Homélie du 7e dimanche de Pâques

22 mai 2015

« Père saint, garde mes disciples unis dans ton nom, le nom que tu m’as donné, pour qu’ils soient un, comme nous-mêmes. »

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Texte de l’homélie :

Frères et Sœurs bien-aimés,

Nous sommes dans ce temps entre l’Ascension et la Pentecôte.
Pour les Apôtres, pour les proches de Jésus, c’est un temps particulier. On nous dit qu’ils sont retournés dans le Cénacle, ce lieu de réunion, ce lieu de la dernière Cène, et donc lieu important pour eux, qu’ils s’y sont enfermés avec Marie. On note tout spécialement la présence de Marie.
Et que font-ils ? Durant tout le temps pascal, ils ont parcouru la Galilée en se remémorant, en ruminant sur les lieux les paroles que Jésus leur a dites. Ici, dans le Cénacle, ils vont reprendre d’une manière toute spéciale ces paroles précieuses de Jésus, les paroles de la prière de Jésus.
Car, aujourd’hui, nous sommes dans ce qu’on appelle la prière sacerdotale, dans le chapitre 17 de St Jean. Et c’est un condensé de la prière de Jésus, prière qui est faite de trois parties. Et comme avec nos années liturgiques, les lectures sont réparties sur trois ans, on en prend une partie la première année, une autre la deuxième, cette année B, et la fin la troisième année.

Cette prière est appelée Prière Sacerdotale entre autre parce qu’elle reprend le plan de la prière du grand prêtre qui, lors de la fête des expiations, la fête du Yom Kippour, où il y avait une grande prière, priait pour lui-même, pour ses collaborateurs et puis pour tout le peuple. Et Jésus reprend le même schéma en priant dans une première partie pour lui-même, ici la deuxième partie pour ses disciples, et dans la troisième partie il prie pour tous ceux qui viendront après, ses ‘’disciples de seconde main’’ comme on pourrait les appeler, que nous sommes.
Cette prière, elle est étonnante. La veille, fin du chapitre 16, Jésus disait « Je ne vais pas prier pour eux, parce que le Père les aime » (26 Ce jour-là, vous demanderez en mon nom ; or, je ne vous dis pas que moi, je prierai le Père pour vous, 27 car le Père lui-même vous aime). Et maintenant il prie pour nous…
Il faut bien comprendre : Je ne vais pas prier pour eux, parce que la prière chrétienne, c’est vraiment la prière de Jésus, et nous sommes invités par Jésus à être dans le rayonnement de la grâce de Dieu en gardant ce nom qu’il lui a donné, c’est le nom de Père. Nom que personne n’avait osé donner auparavant. Aujourd’hui, on l’a appelé pendant des siècles comme cela, et on a essayé de déconstruire dans la société moderne l’image du Père… Mais de quoi s’agit-il vraiment ? Ceux que tu m’as donné, Père, tu les as aimés. C’est-à-dire que tout ce qui est à toi est à moi, est à eux, c’est-à-dire qu’il n’y a plus de barrières.

« Tout ce qu’ils demanderont en mon nom, ils l’obtiendront »

Parce que Jésus c’est ce cœur à cœur avec Dieu. Et il disait même pour renforcer ce lien : je ne vous appelle plus ‘’serviteurs’’, je vous appelle ‘’amis’’, et nous sommes les membres de son corps, et nous sommes appelés à vivre cette relation directe avec Dieu, à recevoir l’Esprit de Jésus et à demeurer dans le Seigneur comme le dit saint Jean. Il le rappelle très bien : Dieu, personne ne l’a jamais vu, mais si j’aime comme le Christ a aimé, si j’aime non pas pour mon intérêt, mais pour que l’autre grandisse, si j’aime pour que l’autre soit bien, pour lui faire du bien, eh bien Dieu est là… Je demeure en eux et ils demeurent en moi.

Alors, quelle est cette prière ?
Jésus prie, et Il nous a donné sa prière, il nous a donné sa relation à Dieu, elle est approfondie dans le notre Père, et nous pouvons remarquer que cette prière reprend les thèmes du Notre Père. « Garde-les dans ton nom », « Que ton nom soit sanctifié ». C’est pour qu’ils soient un. Et c’est sur cette unité que Jésus va insister. Et ce n’est pas tant une unité à faire, mais un effort de nous retrouver dans cet amour qui va faire l’unité, qui va construire. Et ce nom de Père nous invite à rentrer dans cette relation de Dieu qui fait de nous des fils, qui fait de nous des amis.

Sur la fin, Jésus rajoute « Garde-les du mauvais », tout comme à la fin du Notre Père nous disons « mais délivre-nous du mal. » Afin que nous n’entrions pas dans la tentation. Alors on peut s’interroger : vous parlez de cette proximité de Dieu, mais Il est loin, et puis tout ce mal qu’il y a dans le monde, dans le journal, mais aussi dans nos vies, dans les difficultés…
Alors, oui, Jésus insiste : je ne suis pas venu pour changer le monde et en faire un monde sans difficultés, je suis entré DANS le monde.
Et je vais vous donner la clé. Non pas pour qu’il n’y ait pas difficultés dans notre vie, mais pour que nous abordions avec un cœur nouveau, sans être mangé par le mal…
Oh, c’est bien difficile sur notre chemin, nous risquons toujours d’être contaminés par le mal. Si quelqu’un est fâché contre nous, on se fâche pour se défendre, et on crie plus fort de préférence afin de se protéger mieux…
Et c’est là tout l’enseignement de Jésus : si on te frappe sur une joue, tend un autre côté, pas le même, pour ne pas rentrer dans ce circuit. Et il nous faut pour cela DEMEURER.

Et le Seigneur, pour nous purifier, nous donne sa vérité : la Parole, l’Ecriture. J’ai veillé sur eux, dit Jésus et aucun ne s’est perdu sauf celui qui s’en va à sa perte. On pourrait comprendre que la mission de Jésus a échoué, mais tout était écrit dans sa Parole, pour que nous puissions comprendre, que nous puissions aller au bout de ce chemin qui est le nôtre en demeurant en Lui.

Et pour cela, c’est son Esprit qui nous est donné.
Alors voyez, avant que ne vienne l’Esprit avec puissance le jour de la Pentecôte, il nous faut demeurer dans sa Parole, il nous faut la ruminer, essayer de la comprendre.
Trop souvent, nous lisons l’Écriture, et on ne la comprend pas vraiment et puis on passe, et on laisse s’accumuler des choses que l’on ne comprend pas. Il faut chercher avec notre cœur. Il faut demander à l’Esprit Saint, il faut demander à Marie, demander à ces amis qui sont proches, il faut chercher, il faut que nous ayons le désir de voir le Seigneur, de recevoir son Esprit, de recevoir sa force, la force d’en-haut qu’il nous donne, afin que nous puissions vivre de cette liberté dans notre monde, dans nos difficultés, sur ces chemins de croix qui sont souvent aussi les nôtres.

Le Seigneur nous aime. Oh, c’est vrai, encore une fois, c’est un long chemin, il nous faut apprendre. Et si l’Église est attentive et exigeante, au-moins dans sa loi, pour inviter les chrétiens à se réunir en communauté le dimanche, c’est vraiment pour que nous puissions avoir cet échange sur la Parole, et se demander l’un à l’autre « comment tu comprends, comment tu avances, comment ce message de Jésus vit en toi ? »
Et le pape François ne cesse de le dire : si nous ne faisons pas cela, c’est que nous sommes atteints déjà d’Alzheimer : on ne se souvient pas des bienfaits que le Seigneur nous a faits…

Alors rendons-nous ce service de chercher le Seigneur, et d’apprendre à demeurer dans cette unité, dans cet amour du Seigneur, dans sa Parole qui est vérité. La vérité dans l’Évangile de saint Jean, c’est justement la Parole que Jésus nous dit, la révélation que Dieu fait de lui-même, qui nous permet de voir le monde, non pas à partir de nos traumatismes, mais de voir notre monde traumatisé à partir des yeux du Seigneur, des yeux de miséricorde, de compassion, des yeux du Seigneur mort et ressuscité c’est-à-dire qui vient jusqu’au plus profond de nos malheurs pour nous tirer, nous relever.

Demandons la grâce de passer cette semaine, de passer notre vie à chercher le Seigneur, à chercher le sens de sa Parole, et nous pourrons avancer vers ce que le Seigneur nous donne dans la lecture aujourd’hui : « je parle ainsi pour qu’ils aient en eux la joie, la joie parfaite, et qu’ils en soient comblés. »

Amen.


Références des lectures du jour :

  • Livre des Actes des Apôtres 1,15-17.20a.20c-26.
  • Psaume 103(102),1-2.11-12.19-20ab.
  • Première lettre de saint Jean 4,11-16.
  • Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 17,11b-19 :

En ce temps-là, les yeux levés au ciel, Jésus priait ainsi :
« Père saint, garde mes disciples unis dans ton nom, le nom que tu m’as donné, pour qu’ils soient un, comme nous-mêmes.
Quand j’étais avec eux, je les gardais unis dans ton nom, le nom que tu m’as donné. J’ai veillé sur eux, et aucun ne s’est perdu, sauf celui qui s’en va à sa perte de sorte que l’Écriture soit accomplie.
Et maintenant que je viens à toi, je parle ainsi, dans le monde, pour qu’ils aient en eux ma joie, et qu’ils en soient comblés.
Moi, je leur ai donné ta parole, et le monde les a pris en haine parce qu’ils n’appartiennent pas au monde, de même que moi je n’appartiens pas au monde.
Je ne prie pas pour que tu les retires du monde, mais pour que tu les gardes du Mauvais.
Ils n’appartiennent pas au monde, de même que moi, je n’appartiens pas au monde.
Sanctifie-les dans la vérité : ta parole est vérité.
De même que tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi, je les ai envoyés dans le monde.
Et pour eux je me sanctifie moi-même, afin qu’ils soient, eux aussi, sanctifiés dans la vérité. »