Texte de l’homélie :
Mes bien chers frères,
Voici donc que nous entamons avec ce cinquième dimanche de Carême le temps de la passion.
Désormais la liturgie nous invite à fixer notre regard sur le Christ qui monte à Jérusalem pour vivre sa passion.
Avec toute l’Église nous voulons l’accompagner spirituellement, revivre les grandes étapes de notre salut, participer à son sacrifice pour le pardon de tous nos péchés, être renouvelé, enfin, par sa résurrection qui est en nous promesse de vie éternelle.
Si nous participons au saint sacrifice de la messe, c’est justement parce que l’eucharistie est tout à la fois notre trésor, le signe efficace de l’amour infini de Dieu pour chacun d’entre nous et la source de notre engagement baptismal à suivre le Christ dans son offrande, dans sa Pâque, dans son passage victorieux de la mort à la vie.
Nous lui sommes unis depuis le jour de notre baptême, nous avons reçu en plénitude son saint Esprit au jour de notre confirmation et Il vient en nous réellement et substantiellement chaque fois que nous recevons son Corps et son Sang dans la sainte communion.
Peut-être avons-nous conscience de ne pas lui avoir été fidèles.
Peut-être sommes-nous tentés de nous décourager face aux exigences de l’Évangile.
Peut-être même avons-nous gravement péché, par notre indifférence, notre manque de foi, notre peu d’enthousiasme, notre lâcheté à mener enfin une vie conforme à la grâce qui nous a été faite.
Au lieu de nous décourager ou de sombrer dans le désespoir et la honte, entendons la voix de celui qui s’est fait notre berger et notre sauveur.
A chacun d’entre nous, il dit :
« Moi non plus je te condamne pas. Va, et ne pêche plus. »
Dieu aime l’homme à en mourir
Tous, nous sommes appelés à devenir les missionnaires de la miséricorde divine, les témoins de l’amour de Dieu, les grands bénéficiaires de son pardon. Le temps du Carême nous est donné pour mieux découvrir quel prix Dieu a accepté de payer pour nous racheter de l’esclavage.
Le Père livre son Fils qui assume dans sa chair les conséquences de tous les péchés. La croix nous révèle l’amour de Dieu qui aime l’homme à en mourir. Le grand obstacle n’est pas notre péché, mais bien le refus de nous laisser toucher par la croix du Christ, de contempler sa passion, de nous unir à son sacrifice.
Et pourtant n’est-ce pas là le grand moyen de notre salut, le chemin assuré de notre sanctification, l’espérance de la vie éternelle ? Dès lors combien nous faisons nôtre les sentiments mêmes de saint Paul qui résume ainsi, au soir de sa vie, toute son existence, le but de toute son action apostolique, la signification de sa vocation : connaître le Christ, éprouver la puissance de sa résurrection, communier aux souffrances de sa passion.
C’est là le programme de vie du chrétien, son identité face au monde. Il est celui qui connaît le Christ, qui communie à tous les mystères de sa vie, qui offre la moindre souffrance, la plus petite contrariété, et qui fait déjà l’expérience de la victoire de la résurrection.
Voilà ce que le sacrement de l’eucharistie produit en nos cœurs, en nos vies, en nos intelligences lorsque nous ne mettons pas d’obstacle à sa lumineuse présence et à la bienfaisante influence.
L’exhortation apostolique Sacramentum Caritatis
Nous mettre à l’école de l’eucharistie, tel devrait être l’orientation fondamentale de notre vie comme le saint-père vient tout juste de nous le rappeler dans son exhortation apostolique Sacramentum caritatis.
En effet, participer à la messe, c’est entrer dans le drame de la rédemption, c’est faire nôtre la prière de toute l’Église, c’est accueillir dans un cœur silencieux et contemplatif l’œuvre du salut qui est aujourd’hui manifesté pour chacun d’entre nous.
Tout dans la liturgie doit être au service de cette merveilleuse et bouleversante rencontre de Dieu avec sa créature, du pécheur avec son sauveur, du malade avec son médecin, du mortel avec celui qui est la vie éternelle, de la misère avec la miséricorde infinie, de la détresse avec le sauveur.
Dès lors comment nos vies ne seraient-elles pas transformées, nous qui bénéficions d’un don si grand.
Le pape rappelle expressément la nécessaire conversion de toute notre vie appelée à se mettre à l’école de l’eucharistie : Il s’agit avant tout, écrit-il, de la découverte joyeuse du dynamisme de l’amour dans un cœur qui accueille le don du Seigneur, qui s’abandonne à lui et qui trouve la vraie liberté.
La transformation morale, impliquée dans le nouveau culte institué par le Christ, est une tension et un désir profond de vouloir correspondre à l’amour du Seigneur de tout son être, tout en étant conscient de sa fragilité.
Notre faiblesse, notre fragilité, bien chers frères, ne sont pas des obstacles au rayonnement de l’eucharistie à travers nos propres vies. Il suffit simplement de s’offrir pleinement, complètement, totalement à son action, de s’ouvrir à sa présence vivante et vivifiante. C’est là le culte en esprit et en vérité que le Seigneur attend de nous ou plutôt qu’il suscite en nous si nus sommes un tant soit peu attentif à sa présence et à son action.
Invités à découvrir ou à redécouvrir les trésors de la prière liturgique de l’Église, fidèles à la tradition apostolique qui nous a été transmise et que nous voulons transmettre à notre tour sans altérations ni déviations aux générations montantes, nous supplions la miséricorde divine de nous pardonner tous nos péchés, de nous renouveler dans la vie théologale, de nous rendre audacieux dans le témoignage et persévérants dans la contradiction.
Demandons à la Vierge Marie de nous accorder la grâce d’un cœur docile et disponible. Alors, à l’instar du grand saint Paul, nous éprouverons dans notre vie les effets de la résurrection du Christ puisque nous aurons accepté avec générosité de participer à sa passion pour la vie du monde, le salut des âmes et la gloire de Dieu,
Amen !
Références des lectures du jour :
- Livre d’Isaïe 43,16-21.
- Psaume 126(125),1-2ab.2cd-3.4-5.6.
- Lettre de saint Paul Apôtre aux Philippiens 3,8-14.
- Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 8,1-11 :
En ce temps-là, Jésus s’en alla au mont des Oliviers.
Dès l’aurore, il retourna au Temple. Comme tout le peuple venait à lui, il s’assit et se mit à enseigner.
Les scribes et les pharisiens lui amènent une femme qu’on avait surprise en situation d’adultère. Ils la mettent au milieu, et disent à Jésus :
— « Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère.
Or, dans la Loi, Moïse nous a ordonné de lapider ces femmes-là.
Et toi, que dis-tu ? »
Ils parlaient ainsi pour le mettre à l’épreuve, afin de pouvoir l’accuser. Mais Jésus s’était baissé et, du doigt, il écrivait sur la terre.
Comme on persistait à l’interroger, il se redressa et leur dit :
— « Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre. »
Il se baissa de nouveau et il écrivait sur la terre.
Eux, après avoir entendu cela, s’en allaient un par un, en commençant par les plus âgés. Jésus resta seul avec la femme toujours là au milieu.
Il se redressa et lui demanda :
— « Femme, où sont-ils donc ? Personne ne t’a condamnée ? »
Elle répondit :
— « Personne, Seigneur. »
Et Jésus lui dit :
— « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus. »