Seul ce qui est bon est objet de discernement !
On ne discerne pas sur une possible attaque de la banque de France ou un homicide. Seuls les actes bons, c’est-à-dire ceux qui correspondent à la finalité de notre nature, font l’objet du discernement.
Cependant, nous avons souvent à choisir entre deux actes bons : se marier ou se consacrer dans le célibat, commencer à travailler ou poursuivre ses études, être mère au foyer ou commencer un travail rémunéré…
Bref, les situations de discernement sont multiples et nous n’avons pas toujours recours à l’Esprit Saint et à ses dons pour nous aider dans la prise de décision.
Il y a toujours deux aspects dans un discernement : subjectif et objectif. Aucun de ces critères ne se suffit à lui-même. Il s’agit d’un faisceau de critères qui nous aidera à découvrir la volonté de Dieu.
Critères subjectifs
Ce sont les critères internes au sujet qui discerne.
- Le désir.
Dieu appelle en faisant naître de bons désirs en nous, pour nous engager dans telle ou telle voie. Sachons écouter notre cœur, ce qui est source de bonheur, ce qui nous rend profondément heureux. Laissons nous enthousiasmer par le beau, le vrai, le bien. N’éteignons pas l’Esprit. - Arriver à une certitude intérieure.
On ne prend pas des décisions dans le brouillard absolu. Il est vrai que faire le pas peu donner la lumière, mais il faut avoir, au préalable, dans notre intelligence, une lumière suffisante pour agir. Cette certitude intérieure va permettre de traverser les crises en faisant mémoire (je me souviens du pourquoi). - St Ignace de Loyola nous donne un bon critère : si on n’a pas de lumière pour aller à droite ou à gauche, on reste là où on est en attendant que Dieu veuille bien manifester sa Volonté.
Pas de changements à tout prix ! Ne croyons pas que le bonheur est toujours ailleurs. Apprenons à fleurir là où nous avons été plantés. - Rectitude d’intention.
Pas d’engagement à l’essai et pas question non plus d’essayer le contraire pour vérifier son appel. - La confiance et l’abandon comme attitude de disponibilité intérieure.
Pas de discernement sans une humilité de fond. L’orgueil nous aveugle et nous fait prendre de mauvaises décisions. - La paix et la joie intérieure sont souvent des signes de l’appel de Dieu.
Mais ce n’est pas parce qu’on a des tempêtes que ce n’est pas de Dieu. Bien souvent cette paix et cette joie arrivent après un certain combat spirituel. - St Ignace nous donne un autre conseil précieux lorsqu’on est dans la nuit : ne pas remettre en cause, dans un moment de tempête, ce qu’on a discerné en pleine lumière.
Prendre une certaine distance avec les émotions qui nous jouent des tours. Se connaître soi-même.
- Une certaine facilité à pratiquer ce à quoi Dieu nous appelle.
Si dans une relation affective ou professionnelle, il faut s’arracher chaque geste, prendre des gants à tout moment, marcher sur des œufs ou nier une partie de sa personnalité alors, sur la durée, cela ne risque pas de tenir. - L’expérience d’une certaine disproportion.
Cela nous dépasse mais on est appelé. On le voit dans l’exemple de la Vierge Marie (comment cela se fera-t-il ?) ou des prophètes (Isaïe prétend n’être qu’un enfant pour ne pas répondre à l’appel de Dieu). Bien souvent le choix nous met dans une attitude de fragilité, nous ne pouvons pas tout prévoir ou contrôler. Nous nous sentons appelés et à la fois incapable de répondre à l’appel tellement la distance nous paraît infranchissable. Une trop grande confiance en soi peu parasiter le discernement. Les saints conseillent au contraire de nous méfier de nous-mêmes, d’être humble et à la fois courageux. - Les signes. Il y a des signes de l’appel du Seigneur. Nous savons que Dieu intervient dans l’histoire. Pour être de vrais signes il faut qu’ils soient confirmés, objectivés. Attention aux faux signes fruits de notre imagination.
Critères objectifs
Il s’agit des critères qui sont extérieurs au sujet et peuvent être constatés par d’autres.
- La durée d’un bon désir.
Si un désir revient dans le temps et persiste, il peut venir de Dieu. - La présence de l’Eglise.
L’Eglise est là pour vous soutenir. Elle aime votre humanité. Je suis ce que je suis grâce à l’Eglise.
L’accompagnement spirituel sur la durée va permettre d’objectiver ce que je ressens, mettre un sceau sur mon désir et me donner une certaine paix. Le père spirituel ne prend pas la décision à la place de. Il aide tout juste à pointer telle ou telle chose. Il peut encourager dans un sens et mettre en garde. Il dit surtout là où il ne faut pas aller. Un choix qui irait contre ce que dit l’Eglise ne peut être de Dieu. L’intervention de l’Eglise dans l’ordination, le mariage, l’engagement par les vœux est un encouragement et un soutien. - Les circonstances et les nécessités montrent un chemin.
Selon Pascal elles sont des maîtres spirituels. Si je ne peux faire autrement que changer de travail, continuer mes études, déménager c’est qu’il y a un désir du Seigneur que je découvrirai souvent après coup. Choisir ce qu’on a pas choisi c’est aimer. - Le conseil de personnes qui nous aiment.
C’est une des étapes de la prudence. Demander aux autres (proches et de bon conseil) ce qu’ils en pensent. Consulter. Si nous ne demandons pas, notre intelligence et notre cœur n’auront pas la lumière nécessaire pour discerner. - La formation spirituelle et humaine donne des principes universels qui éclairent notre agir.
Discerner est une activité de l’intelligence pratique qui doit être formée. Dans une société où le choix est trop émotionnel, c’est l’invitation à mettre de la raison dans nos choix. - Une vie chrétienne sérieuse (prière, sacrements, parole de Dieu…) est le terreau dans lequel nous allons pourvoir découvrir la volonté de Dieu.
- « A-t-il les aptitudes requises ? »
C’est ce que demande l’évêque lorsqu’il ordonne un candidat au sacerdoce. A la fois l’appel me dépasse et à la fois il faut avoir certaines aptitudes pour accomplir ce que le Seigneur me demande.
Choisir c’est renoncer
Il s’agit là de quelques clés de discernement. Mais nous nous y trompons pas, il en est une qui donne accès à toute les autres :
discerner et choisir c’est aussi renoncer.
Renoncer aux autres possibilités qui paraissent attrayantes. Se consacrer dans le célibat c’est renoncer au mariage, choisir un métier c’est renoncer temporairement à d’autres qui semblent aussi intéressants, se marier c’est choisir cette femme-là, cet homme-là et renoncer aux autres qui, après des années de vie commune, semblent avoir plus de qualités.
A l’heure du zapping et des choix Kleenex, le message de l’Evangile semble bien exigeant. La force de ton oui se mesure à la force de ton non.
Que ton oui soit oui, que ton non soit non. Le reste vient du Mauvais"
nous dit Jésus.
Plus le choix a une finalité élevée, plus le renoncement est grand, mais plus la joie de se donner devient béatitude.
Au fond choisir n’est-ce pas l’autre mot pour dire aimer ?