’aidera ! » : La formule du jésuite hongrois Gábor Hevenesi (XVIIe siècle) peut aussi être mal interprétée : « Fiez-vous à Dieu, en agissant comme si le succès de chaque chose dépendait entièrement de vous et nullement de Dieu, et cependant, en employant tous vos soins à la faire réussir, ne comptez pas plus sur eux que si Dieu seul devait tout faire en vous. »

La maxime « aide-toi et le Ciel t’aidera » n’appartient pas à la Parole de Dieu. Elle comporte une part de vérité mais elle peut être aussi une justification de notre manque de confiance en Dieu : comme je ne suis pas sûr que Dieu va m’aider, je fais tout comme s’il n’allait pas intervenir. Et de fait, comme je veux me débrouiller tout seul, Dieu se garde d’intervenir.
Cette formule peut cacher une forme d’athéisme pratique. Si je veux tout maîtriser, je ne laisse pas la possibilité à Dieu d’intervenir.

****La confiance en Dieu n’exclut pas la confiance en l’homme mais la relativise

On se souvent des mots de Jérémie : "Maudit soit l’homme qui se confie dans l’homme", que l’on peut commenter ainsi : L’espérance regarde la béatitude comme sa fin ultime, et le secours divin comme la cause première qui conduit à la béatitude.
Dès lors, de même qu’il n’est pas licite d’espérer un bien quelconque, hors la béatitude, comme la fin ultime, mais seulement comme un moyen ordonné à la fin qu’est la béatitude, de même il n’est pas permis de mettre son espérance dans un homme ou une autre créature, comme en une cause première qui mène à la béatitude ; mais il est permis de placer son espérance en un homme ou une créature, comme en un agent secondaire et instrumental qui aide dans la recherche des biens, quels qu’ils soient, qui sont ordonnés à la béatitude.

Le dynamisme de l’espérance

Il y a tout un dynamisme dans l’espérance. C’est la vertu du désir.
À la différence de la foi (qui concerne plus la connaissance), l’espérance est étroitement liée à notre agir. L’espérance est la vertu de la croissance surnaturelle. Il y a tout un dynamisme dans l’espérance. C’est la vertu du désir. En un sens, l’espérance - à la différence de la charité - n’est pas désintéressée. Dans l’espérance, on attend vraiment quelque chose de Dieu ; pour Saint Thomas, c’est un amour de concupiscence, imparfait. Dans la charité, on aime Dieu pour lui-même, de façon désintéressée ; c’est un amour d’amitié. Il y a un certain repos dans la charité.

L’espérance qui nous remet debout

« Nous pouvons ouvrir notre cœur à la vivante espérance qui vient de la résurrection du Christ, et nous laisser investir par elle comme par un souffle rénovateur. Saint Pierre parle à ce propos d’une régénération (anagennesis), d’un sentiment de « renaissance ». C’est ce qui se passa, en fait, pour les apôtres. Ils expérimentèrent la force et la douceur de l’espérance. Ce fut l’espérance à l’état naissant qui les rassembla à nouveau, les faisant s’écrier de joie l’un à l’autre : « Il est ressuscité, il est vivant, il est apparu, nous l’avons reconnu ! » Ce fut l’espérance qui fit revenir sur leurs pas les disciples tout tristes d’Emmaüs et les ramena à Jérusalem.

L’Église naît d’un mouvement d’espérance et c’est ce mouvement qu’il est nécessaire de réveiller aujourd’hui si nous voulons imprimer à la foi un nouvel élan et la rendre capable de conquérir à nouveau le monde.
Rien ne se fait sans l’espérance. Un poète qui nous est désormais connu, celui du « coup d’audace », a écrit un poème sur l’espérance théologale. Il dit que les trois vertus théologales sont comme trois sœurs : deux d’entre elles sont grandes tandis que la troisième est une petite fille.
Elles avancent ensemble en se tenant par la main, la petite fille espérance au centre. A les voir il semblerait que ce sont les grandes qui entraînent la petite, mais c’est tout le contraire : c’est la petite qui entraîne les deux grandes. C’est l’espérance qui entraîne la foi et la charité. Sans l’espérance tout s’arrêterait (cf. C. Péguy, Le Porche du mystère de la deuxième vertu).
Nous le voyons aussi dans la vie de chaque jour. Lorsque quelqu’un en arrive vraiment à ne plus rien espérer, à se lever le matin sans s’attendre absolument à rien, il est comme mort. Souvent il se donne effectivement la mort, ou se laisse mourir lentement. De même qu’à celui qui est sur le point de s’évanouir on donne vite à respirer quelque chose de fort pour qu’il se ranime, ainsi à celui qui est sur le point de se laisser aller et d’abandonner la lutte, il faut offrir un motif d’espérer, lui montrer qu’il y a pour lui une possibilité, alors il se ranime et reprend des forces.
Chaque fois qu’un germe d’espérance renaît dans le cœur d’un être humain, un miracle se produit : tout devient autre, même si rien n’est changé. Même une communauté, une paroisse, un ordre religieux se raniment et recommencent à attirer de nouvelles vocations par cela même qu’en leur cœur refleurit l’espérance. Il n’y a pas de propagande qui puisse faire ce que réussit à faire l’espérance. C’est l’espérance qui fait agir les jeunes.
Même au sein de la famille il en est ainsi : on y vit, on y revient volontiers, si on trouve en elle l’espérance. Donner l’espérance est la chose la plus belle que l’on puisse faire. De même que les fidèles, en sortant de l’Église, se donnaient autrefois de main en main l’eau bénite, ainsi les chrétiens doivent se passer de main en main, de père en fils, la divine espérance.
De même que, dans la nuit de Pâques, les fidèles allument l’un à l’autre leur cierge, à partir du prêtre qui l’allume lui-même au cierge pascal, ainsi devons-nous nous passer l’un à l’autre l’espérance théologale qui gît comme ensevelie dans le cœur du peuple chrétien. » (Cantalamessa) )]

L’espérance nous ouvre un avenir
« Saint Paul dit « aux Thessaloniciens : vous ne devez pas être « abattus comme les autres, qui n’ont pas d’espérance » (1 Th 4, 13). Ici aussi, apparaît comme élément caractéristique des chrétiens le fait qu’ils ont un avenir : ce n’est pas qu’ils sachent dans les détails ce qui les attend, mais ils savent de manière générale que leur vie ne finit pas dans le néant. C’est seulement lorsque l’avenir est assuré en tant que réalité positive que le présent devient aussi vivable. » (Benoît XVI Spe Salvi n° 2)
« Ainsi, nous pouvons maintenant dire : le christianisme n’était pas seulement une « bonne nouvelle » – la communication d’un contenu jusqu’à présent ignoré. Dans notre langage, nous dirions : le message chrétien n’était pas seulement « informatif », mais « performatif ». Cela signifie que l’Évangile n’est pas uniquement une communication d’éléments que l’on peut connaître, mais une communication qui produit des faits et qui change la vie. La porte obscure du temps, de l’avenir, a été ouverte toute grande. Celui qui a l’espérance vit différemment ; une vie nouvelle lui a déjà été donnée. » (Benoît XVI Spe Salvi n° 2)
L’Évangile du grain de moutarde et du levain

« Il leur proposa une autre parabole :
« Le royaume des Cieux est comparable à une graine de moutarde qu’un homme a prise et qu’il a semée dans son champ. C’est la plus petite de toutes les semences, mais, quand elle a poussé, elle dépasse les autres plantes potagères et devient un arbre, si bien que les oiseaux du ciel viennent et font leurs nids dans ses branches. »
Il leur dit une autre parabole : « Le royaume des Cieux est comparable au levain qu’une femme a pris et qu’elle a enfoui dans trois mesures de farine, jusqu’à ce que toute la pâte ait levé. » » (Mt 13, 31-33)

Bien que petite (1,6 mm), la graine de moutarde possède une force vitale et un dynamisme inimaginables. Le Royaume de Dieu aussi : une réalité vraiment petite humainement parlant et formée de personnes généralement simples, pauvres, de gens sans importance au regard de la société monde. C’est pourtant à travers eux qu’agit la force du Christ qui transforme toute chose relativement mineure et apparemment insignifiante. Le petit grain de moutarde devient un grand et solide arbuste, capable d’accueillir les oiseaux sur ses branches. Le Royaume de Dieu, d’un point de vue humain, est comparable à un grain minuscule, méprisable dans son apparence, mais portant en lui le mystère d’une force divine prodigieuse qui est pour nous inimaginable.

« Voyons pourquoi le royaume très élevé des cieux est comparé au grain de sénevé ; car il me souvient d’avoir aussi rencontré le grain de sénevé dans un autre passage où il est comparé à la foi, quand le Seigneur dit : Si vous avez de la foi gros comme un grain de sénevé, vous direz à cette montagne : « Va te jeter dans la mer. » (Mt 17, 20). Ce n’est pas là une foi mesquine, mais grande, pour être capable de commander à une montagne de se déplacer ; et de fait ce n’est pas une foi médiocre que le Seigneur exige de ses apôtres, sachant qu’ils ont à combattre l’élévation et l’exaltation de l’esprit du mal. Si donc le royaume des cieux est comme le grain de sénevé, et la foi comme le grain de sénevé, la foi est assurément le royaume des cieux, et le royaume des cieux est la foi. » (Saint Ambroise, Exp. in Luc., 7, 176-180 ; 182-186).

Ceux qui ont tenu le coup dans les camps d’extermination et dans les goulags, ce ne sont pas les plus costauds, les plus forts physiquement, loin de là, ce sont ceux qui avaient une espérance en eux. Ils ont tenu bon, ils ont su faire tenir bon les autres aussi : exemple le Père Kolbe.

La patience

Depuis Jésus, une attente fondée sur une réalité déjà donnée

Pour comprendre plus en profondeur cette réflexion sur les deux espèces de substance – hypostasis et hyparchonta – et sur les deux modes de vie qu’elles expriment, nous devons réfléchir encore brièvement sur deux paroles concernant cet argument, qui se trouvent dans le dixième chapitre de la Lettre aux Hébreux. Il s’agit des paroles hypomone (10, 36) et hypostole (10, 39).

Hypomone se traduit normalement par « patience » – persévérance, constance. Savoir attendre en supportant patiemment les épreuves est nécessaire au croyant pour pouvoir « obtenir la réalisation de la promesse » (cf. 10, 36). Dans l’ambiance religieuse du judaïsme antique, cette parole était utilisée de manière expresse pour parler de l’attente de Dieu qui caractérise Israël : à savoir persévérer dans la fidélité à Dieu, en se fondant sur la certitude de l’Alliance, dans un monde qui est en opposition à Dieu.
Ainsi, la parole indique une espérance vécue, une vie fondée sur la certitude de l’espérance. Dans le Nouveau Testament, cette attente de Dieu, le fait d’être du côté de Dieu, prend une nouvelle signification : dans le Christ, Dieu s’est manifesté. Il nous a communiqué désormais la « substance » des biens à venir, et l’attente de Dieu obtient ainsi une nouvelle certitude. Elle est attente des biens à venir à partir d’un présent déjà donné. En présence du Christ, avec le Christ présent, elle est attente que se complète son Corps, dans la perspective de sa venue définitive. Au contraire, par hypostole est exprimé le fait de s’éloigner de celui qui n’ose pas dire ouvertement et avec franchise la vérité, qui est peut-être dangereuse. Se cacher devant les hommes par esprit de crainte par rapport à eux conduit à la « perdition » (He 10, 39).

« Ce n’est pas un esprit de peur que Dieu nous a donné, mais un esprit de force, d’amour et de sagesse » – c’est ainsi que, par une belle expression, la Seconde Lettre à Timothée (1, 7) caractérise l’attitude fondamentale du chrétien. » (Spe Salvi n° 9)

****L’espérance n’empêche pas la souffrance

« On pense parfois que contempler ensemble sur le Calvaire, comme le fait Jean, mort et résurrection peut émousser la dureté de la croix de Jésus, comme s’il était allé à la mort assuré de sa résurrection, tel celui qui sait détenir en réserve un atout qu’il pourra tirer au bon moment. C’est mal connaître les voies de Dieu, comme on peut le voir dans la vie des saints. » (Cantalamessa)

****La parabole de l’ivraie et du bon grain

« Il leur proposa une autre parabole :
« Le royaume des Cieux est comparable à un homme qui a semé du bon grain dans son champ. Or, pendant que les gens dormaient, son ennemi survint ; il sema de l’ivraie au milieu du blé et s’en alla. Quand la tige poussa et produisit l’épi, alors l’ivraie apparut aussi. Les serviteurs du maître vinrent lui dire : “Seigneur, n’est-ce pas du bon grain que tu as semé dans ton champ ? D’où vient donc qu’il y a de l’ivraie ?”
Il leur dit : “C’est un ennemi qui a fait cela.”
Les serviteurs lui disent : “Veux-tu donc que nous allions l’enlever ?” Il répond : “Non, en enlevant l’ivraie, vous risquez d’arracher le blé en même temps. Laissez-les pousser ensemble jusqu’à la moisson ; et, au temps de la moisson, je dirai aux moissonneurs : Enlevez d’abord l’ivraie, liez-la en bottes pour la brûler ; quant au blé, ramassez-le pour le rentrer dans mon grenier.” » » (Mt 13, 30)

****Ne jamais oublier la patience de Dieu

« Rappelons-nous Pierre : par trois fois il renie Jésus, juste au moment où il devait lui être plus proche ; et quand il touche le fond, il rencontre le regard de Jésus qui, avec patience, sans paroles, lui dit : « Pierre, n’aies pas peur de ta faiblesse, aies confiance en moi » ; et Pierre comprend, sent le regard d’amour de Jésus et pleure. Qu’il est beau, ce regard de Jésus – que de tendresse ! Frères et sœurs, ne perdons jamais confiance en la miséricorde patiente de Dieu !

Pensons aux deux disciples d’Emmaüs : le visage triste, une marche vaine, sans espérance. Mais Jésus ne les abandonne pas : il parcourt le chemin avec eux, et pas seulement ! Avec patience, il explique les Écritures qui le concernaient et il reste avec eux pour partager le repas.
C’est le style de Dieu : il n’est pas impatient comme nous, nous qui voulons souvent tout et tout de suite, même avec les personnes. Dieu est patient avec nous car il nous aime, et qui aime comprend, espère, fait confiance, n’abandonne pas, ne coupe pas les ponts, sait pardonner. Souvenons-nous de cela dans notre vie de chrétiens : Dieu nous attend toujours, même quand nous nous sommes éloignés ! Lui n’est jamais loin, et si nous revenons à lui, il est prêt à nous embrasser. (…) Dieu nous attend toujours, il ne se fatigue pas. Jésus nous manifeste cette patience miséricordieuse de Dieu pour que nous retrouvions confiance, espérance, toujours !

Un grand théologien allemand, Romano Guardini, disait que Dieu répond à notre faiblesse avec sa patience et c’est le motif de notre confiance, de notre espérance (cf. Glaubenserkenntnis, Würzburg 1949, p. 28). C’est comme un dialogue entre notre faiblesse et la patience de Dieu, c’est un dialogue qui nous donne espérance, si nous le faisons. » (Pape François, homélie du 7 avril 2013)

Dieu est patient parce que tout puissant

« Ta force est à l’origine de ta justice, et ta domination sur toute chose te rend patient envers toute chose. » (Sagesse 12, 16)

« Il n’y a pas de Dieu en dehors de toi, Seigneur, toi qui prends soin de toute chose, et montres ainsi que tes jugements ne sont pas injustes. Ta force est à l’origine de ta justice, et ta domination sur toute chose te rend patient envers toute chose. Il montre sa force, l’homme dont la puissance est discutée, et ceux qui la bravent sciemment, il les réprime. Tandis que toi, Seigneur, qui disposes de la force, tu juges avec indulgence, tu nous gouvernes avec beaucoup de ménagement, car tu n’as qu’à vouloir pour exercer ta puissance. Par ton exemple tu as enseigné à ton peuple que le juste doit être humain, et tu as pénétré tes fils d’une belle espérance : à ceux qui ont péché tu accordes la conversion. » (Sg 12, 13.16-19 ; cf. 16e dimanche ordinaire A)

Patience aussi à l’égard des autres :

« La charité, c’est l’espérance de ce que l’autre peut devenir avec mon aide » (Paul VI)

Un moyen pour savoir si vous avez l’espérance en vous : la patience à l’égard des autres. C’est la certitude que l’amour du Christ agit chez les autres, même s’ils le refusent encore et encore. Toute impatience traduit un manque d’espérance. Il faudrait nous confesser d’avoir désespérer de l’autre.

La patience est la dernière et la première qualité de l’amour selon Paul dans son hymne à l’amour dans 1 Corinthiens 13. « L’amour est PATIENT, l’amour est bon, il n’est pas envieux, il ne se vante pas, il n’est pas orgueilleux ; l’amour ne fait rien de honteux, il n’est pas égoïste, il ne s’irrite pas, il n’éprouve pas de rancune ; l’amour ne se réjouit pas du mal, mais il se réjouit de la vérité. L’amour permet de tout supporter, il nous faut garder en TOUTE CIRCONSTANCE la foi, l’espérance et la PATIENCE » (1 Corinthiens 13, 4-7). La patience est au début ainsi qu’à la fin.

Alors que nous avançons, au milieu des épreuves et difficultés personnelles et collectives, l’espérance, générée par la foi, génère la charité, entretient son mouvement .

La vertu

Espérer ne signifie pas rester les bras croisés

L’espérance est d’abord un don de Dieu. Elle nous est donnée au jour de notre baptême. Cependant elle attend notre coopération. Nous ne pouvons rien sans la grâce mais la grâce ne fera rien sans nous (image du vélo à assistance électrique).
L’espérance n’est pas un optimisme béat, une naïveté, un aveuglement face à l’avenir du monde. L’espérance est une vertu qui s’appuie sur la foi : "la foi est la substance de l’espérance" dit Benoît XVI.

Espérer, ce n’est pas fuir la souffrance

La souffrance découle de la finitude et du péché : Que nous le voulions ou non, la souffrance fera toujours partie de notre vie, et cela pour deux raisons : la souffrance « découle, d’une part, de notre finitude et, de l’autre, de la somme de fautes qui, au cours de l’histoire, s’est accumulée et qui encore aujourd’hui grandit sans cesse. » (n° 36) Ceci dit, certains sont beaucoup plus touchés par la souffrance que d’autres, et bien souvent sans aucune faute de leur part.
L’espérance, ce n’est pas une fuite dans l’imaginaire devant une réalité trop dure. Dans ce cas, l’espérance ne serait que l’opium du peuple. Elle implique d’accueillir la réalité dans laquelle on est, et que l’on a pas nécessairement choisie.

Nous avons à faire quelque chose
« L’espérance n’est pas simplement une belle et poétique disposition intérieure, difficile si l’on veut mais qui, en fait, laisse inactif, sans engagement concret et donc pour finir demeure stérile.
Au contraire, espérer signifie découvrir qu’il reste à faire quelque chose de plus, un devoir à accomplir et que l’on n’est donc pas abandonné en proie au vide ou à une inactivité paralysante. Espérer en Dieu dans les difficultés signifie reconnaître que, si l’épreuve demeure, la raison n’est pas à chercher en Dieu, qui est amour infini, toujours, mais en nous.
Et si la raison est en nous, cela nous invite à faire encore quelque chose pour changer, c’est un appel à accomplir encore un devoir… sinon, oui, il faudrait désespérer. « Puisque, écrit notre ami philosophe, l’homme face à Dieu souffre toujours en coupable, le motif de la joie est le suivant : qu’il ait toujours quelque chose à faire, toujours quelque tâche à accomplir et par là qu’il ait l’espérance que tout peut s’améliorer et s’améliorera quand lui-même s’améliorera, c’est-à-dire quand il travaillera davantage, priera davantage, sera plus obéissant, plus humble, plus abandonné à Dieu, plus profond en amour, plus fervent en esprit. Tout cela n’est-il pas motif de joie ?…

Lorsqu’il n’y a plus rien à faire, lorsque même la souffrance n’est plus un devoir, alors oui, vient la désespérance. Aussi longtemps que reste une tâche à accomplir, aussi longtemps que demeure quelque projet, l’homme n’est pas abandonné sans espérance…
Si bien que même si tombait sur moi le sort le plus dur qui soit jamais tombé sur un homme, et s’il ne restait absolument plus rien à faire, demeurerait cependant encore la joie d’un devoir à accomplir : le devoir de supporter avec patience.
Et s’il fallait une patience au-delà de toute limite comme jamais auparavant il n’a été demandé à aucun homme, il resterait encore cette joie qu’il existe un devoir, le devoir de ne pas perdre patience, pas même quand on est arrivé à l’extrême de la patience . » (Cantalamessa)

L’espérance est une vertu

Les vertus sont des dispositions habituelles à agir dans le sens du bien. Il y a des vertus dans divers domaines : l’art, la morale (vertus cardinales), la relation avec Dieu.
Un exemple dans l’art nous aide à percevoir ce qu’est la vertu : le sculpteur ne fait pas son œuvre d’art majeure la première fois qu’il sculpte. Au début, c’est un peu laborieux, difficile. Il met beaucoup de temps. Ce n’est pas forcément très réussi. Lorsqu’il a acquis son art, cela devient plus facile, plus rapide, plus beau. C’est la même chose pour apprendre une langue étrangère. Ce n’est pas la première fois que l’on réussit à bien parler une langue. Il faut s’exercer pendant un certain temps.
Pour les vertus morales, c’est la même chose. On ne devient pas tempérant du jour au lendemain. Cela suppose une acquisition par la répétition d’actes. L’inverse de la vertu, c’est le vice. Autant les vertus cardinales sont à la portée de tout homme, autant les vertus théologales sont hors de notre portée. Elles résultent d’un don de Dieu, même si nous sommes appelés à coopérer. « Les vertus sont en nous par nature à l’état d’aptitude et de commencement, mais non à l’état de perfection, sauf les vertus théologales qui nous viennent totalement du dehors. (Ia IIae q 63 a 1)

« Par elles, les hommes sont bien ordonnés à être "concitoyens des saints et membres de la famille de Dieu" (Ep 2, 9) ; par les autres vertus acquises, l’homme est bien ordonné aux affaires humaines. » (Ia IIae q 63 a 4)

Les vertus théologales sont un don. Cependant elles ne grandissent que dans la mesure où l’on pose des actes de foi, d’espérance, de charité. Dieu ne veut pas nous sauver sans nous. Il ne veut pas que le salut soit comme un manteau qu’il jette sur nous. Il veut que nous adoptions peu à peu les mœurs du Royaume.

Conclusion

« Montrer l’espérance est une tâche fondamentale de l’Église. Le Concile Vatican II nous a laissé à ce propos une note lumineuse : "On peut légitimement penser que l’avenir est entre les mains de ceux qui auront su donner aux générations de demain des raisons de vivre et d’espérer" (Gaudium et spes, n. 31).
Dans cette perspective, j’ai plaisir à reproposer l’appel à la confiance que j’ai lancé dans mon discours aux Nations unies, en 1995 : "Nous ne devons pas avoir peur de l’avenir […] Nous sommes capables de sagesse et de vertu. Avec ces dons et avec l’aide de la grâce de Dieu, nous pouvons construire dans le siècle qui est sur le point d’arriver et pour le prochain millénaire, une civilisation digne de la personne humaine, une vraie culture de la liberté. Nous pouvons et nous devons le faire !
Et, en le faisant, nous pourrons nous rendre compte que les larmes de ce siècle ont préparé la voie d’un nouveau printemps de l’esprit humain" (cf. Insegnamenti XVIII/2 [1995], p. 744, cf. ORLF n. 41, du 10 octobre 1995). » (Jean-Paul II, 24 janvier 2001)

« Quelle grâce quand un chrétien devient vraiment un « christo-phore », c’est-à-dire un « porteur de Jésus » dans le monde ! En particulier pour ceux qui traversent des situations de deuil, de désespoir, de ténèbres et de haine. Et on comprend cela à tant de petits détails : à la lumière qu’un chrétien conserve dans le regard, à l’air de sérénité qui n’est pas même entamé dans les moments les plus compliqués, à l’envie de recommencer à aimer même quand on a fait l’expérience de nombreuses déceptions.
A l’avenir, quand on écrira l’histoire de notre époque, que dira-t-on de nous ? Que nous avons été capables d’espérance, ou bien que nous avons mis notre lumière sous le boisseau ? Si nous sommes fidèles à notre baptême, nous diffuserons la lumière de l’espérance, le baptême est le début de l’espérance, cette espérance de Dieu, et nous pourrons transmettre des raisons de vie aux générations futures. » (PF, catéchèse du 2 août 2017)
« L’espérance ne déçoit pas. L’optimisme déçoit, l’espérance non ! Nous en avons tant besoin, en ces temps qui paraissent obscurs, dans lesquels nous sommes parfois égarés devant le mal et la violence qui nous entourent, devant la douleur de tant de nos frères. Il faut de l’espérance ! (…) Mais il ne faut pas laisser l’espérance nous abandonner, parce que Dieu, avec son amour, marche avec nous. » (PF 7 décembre 2016)

« L’espérance, c’est elle qui fait tout le bonheur de l’homme. » (Curé d’Ars, Monnin I 352 — Esprit 183)
« Le mauvais chrétien ne peut pas comprendre cette belle espérance du ciel qui console et anime un bon chrétien. » (Curé d’Ars, Esprit 24)