(6) Jubilé - Comment pardonner ? (première partie)

Enseignement de la halte spirituelle pour femmes (Mars 2025 - Ourscamp)

C’est facile de dire « il faut pardonner » mais comment fait-on ? On peut sincèrement souhaiter pardonner sans forcément y parvenir. On ne pardonne pas d’un coup, comme on appuierait sur un interrupteur pour balayer les ténèbres. Cela s’opère en plusieurs étapes dont certaines à notre insu…

« Soyez entre vous pleins de générosité et de tendresse. Pardonnez-vous les uns aux autres, comme Dieu vous a pardonné dans le Christ. » (Ep 4, 32)

Père Éric

Si le pardon est caractéristique des chrétiens, il reste un sujet universel et il joue un peu le rôle des éboueurs, car là où il y a de la vie, là il y a des déchets !
Accordés sans douleur pour un mot ou un geste de trop, il y a les pardons ordinaires. Et puis il y a les pardons extraordinaires, ceux que nous avons tant de mal à concéder, après avoir été blessés au plus profond de nous-mêmes. Pardonner à un parent bourreau, à un agresseur ou au chauffard qui a renversé l’un de nos proches implique un cheminement intérieur long et exigeant, difficile à vouloir, dur à parcourir.

« Ne jugez pas, afin de ne pas être jugés ; car du jugement dont vous jugez on vous jugera […]. Qu’as-tu à regarder la paille qui est dans l’œil de ton frère ? Et la poutre qui est dans ton œil à toi, tu ne la remarques pas ? » (Mt 7, 1-3 ; 1 Co 4, 5)

On ne peut jamais mesurer la profondeur de la souffrance de celui qui a été blessé. De plus, certains traits de caractère rendent le pardon plus difficile et favorisent la rancune : le secondaire est une personne chez qui les événements retentissent longtemps. Nous ne sommes pas tous égaux devant le pardon. Enfin, le processus opère en partie à notre insu et il se fait en plusieurs étapes :

  • Le pardon prend du temps : il faut de la patience pour laisser mûrir le pardon. C’est tout un chemin qui passe par bien des étapes. Pardonner est un acte mais aussi un processus long et complexe qui comporte bien des étapes.
  • Le pardon rencontre des résistances. Quelquefois nous pouvons avoir l’impression que nous appuyons à la fois sur l’accélérateur et le frein : nous voulons pardonner mais nous n’y arrivons pas. C’est pourquoi il est intéressant de mieux identifier nos résistances à pardonner. Il peut y avoir une réaction quasi compulsive qui fait que le pardon n’est pas concevable.
  • Le pardon est à la charnière de l’humain et du surnaturel. C’est comme dans la vie spirituelle en général : il y a des passages qu’il nous est donné de faire. A ce moment-là, il faut se laisser faire (on passe de la rame aux voiles). Le pardon n’a rien de triomphaliste. On ne pardonne pas sans le vouloir. Mais à un certain moment, le pardon est une grâce à recevoir.
  • Pour nous croyants, le chemin du pardon est balisé par la prière. C’est une vraie aventure spirituelle que nous vivons avec Dieu.
« Je suis prêtre, psychologue et j’avais à pardonner à une personne. Je me suis dit tout simplement "je vais lui pardonner et ça va passer !" Mais voici que je lui pardonnais le soir et le lendemain matin j’étais plein de ressentiment, d’amertume, même d’agressivité contre cette personne-là et cela a duré plus de trois ans. Alors je me suis posé la question "est-ce qu’il y aurait moyen de pardonner d’une manière systématique ? Est-ce qu’il y aurait moyen d’en arriver à donner le pardon aux personnes ?" Pour un chrétien c’est la marque d’identification : être capable de pardonner. C’est quelque chose d’extrêmement important dans la vie chrétienne. C’est là que je me suis mis à lire sur le pardon, je me suis mis à me poser des questions. Je suis aussi psychothérapeute et lorsque j’avais des clients qui avaient de la difficulté avec cette question du pardon, j’essayais de voir comment je pourrais les débloquer.
C’est comme cela que j’ai bâti mon livre en douze étapes pour être capable de pardonner. » (Père Jean Montbourquette)