Homélie du sixième dimanche de Pâques

19 mai 2020

« Moi, je suis le Chemin, la Vérité et la Vie ; personne ne va vers le Père sans passer par moi. »

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Texte de l’homélie :

Frères et sœurs bien-aimés,
Dans ce temps qui nous sépare de la Pentecôte, la dernière partie du temps pascal, les lectures nous invitent à méditer sur le rôle du Saint Esprit dans nos vies. Et tout ce qui est dit du Saint Esprit se rapporte à la vie spirituelle. C’est donc crucial que nous prêtions attention à ces paroles sur le Saint Esprit, que ce soit dans les Actes de Apôtres, dans les lettres de Saint Paul ou dans l’Évangile.
Il nous est ainsi conseillé de prendre des précautions par rapport à notre vie spirituelle. Ainsi, nous sommes invités à l’intériorité.
Plus précisément, qu’est-il dit du Saint Esprit ?

Le défenseur

Le Seigneur Lui-même Le nomme comme cela pour nous rappeler que notre vie spirituelle est parfois en danger. Nous ne prenons pas toujours conscience que nous sommes habités. Il nous dit à ce sujet :

« L’Esprit est en nous… »

Le Chrétien porte en lui-même plus grand que lui-même. C’est l’unique religion qui affirme cette réalité. Une vie chrétienne, c’est d’abord être connecté à soi-même, dans sa vie profonde. Et l’on voit bien qu’il a des forces centrifuges qui nous emmènent loin de nous-même, loin de cette vie intérieure.

Le Saint Esprit nous défend aussi contre des formes de réalités terrestres :

« Le monde ne le connaît pas… »

Et l’on voit bien dans l’histoire de l’Église le nombre de persécutions qui avaient pour but d’empêcher la vie spirituelle. Et l’on ne peut être que très attentifs à la mesure prise aujourd’hui au sujet de l’interdiction des cultes publics : n’est-ce pas aussi une manière de détruire la vie spirituelle ? Au nom de l’hygiénisme, on peut justifier les lois les plus liberticides.

Cette vie intérieure mérite donc d’être défendue contre une autre forme de dérive que l’on retrouve dans la société actuelle qui reconnaît une forme intériorité sans transcendance : c’est tout ce qui a un rapport avec le développement personnel et de la psychologie – qui en soi porte des fruits.
Faites-vous bien la différence entre la psychologie, le développement personnel et la vie spirituelle, la vie dans l’Esprit ? Même si on peut y trouver des bénéfices au plan humain – creuser notre histoire, débusquer nos travers et nos incohérences, chercher à régler nos difficultés relationnelles est un travail intéressant – c’est très différent de la vie spirituelle.
La vie spirituelle affirme une transcendance. De nos jours, on voit se multiplier des cours de méditation. Mais la méditation, qui est une forme d’intériorité dans laquelle on est centré sur notre souffle, notre corps, mais nous n’entrons pas en relation. L’Esprit Saint doit nous alerter car il y a là un danger pour la vie spirituelle, car cela peut nous éloigner de la relation infinie que l’on peut développer avec Dieu.

Le combat spirituel avec l’aide de l’Esprit-Saint

Oui, frères et sœurs bien-aimés, nous sommes dans un combat spirituel et ce que le Seigneur nous dit aujourd’hui doit nous rendre attentifs. Ce combat doit être mené contre toutes les formes d’idolâtrie qui mettent à la place de Dieu quelque chose ou quelqu’un.

On le sait bien, les trois grandes formes d’idolâtrie que nous connaissons et que le Christ a vaincues dans le récit des tentations :

  • l’idolâtrie des plaisirs désordonnés
  • l’idolâtrie des richesses
  • l’idolâtrie du pouvoir.

Ces idolâtries s’opposent à la vie spirituelle, à la vie de l’Esprit car précisément, il y a une forme d’infini. Elles prétendent mettre à la place réservée à Dieu des réalités finies, terrestres, comme si elles étaient infinies.
Ainsi, entrer dans le vie spirituelle, c’est entrer dans un combat intérieur. D’abord contre soi-même, parfois contre l’extérieur. Nous sentons bien que nous sommes concernés par ces trois formes d’idolâtrie, car nous sommes marqués par le péché originel et que la vie dans l’Esprit ne nous est pas spontanée. Le Seigneur nous demande de reconnaître l’Esprit pour être en vérité, de garder Ses commandements, de faire mémoire de Sa parole.
Saint Paul détaille des outils spirituels et le Seigneur les mentionne déjà dans l’Evangile. Ces armes nous permettent de garder cette communication avec Dieu. Et c’est d’autant plus important que nous sommes dans un monde sécularisé qui ignore la présence de Dieu, voire décourage la relation avec le Seigneur.

Ainsi, il est intéressant que nous soyons sur le qui-vive, pour– face à ces combats spirituels – pouvoir nous ressaisir et prendre conscience que l’Esprit de Dieu est en nous. Nous sommes habités. Nous portons en nous-même plus que nous-même.

« Nous portons un trésor dans un vase d’argile. »

C’est là toute la grâce de la vie chrétienne : être connectés à la présence de la vie de Dieu en nous. C’est une des conséquences de l’incarnation. Ne sommes-nous pas la seule religion à affirmer cette présence de la Trinité à l’intérieur de nous-même, grâce au baptême. Là où est l’Esprit sont aussi le Père et le Fils, et c’est par l’incarnation que cela se réalise.
Le Chrétien peut se recueillir et découvrir qu’il est un tabernacle qui s’ouvre par la charité et la prière, le Seigneur le mentionne à travers l’Évangile. Soyons attentifs aux motions du Saint Esprit.

Les motions de l’Esprit Saint

Saint Ignace de Loyola en parle de façon très moderne, alors que ses exercices spirituels ont déjà plusieurs siècles. Les motions du Saint Esprit sont telles que Dieu agit en nous et à travers cette attention à la désolation et à la consolation, nous découvrons comment agir et discerner.
C’est aussi le cas avec les conseils évangéliques qui nous sont donnés : les vœux que font les religieux de chasteté, pauvreté et obéissance organisent un style de vie, mais toute personne qui veut suivre le Christ est invité à vivre – selon son état de vie – une forme de chasteté, une forme de pauvreté, une forme d’obéissance. Ce sont les moyens de lutter contre les trois formes de tentation que le Christ a vaincues : la tentation de la chair, la tentation des richesses et la tentation de l’orgueil de l’esprit : ce sont trois formes d’orgueil et de tentations qui sont en nous.
Si le Seigneur nous invite à être attentifs à ces trois formes de tentation, c’est pour garder l’humilité qui va faire que nous pouvons puiser une force dans notre contact avec le Seigneur. Ce mot humilité dont vient le mot « homme », qui signifie « tiré de la terre », humus selon les Écritures.

Il est intéressant de voir ce temps qui nous sépare de la Pentecôte donné pour être attentifs à ce que le Seigneur fait travailler dans nos cœurs, dans Son Église, dans le cœur des fidèles. Soyons attentifs aux dimensions de Foi, d’Espérance et de Charité répandues dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné : Il agit en nous.

« La modernité est une conspiration contre la vie spirituelle »

Alors que tout nous invite à l’extériorité dans cette société moderne, demandons au Seigneur par cette Eucharistie que, face à la société moderne qui, comme Bernanos le soulignait après guerre, est une conspiration contre la vie spirituelle, nous soyons attentifs à cette intériorité. Ne soyons pas des analphabètes de nous-mêmes, mais, parce que nous avons foi dans la parole du Seigneur, parce qu’Il nous accompagne, parce qu’il est auprès de nous, en nous, pour faire de nous des témoins d’un Dieu qui nous appelle des ténèbres à Son admirable lumière,

Amen !

Références des lectures du jour :

  • Livre des Actes des Apôtres 8,5-8.14-17.
  • Psaume 66(65),1-3a.4-5.6-7a.16.20.
  • Première lettre de saint Pierre Apôtre 3,15-18.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean 14,15-21 :

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements.
Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous. l’Esprit de vérité, lui que le monde ne peut recevoir, car il ne le voit pas et ne le connaît pas ; vous, vous le connaissez, car il demeure auprès de vous, et il sera en vous.
Je ne vous laisserai pas orphelins, je reviens vers vous. D’ici peu de temps, le monde ne me verra plus, mais vous, vous me verrez vivant, et vous vivrez aussi.
En ce jour-là, vous reconnaîtrez que je suis en mon Père, que vous êtes en moi, et moi en vous.
Celui qui reçoit mes commandements et les garde, c’est celui-là qui m’aime ; et celui qui m’aime sera aimé de mon Père ; moi aussi, je l’aimerai, et je me manifesterai à lui. »