La sexualité dans le couple

Le corps est beaucoup montré mais pas vraiment compris ! Ce qui entraîne un obstacle majeur à l’exercice de la sexualité dans le couple.
Or le corps, créé par Dieu, a une vocation et même une mission ! Il n’est pas simplement une enveloppe…

Cette conférence est destinée :

  • à ceux qui vivent en couple, lieu de l’exercice du don de soi-même
  • aux éducateurs d’enfants et animateurs de groupes de jeunes

 Pour écouter 2 autres conférences de Père Pierre-Marie sur ce thème, cliquez sur ce lien

Le sens de la sexualité dans le plan de Dieu

Le corps exprime la personne

Le rôle du corps est important dans la relation avec l’autre en général. Dans une relation conjugale, ce que l’on découvre en premier c’est le corps de l’autre, témoin de sa personne, et c’est lui qui parle et permet d’entrer en communion. On a besoin du corps pour toute forme de relation et en particulier dans notre relation avec Dieu ! A l’époque du Jansénisme on jetait la suspicion sur tout ce qui venait du corps et particulièrement sur la sexualité dans le mariage ; or dans le corps humain il n’y a rien de sale et cela est vrai au plus haut point puisque nous sommes à l’image et à la ressemblance de Dieu par notre corps aussi ! En fait, nous ne comprenons pas le sens de ce corps : par lui nous montrons notre désir d’aimer, de nous donner. Il est témoin de quelque chose d’invisible et de sacré et doit, pour cela, être respecté (à ce titre personne ne peut être considéré comme un « légume » car son corps dit toute sa personne). Les femmes qui sont mères ne sont pas seulement mères du corps de leur enfant mais bien de toute la personne de cet enfant. Pensons à Marie, mère de Dieu parce que Mère de Jésus, mère de son corps et donc de toute sa personne !

A travers ce corps il y a quelque chose de l’âme (au sens philosophique du terme) et qui fait qu’un être humain est un être unique. (Il y a aussi une mémoire du corps qui nécessite justement d’éduquer les enfants dans la relation à leur corps afin qu’ils ne méprisent pas leur corps).
Un lien indissociable existe entre la personne et son corps et séparer l’âme du corps conduit à la mort (cf. JPII et « La culture de mort »)
Le corps sert à entrer en communion avec l’autre et il est donné et reçu en fonction du bien total de la personne dans la relation conjugale. La communion des corps est le signe de l’amour et donc de la communion des âmes.

« Nus l’un devant l’autre et n’en ayant pas honte » (cf. Genèse II 25)

La honte traduit la peur de dévoiler quelque chose d’intime à nous-même, et la peur que ce qui est dévoilé soit falsifié, soit considéré comme un objet. Mais c’est la lumière de Dieu, la connaissance de l’autre dans la communion avec Dieu, qui permet de voir son corps dans toute sa finalité : si on nie Dieu, le corps de l’autre est vite considéré comme objet alors que sous le regard de Dieu ce corps est le témoin de tout le mystère de l’autre.
La nudité d’Adam et Eve : ils ne craignaient pas de se dévoiler l’un à l’autre parce qu’ils étaient en communion à Dieu. Dans cette lumière divine, l’intimité des époux est signe, dans la création, de l’Amour de Dieu :

« Je rends grâce à Dieu dans la communion des corps ».
(cf. JPII dans sa théologie du corps)

Après le péché originel, l’Homme a peur face au dévoilement de ce corps et par cela nous comprenons toute l’importance du corps aux yeux de Dieu. Pensons au temps de Noël : c’est le temps où l’on contemple la beauté du corps humain ; nous vivons une religion de l’Incarnation : Dieu s’est fait homme, a pris chair et redonne le sens profond du corps.

« Un signe dans la chair » (Genèse XVII 11)

Quand Dieu fait alliance avec l’Homme, cette alliance s’inscrit dans la chair et même dans les organes de la vie (la circoncision). Dieu marque ainsi le désir de vouloir toujours s’incarner. Le fait même d’être chrétien dit une manière et de s’unir et de voir l’Homme, une manière de voir l’union intime des époux. Ce signe gravé (Genèse XVII 13 : alliance perpétuelle) dans la chair nous montre l’insistance qu’a Dieu de graver son Amour dans la chair ! Le Christ sera l’image parfaite de cette alliance inscrite par Dieu dans la matière.

« Le corps est le seul capable de rendre visible l’invisible, à savoir le spirituel et le divin. Il transfert dans la réalité visible ce qui, dans le mystère de Dieu, est de toute éternité. » (Saint Jean-Paul II)

Voilà la vocation du corps ! Et ce mystère est l’Amour du Père pour les hommes qui passe obligatoirement par l’humanité de Jésus.
On ne grandit pas spirituellement en ayant une image négative de son corps ; et l’amour des époux se voit dans les corps et le don des corps.
L’Homme unit en lui-même l’esprit et la matière et c’est bien le seul dans toute la création. Mais dès qu’on sépare les deux c’est pour animaliser ou à l’inverse trop spiritualiser…

Notre corps est censé dire le spirituel de l’homme (intelligence et volonté). Dans la nouvelle alliance le signe marqué dans la chair c’est Jésus, mais aussi l’union intime des époux chrétiens qui dit quelque chose de l’Amour de Jésus à la fois source de vie et à la fois source de bonheur. Cette joie que les époux ressentent lorsqu’ils s’unissent n’est pas étrangère à Dieu. C’est pourquoi il peut être bien de prier avant de s’unir (cf. prière de Tobie).
L’union dans la chair est signe de l’Amour de Dieu, signe de l’Amour des époux et donc constitutif d’une donation totale de l’un à l’autre ; on ne doit jamais évacuer le langage des corps (cf. JPII « le langage des corps est le langage le plus fort »).

L’homme et la femme ont évidemment une vocation différente en tout cela. Le corps de l’époux et celui de l’épouse expriment des choses différentes dans la manière de transmettre l’Amour parce que le corps dit l’âme et l’âme dit quelque chose dans la manière de transmettre l’Amour : le corps de l’homme est appelé à habiter le corps de la femme (à la différence du monde mythologique) et la femme est capable d’accueil, d’adaptation et de souplesse

L’union des corps est marquée par trois réalités :

  • l’initiative du don (le plus souvent venant de l’homme)
  • l’accueil de ce don (dans le corps de l’épouse)
  • la fécondité qui fait rayonner ce don et qui est l’expression de cet amour

La sexualité doit être vécue dans cette finalité ; le plaisir est témoin de la communion des cœurs et non le sens de la sexualité. La sexualité avant le mariage ne correspond pas à ce sens de la communion des cœurs, unis par le don du cœur à l’autre, par le « oui » qui l’enracine définitivement.

Nous sommes dans une « société schizophrène » où on sépare les choses et où il n’y a plus que le plaisir. Or, ce que l’on fait avec son corps exprime la communion avec l’autre. Le « OUI » du mariage est ratifié, scellé dans chaque union intime ou dans le dialogue des corps et ces gestes de l’amour conjugal mettent en jeu toute la personne et celle qui s’exprime et celle qui est aimée. Il existe une dimension globale tant dans la communion avec Dieu que dans la communion avec la personne de l’autre.

L’union des corps est expression de l’Amour mais c’est aussi le lieu de la Miséricorde, avec soi-même d’abord, mais aussi face à un époux ou une épouse qui a plus de difficulté à se donner. Beauté et Miséricorde !

Le langage des corps est aussi un langage de grande humilité ; pensons à l’humilité de Jésus Christ qui a choisi un corps ! On ne fait pas ce qu’on veut de son corps qui est signe aussi de blessures. Il faut parler entre époux pour rendre grâce ou pour se remettre en cause ; on grandit dans l’union intime parce que l’on grandit dans l’union. On ne grandit pas dans la communion avec l’autre sans le langage des corps qui fait parti du langage de l’Amour.

La sexualité comme un acte humain

La sexualité n’est pas simplement un acte biologique ou le fruit d’une logique ; l’acte de la sexualité est surtout un acte humain car il entraîne l’implication de l’intelligence et de la volonté. En cela se trouve la différence radicale avec les animaux : l’homme procrée, ne se reproduit pas ! Ce n’est pas le fruit de l’instinct ; cela demande une vraie confiance et une connaissance du corps de l’autre et de son propre corps et cela demande donc une activité de l’intelligence.

Connaître, dans le langage biblique, désigne l’union intime des époux (cf. la Vierge Marie qui « ne connaît pas d’homme »). L’homme ne doit jamais laisser à l’instinct, ni aux pulsions la possibilité de dominer sur cet acte (deux subjectivités peuvent s’affronter). La vie conjugale peut être le lieu de la domination or on doit faire appel au spirituel en nous (intelligence et volonté). L’union intime et la vie matrimoniale sont liées : c’est une école pour apprendre à se décentrer de soi-même ; c’est un lieu d’humilité. Ce que je vis avec mon corps je le vis avec mon âme ; ce que je vis dans la relation des corps s’exprime dans la relation des personnes et inversement et s’exprime également dans la relation à Dieu. La femme a plus tendance à spiritualiser ou à materner (la nature a horreur du vide !) Notre vie spirituelle s’exerce dans cette union des époux ; sinon chacun risque de vivre sa propre vie spirituelle séparément comme pour combler un manque.

C’est par un corps eucharistique que le Christ nous rejoint à chaque messe.

Menaces sur la relation sexuelle

Le péché originel a eu des conséquences très importantes ! La sexualité est le fruit d’un combat spirituel, d’un combat intérieur ; il est difficile d’avoir une vraie attitude dans la relation conjugale à cause de notre vision du corps.

Trois menaces pèsent sur l’amour :

  • le désir d’appropriation de l’autre : « le rapport de don se transforme en rapport d’appropriation » (Jean-Paul II) que ce soit pour l’homme dans un appétit de jouissance ou pour la femme qui réclame que l’homme réponde à son bonheur. Or les relations sont marquées par la joie mais aussi par le manque.
  • « J’ai eu peur… » (Genèse III 10) : c’est l’écroulement de la vocation du corps. Comme le lien avec Dieu est rompu, tous les autres liens sont rompus. En se donnant avec un corps humain au Père, le Christ réapprend à l’Homme à retrouver le chemin de l’Alliance. Souvent la peur de la femme résulte d’un manque de confiance vis-à-vis de l’homme : invitation à vérifier que la confiance entre les époux existe. Chez la femme c’est aussi une méfiance par rapport à la sexualité de l’homme et l’homme lui-même peut avoir une peur par rapport à sa propre sexualité qui peut le dépasser. Tous les deux sont appelés à un dépassement de soi-même.
  • « et lui dominera sur toi » (Genèse III 16) : parce qu’il y a perte de la relation avec Dieu ! Il y a domination et non plus don… Le lieu de la domination est autant de côté de l’homme que de celui de la femme et cette domination est le fruit du péché, de la concupiscence. La femme se fait dominatrice en se refusant ou en se laissant prendre sans se donner (elle doit être accueil et non passive) ou alors la femme peut encore dominer en cherchant à conduire son époux là où elle veut par ses larmes, ses caprices….

Pour retrouver la beauté de la relation conjugale il faut retrouver l’émerveillement face à l’autre, retrouver ce qui nous a attiré chez l’autre ; il faut également rendre grâce à Dieu pour ce qu’il est et se mettre ensemble devant le Seigneur et se reconnaître pauvres face à Dieu en demandant sa grâce.

Pour écouter deux conférences de Père Pierre-Marie sur ce thème :

 La sexualité dans le couple : joies et souffrances (Halte spirituelle pour femmes, novembre 2013)
 L’Église et la sexualité : sujet tabou ? (Conférence Spi&Spi, novembre 2014)


Bibliographie :

  • « Les langages de l’amour » Gary CHAPMANN
  • « Guérir de ses blessures » Père Pascal IDE
  • « Mieux se connaître pour mieux s’aimer » Père Pascal IDE