Texte de l’homélie
Chers frères et sœurs, ce n’est pas toujours facile d’entre ces paroles… Quelle image avons-nous de Dieu ? c’est une question que nous devons nous poser pendant ce temps de Carême. Vous êtes ici, dans cette assemblée dominicale, et vous croyez en Dieu, peut-être plus ou moins, mais cela se voit et Il s’en réjouit ! Mais chacun, et moi le premier, nous avons des images, des représentations de Dieu qui nous collent à la peau, et en fonction de cela, nous réagissons plus ou moins à la Parole.
Un dieu vengeur et punisseur ?
Autrefois, les croyants avaient une image d’un dieu juge - certains entendent encore leurs grand-mère faire mention de ce dieu punisseur et vengeur – et en avaient très peur.
C’est une image que Saint Paul évoque également dans cette deuxième lecture :
« Au désert, la plupart des Hébreux n’ont fait que déplaire à Dieu, et ils sont tous tombés… »
Et l’Evangile Jésus semble reprendre un peu cette image pour nous inviter à la réflexion. Il évoque deux sortes de victimes : les victimes massacrées par Pilate et les victimes tuées par la chute de la tour de Siloé.
Et Il reprend ceci comme un refrain :
« Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez comme eux. »
Cette parole est choquante, et elle est dans notre tête à tous : dès qu’il y a un problème – que ce soit dans notre vie ou dans la société - nous sommes tentés de nous demander ce que nous avons fait au Bon Dieu pour qu’il nous arrive de telles choses… C’est une réaction naturelle, avouons-le.
Quand l’épreuve frappe à la porte, que ce soit un accident, une maladie, un échec, une guerre ou une trahison, notre première réaction est de nous tourner vers Dieu et de lui demander pourquoi Il nous punit… Et il s’en suit la terrible tentation de fuir par peur ce Dieu qui se venge. Cela ne nous colle-t-il pas à la peau ?
A l’opposé de cette image de Dieu, on en voit une autre assez répandue dans notre société moderne qui naît d’un amour mal compris.
Un Dieu tellement gentil…
La jeunesse de notre temps est plutôt imprégnée par cette idée d’un dieu tellement doux et tolérant, qui excuse tout, qui permet tout et laisse tout faire. Que je fasse bien, que je fasse mal, que je dénonce l’injustice ou pas, cela ne fait pas de différence. Il me laisse faire selon mes envies et devient finalement une figure lointaine et indifférente…
C’est l’image d’un dieu permissif et « trop cool » qui entache aussi un peu notre vie. Et on finit par l’oublier à un moment donné, par négligence.
Mais, entre cette vision d’un dieu vengeur, punisseur et d’un dieu permissif, comment faire pour avoir un regard un peu plus juste ?
La réponse est dans la Parole de Dieu qui nous propose un regard et une approche saine sur la notion de pardon de Dieu.
Les textes de ce troisième dimanche de Carême et ceux du dimanche suivant nous proposent de parler du pardon avec l’histoire du fils prodigue. Ces pages de l’Évangile nous montrent qu’il Il n’est ni un dieu punisseur, ni un dieu laxiste, ni un dieu magicien, mais Il est un dieu Amour.
Il est bon d’accueillir avec la Parole de Dieu l’image d’un dieu qui pardonne toujours car c’est vrai, il n’y a aucun limite à Son amour, mais, il y a des conditions.
C’est le fils cadet de la parabole qui nous donne au moins deux conditions. Et l’on entend résonner les paroles de Stromae : "Papaoutai"
C’est comme si, au milieu de sa détresse, il avait entendu cet appel dans son cœur : "Père, où es-tu ? ». Et, au milieu des cochons et de sa pauvreté, il a eu le courage de revenir vers son père avec un sincère repentir.
Et nous, dans ce temps de Carême, savons-nous assez interpeller Dieu ?
Il nous faut interpeller Dieu et entrer dans une démarche de repentir
Savons-nous assez interpeller notre Père, en particulier dans les situations où nous sommes perdus, où nous ne comprenons pas ce qu’il se passe et ce qu’Il fait.
En ce temps de Carême, c’est le moment privilégier du repentir. Nous avons une vision faussée de Dieu car nous sommes tous pécheurs.
Et il est bon de rappeler que le sincère repentir se vit selon trois attitudes :
- Regretter
- Réparer
- Repartir.
Ainsi, si on ne regrette jamais rien dans sa vie ou si on est pas peiné par le mal que nous commettons ou que les autres commettent, restant indifférents, le pardon de Dieu tombera à côté.
Si on a aucun souci sincère de réparer au mieux et soigner les blessures de nos frères – je pense ici aux victimes qui ont été abusées – de prier eux et de restaurer les relations cassées, le pardon de Dieu tombera à côté.
Enfin, si je n’ai une volonté ferme de repartir – on n’est pas fait pour rester enfermé dans ce qui ne va pas – de re-choisir le bien, comme un nouveau départ, le pardon tombera à côté et l’image de Dieu sera faussée.
C’est bien pour cela que ce temps de Carême nous est proposé pour revenir vers le Seigneur dans un sincère repentir. Comme Moïse devant le buisson ardent : quel long chemin il a du faire pour rencontrer le Seigneur dans ce buisson en feu.
Le fils prodigue expérimente lui aussi ce retour vers un dieu père : il a accepté de choisir, même imparfaitement, un chemin de repentir : il revient à la maison, il regrette le mal, il est prêt à réparer la faute qu’il a commise en travaillant comme un simple ouvrir, et il décide de vivre avec son père.
Ces deux hommes ont fait une même expérience, c’est bien plus qu’une image paternelle : ils ont rencontré un père miséricordieux. Et ils ont compris que ce père a besoin qu’on lui réponde, que l’on opère au minimum un retour vers lui. Et c’est tout le travail que nous avons à faire pendant le Carême : revenir vraiment et sincèrement auprès du Père, car souvent nous nous en éloignons plus ou moins.
Dieu nous avertit sur les dangers comme un père le fait avec son enfant
Il est aussi important de rappeler en ce dimanche que ce même Dieu Père miséricordieux Se révèle aussi comme un dieu avertisseur. Il est dit : « Si tu bâtis une tour n’importe comment, tu risques tôt ou tard qu’elle te tombe dessus, comme pour la tour de Siloé. »
En d’autres termes : si tu agis déconnecté du Père, tôt ou tard, ta vie deviendra une impasse. Cela ne nous est pas dit pour nous faire peur, mais c’est pour nous avertir. Nous le savons, Dieu n’a rien d’un juge qui détruirait ses adversaires, mais Il Se révèle comme un dieu juste.
L’amour et justice vont de pair et s’embrassent, et Jésus nous alerte avec force des dangers de mort. La Parole de Dieu agit comme une alerte, comme un père qui avertir son enfant de ne pas mettre sa main dans le feu sous peine de se brûler. Et pourtant nous le faisons quand même…
En même temps, Il éduque à la vraie liberté responsable avec cette invitation :
« Prends conscience du poids de nos actes. C’est toi qui agis, agis avec moi et je te rendrai libre. »
Sans Lui, ce n’est pas possible.
Pour terminer, je vous propose de revenir sur cette très belle image donnée par l’évangile de ce jour : Dieu dans le rôle du vigneron.
Dieu dans le rôle d’un vigneron
Quel beau métier nous est donné comme exemple, c’est fantastique ! La bienveillance, l’exigence, la patience tout au long du travail qui aboutit au bon fruit, puis du bon vin…
La série The Chosen met en scène un Jésus assez étonnant qui invite à la relation entre nous, entre les apôtres et le Père, en toute simplicité.
Frères et sœurs, profitons de ce temps de Carême pour oser davantage nous jeter dans les bras du Père et de façon concrète, en renouvelant notre manière de nous confesser – comme vous l’avez fait hier soir, chers jeunes.
Osons nous entraîner à devenir des icônes de ce Dieu là parce qu’Il ne peut Se révéler qu’à travers nous. Devenons des « clins Dieu », comme des clins d’œil de Dieu, comme me le disait l’un d’entre vous, des signes de Dieu autour de nous en devenant patients, compatissants, respectueux et responsables les uns des autres.
Que Marie nous y aide. Reprenons cette magnifique parole du livre de Joël pour éclairer notre semaine :
« Revenez à moi de tout votre cœur, car je suis un Dieu de tendresse, plein d’amour et de vérité. »
Amen !
Références des lectures du jour :
- Livre de l’Exode 3,1-8a.10.13-15.
- Psaume 103(102),1-2.3-4.6-7.8.11.
- Première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens 10,1-6.10-12.
- Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 13,1-9 :
Un jour, des gens rapportèrent à Jésus l’affaire des Galiléens que Pilate avait fait massacrer, mêlant leur sang à celui des sacrifices qu’ils offraient.
Jésus leur répondit : « Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, pour avoir subi un tel sort ? Eh bien, je vous dis : pas du tout ! Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même.
Et ces dix-huit personnes tuées par la chute de la tour de Siloé, pensez-vous qu’elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem ? Eh bien, je vous dis : pas du tout ! Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. »Jésus disait encore cette parabole : « Quelqu’un avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint chercher du fruit sur ce figuier, et n’en trouva pas.
Il dit alors à son vigneron :
— “Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et je n’en trouve pas. Coupe-le. À quoi bon le laisser épuiser le sol ?”
Mais le vigneron lui répondit :
— “Maître, laisse-le encore cette année, le temps que je bêche autour pour y mettre du fumier. Peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir. Sinon, tu le couperas.” »