Homélie du premier dimanche de l’Avent

2 décembre 2024

« Restez éveillés et priez en tout temps : ainsi vous aurez la force d’échapper à tout ce qui doit arriver, et de vous tenir debout devant le Fils de l’homme. »

Écouter l’homélie

« Nous commençons ce dimanche une nouvelle Année liturgique qui, par la grâce de Dieu, s’ouvre naturellement par l’Avent, temps de préparation au Noël du Seigneur. Le Concile Vatican II, dans la Constitution sur la liturgie, affirme que l’Église ‘déploie tout le mystère du Christ pendant le cycle de l’année, de l’incarnation et la Nativité jusqu’à l’Ascension, jusqu’au jour de la Pentecôte, et jusqu’à l’attente de la bienheureuse espérance et de l’avènement du Seigneur’. De cette manière, ‘tout en célébrant ainsi les mystères de la rédemption, elle ouvre aux fidèles les richesses des vertus et des mérites de son Seigneur ; de la sorte, ces mystères sont en quelque manière rendus présents tout au long du temps, les fidèles sont mis en contact avec eux et remplis par la grâce du saint’ (Sacrosanctum Concilium, 102).
Le Concile insiste sur le fait que le Christ est le cœur de la liturgie, comme le soleil autour duquel tourne, à la manière des planètes, la bienheureuse Vierge Marie, alors que les martyrs et les autres saints ‘chantent à Dieu dans le ciel une louange parfaite et intercèdent pour nous’ (ivi, 104). » (Benoît XVI, 29 novembre 2009)

Texte de l’homélie

Chers frères et sœurs, au début du temps de l’avent, l’Église propose à notre méditation des textes du genre apocalyptique qui emploient beaucoup d’images menaçantes. Nous avons souvent du mal à les comprendre et cela nous fait peur. Quand on parle d’une situation apocalyptique, cela évoque des catastrophes terribles, épouvantables…
Ces lectures sont éloignées de notre culture. Il est toujours bon de nous rappeler que ce n’était pas du tout l’intention de leurs auteurs. Leur but, bien au contraire, était de fortifier l’espérance de leurs lecteurs qui se trouvaient aux prises avec des situations vraiment difficiles, des situations d’épreuve, de souffrance, de persécution.

Apocalypse, du grec ancien ἀποκάλυψις (apokálupsis), signifie « action de révéler ». Il s’agit de découvrir, de dévoiler, quelque chose qu’on ne voit pas de prime abord. Au premier abord, nous ne voyons que des choses terrifiantes, l’apocalypse nous révèle que Dieu est présent et qu’il va délivrer les fidèles.

Avec vous, je voudrais retenir trois choses de ces lectures de style apocalyptique :

  • Au delà du mal, tourner notre regard vers Jésus victorieux du péché et de la mort
  • Accueillir le Seigneur qui vient, même si c’est de manière un peu mystérieuse
  • Cultiver une attitude de vigilance active.

Regarder au-delà du mal : Jésus est ressuscité

Nous pouvons être tentés de désespérer face à la présence du mal dans le monde. Le mal est bien présent mais Dieu n’est pas absent. Le livre de l’Apocalypse se veut donner une consolation à des croyants qui se trouvent dans une situation difficile où il est question notamment de persécutions. Cela n’est pas une consolation au rabais, une sorte d’opium du peuple. Elle est fondée sur la foi en la résurrection du Christ.

Dans l’évangile du jour, Jésus nous invite à relever la tête :

« Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles. Sur terre, les nations seront affolées et désemparées par le fracas de la mer et des flots. Les hommes mourront de peur dans l’attente de ce qui doit arriver au monde, car les puissances des cieux seront ébranlées. Alors, on verra le Fils de l’homme venir dans une nuée, avec puissance et grande gloire. Quand ces événements commenceront, redressez-vous et relevez la tête, car votre rédemption approche. »

Ne perdez pas cœur devant l’adversité et les difficultés. Elles n’ont pas le dernier mot. C’est le Christ glorieux, mort et ressuscité qui a le dernier mot.

C’est ce que nous affirmons dans le Credo :

« Jésus a été crucifié, est mort et a été enseveli, est descendu aux enfers » mais « le troisième jour (il) est ressuscité des morts, est monté aux cieux, est assis à la droite de Dieu le Père tout-puissant, d’où il viendra juger les vivants et les morts. »

C’est ce que dit Jésus dans l’évangile de ce jour :

« On verra le Fils de l’homme venir dans une nuée, avec puissance et grande gloire. »

Comme le dit saint Paul :

« Le Christ est mort et revenu à la vie pour être le Seigneur des morts et des vivants/ » (Rm 14, 9)

Le Christ nous donne une espérance fiable.

« Il est le même hier et aujourd’hui, et le sera à jamais. » (He 13, 8)

Accueillir le Seigneur qui vient

Être dans une attitude de réceptivité

Nous sommes invités à aller vers le Seigneur. Mais avant de se mettre en route, il s’agit surtout de recevoir, d’accueillir. En fait, il y a un double mouvement : avant même d’aller vers le Seigneur, l’accent est plutôt sur la réceptivité : accueillir le Seigneur qui vient, se disposer pour être en mesure de le reconnaître lorsque le Seigneur se présente.
C’est en Jésus et en nul autre (soignons prudents avec le développement personnel, …) que nous sommes appelés à trouver notre salut. L’un des risques est de vouloir prendre les choses en mains nous mêmes et de chercher d’autres voies de salut que le Christ, à chercher son salut en soi même plutôt qu’en Dieu.

Le mot « avent » vient du mot latin « Adventus ». Autrefois, ce mot était un terme technique pour indiquer en particulier l’arrivée, la visite d’un roi ou d’un empereur dans une province. C’était un événement exceptionnel. Les gens essayaient de bien l’accueillir car ils avaient conscience que s’ils l’accueillaient mal, il pourrait y avoir des conséquences négatives. Et inversement, s’ils l’accueillaient bien, cela pourrait leur apporter de nombreux bienfaits.

Les chrétiens ont repris ce terme technique à propos de la venue de Jésus. C’est le Christ Roi de l’univers qui vient visiter notre province appelée « terre ». Les premiers chrétiens avaient bien conscience que bien accueillir Jésus était source de bénédictions. Mal l’accueillir, c’est se priver de beaucoup de bienfaits (on peut se rappeler la présence de l’Arche chez Obed Edom).

Grandir dans le désir

Nous sommes invités dans notre prière de ce temps de l’avent à grandir dans notre désir de la venue de Jésus.

« Saint Paul en conclusion de sa première Lettre aux Corinthiens, répète et fait dire aux Corinthiens une prière née dans les premières communautés chrétiennes de la région palestinienne : Maranà, thà ! Qui signifie littéralement « Notre Seigneur, viens ! » (16, 22). C’était la prière de la première chrétienté et le dernier livre du Nouveau Testament, l’Apocalypse, se termine lui aussi par cette prière : « Seigneur, viens ! ». (…) Bien sûr nous ne voulons pas qu’arrive la fin du monde. Mais d’autre part, nous voulons également que se termine ce monde injuste. Nous voulons également que le monde soit fondamentalement changé, que commence la civilisation de l’amour, qu’arrive un monde de justice, de paix, sans violence, sans faim. Nous voulons tout cela : et comment cela pourrait-il arriver sans la présence du Christ ?
Sans la présence du Christ, un monde réellement juste et renouvelé n’arrivera jamais. Et même si c’est d’une autre manière, totalement et en profondeur, nous pouvons et nous devons dire nous aussi, avec une grande urgence dans les circonstances de notre époque : Viens, Seigneur ! Viens à ta manière, selon les manières que tu connais. » (Benoît XVI, 12 novembre 2008)

L’attente de ce ciel nouveau et de cette terre nouvelle n’est pas passive

L’attente de Jésus ne nous démobilise pas, au contraire

Saint Paul, dans la deuxième Lettre aux Thessaloniciens insiste pour que les chrétiens ne se démobilisent pas par rapport à leur responsabilité dans le monde.

« Et quand nous étions chez vous, nous vous donnions cette consigne : si quelqu’un ne veut pas travailler qu’il ne mange pas non plus. Or, nous apprenons que certains parmi vous vivent dans l’oisiveté, affairés sans rien faire. A ceux-là nous adressons dans le Seigneur Jésus Christ cet ordre et cet appel : qu’ils travaillent dans le calme pour manger le pain qu’ils auront gagné » (3, 10-12)

« En d’autres termes, l’attente de la parousie de Jésus ne dispense pas de l’engagement dans ce monde, mais au contraire crée une responsabilité devant le Juge divin à propos de nos actions dans ce monde. C’est justement ainsi que grandit notre responsabilité de travailler dans et pour ce monde. L’attente du retour implique donc une responsabilité pour ce monde. » (cf. Benoît XVI, audience du 12 novembre 2008)

Il s’agit de sortir d’une sorte de sommeil

C’est l’invitation de saint Paul aux Romains :

« Vous le savez : c’est le moment, l’heure est déjà venue de sortir de votre sommeil. Car le salut est plus près de nous maintenant qu’à l’époque où nous sommes devenus croyants. La nuit est bientôt finie, le jour est tout proche. » (Rm 13, 11-12)

Le pape François a de belles paroles à ce sujet :

« Le sommeil intérieur vient du fait de toujours tourner autour de nous-mêmes et de rester bloqués, enfermés dans sa propre vie avec ses problèmes, ses joies et ses douleurs, mais toujours tourner autour de nous-mêmes. Et cela fatigue, cela ennuie, cela ferme à l’espérance. Voilà la racine de la torpeur et de la paresse dont parle l’Évangile. L’Avent nous invite à un engagement de vigilance, à regarder en dehors de nous-mêmes, à élargir notre esprit et notre cœur pour nous ouvrir aux besoins des gens, de nos frères et au désir d’un monde nouveau. C’est le désir de tant de peuples martyrisés par la faim, l’injustice et la guerre ; c’est le désir des pauvres, des faibles, des abandonnés. C’est un temps opportun pour ouvrir notre cœur, pour nous poser des questions concrètes sur comment et pour qui nous dépensons notre vie. » (Pape François, 2 décembre 2018)

Il s’agit aussi de vivre dans la lumière

Dans l’évangile, Jésus nous appelle à veiller à ce que notre « cœur ne s’alourdisse dans les beuveries, l’ivresse et les soucis de la vie ». Saint Paul s’en fait l’écho lorsqu’il s’adresse aux Romains :

« Rejetons les œuvres des ténèbres, revêtons-nous des armes de la lumière. Conduisons-nous honnêtement, comme on le fait en plein jour, sans orgies ni beuveries, sans luxure ni débauches, sans rivalité ni jalousie, mais revêtez-vous du Seigneur Jésus Christ ; ne vous abandonnez pas aux préoccupations de la chair pour en satisfaire les convoitises. » (Rm 13)

Toute notre vie doit être orientée vers la venue de Jésus dans la gloire. Cela requiert de nous un certain comportement. Saint Paul, dans la deuxième lecture donne des indications assez claires :

« Frères, que le Seigneur vous donne, entre vous et à l’égard de tous les hommes, un amour de plus en plus intense et débordant, comme celui que nous avons pour vous. Et qu’ainsi il affermisse vos cœurs, les rendant irréprochables en sainteté devant Dieu notre Père, lors de la venue de notre Seigneur Jésus avec tous les saints. »

Conclusion :

L’Avent est le temps marial par excellence : Marie a été tout accueil à la grâce de Dieu.

Demandons Lui de nous aider à tourner notre regard vers le Christ glorieux plutôt que vers le mal qui nous écrase.
Qu’Elle nous aide à désirer la venue de Jésus et à nous disposer à Le recevoir de la manière dont Il se présentera à nous. Qu’Elle nous apprenne à vivre dans une attitude d’éveil et dans un comportement lumineux !

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre de Jérémie 33,14-16.
  • Psaume 25(24),4bc-5ab.8-9.10.14.
  • Première lettre de saint Paul Apôtre aux Thessaloniciens 3,12-13.4,1-2.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 21,25-28.34-36 :

En ce temps-là, Jésus parlait à ses disciples de sa venue :
« Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles. Sur terre, les nations seront affolées et désemparées par le fracas de la mer et des flots.
Les hommes mourront de peur dans l’attente de ce qui doit arriver au monde, car les puissances des cieux seront ébranlées.
Alors, on verra le Fils de l’homme venir dans une nuée, avec puissance et grande gloire. Quand ces événements commenceront, redressez-vous et relevez la tête, car votre rédemption approche.
Tenez-vous sur vos gardes, de crainte que votre cœur ne s’alourdisse dans les beuveries, l’ivresse et les soucis de la vie, et que ce jour-là ne tombe sur vous à l’improviste comme un filet ; il s’abattra, en effet, sur tous les habitants de la terre entière.
Restez éveillés et priez en tout temps : ainsi vous aurez la force d’échapper à tout ce qui doit arriver, et de vous tenir debout devant le Fils de l’homme. »