Homélie du 5e dimanche du Temps Ordinaire

11 février 2014

« De même, que votre lumière brille devant les hommes : alors en voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux. »

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Texte de l’homélie :

« Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde… »

Demandons au Seigneur, à l’Esprit-Saint de recevoir cette parole au fond de notre cœur. Nous l’avons entendue souvent, mais, cela reste comme quelque chose de vague dans notre esprit. Pourtant, Jésus le dit d’une manière forte, solennelle. Tellement solennelle, que Saint Matthieu a mis ce passage à la suite de la 9e Béatitude, et que cela en fait partie, et vient ouvrir tout l’enseignement fondamental de Jésus dans ce que l’on appelle « le sermon sur la montagne » (qui, soit dit en passant, est loin d’être un sermon !).
C’est important pour nous de la recevoir.

Qu’est ce que veut dire être le sel de la terre, être la lumière du monde ?

Bien sur, il est facile de comprendre que c’est le sel qui donne du goût aux aliments. C’est la lumière qui permet d’avancer dans les ténèbres, c’est entendu. Mais, pour nous, qu’est-ce que veut dire « être du sel » ?

Je vous invite à vous tourner vers Jésus. Jésus qui se met à prêcher, Jésus qui parcourt les villages, les villes, les campagnes de Galilée, de Samarie jusqu’en Judée, et qui va rencontrer énormément de pauvres, de gens brisés et pris au chaos de la vie, avec ses difficultés, comme beaucoup de nos contemporains, et comme nous-mêmes, bien souvent aussi, sous tel aspect de notre vie .

Ce sont ces gens-là que Jésus vient rencontrer. Du moins, c’est eux qui vont l’écouter d’une manière attentive. Il donne des Béatitudes, paroles de consolations, paroles pour ces pauvres, pour leur apprendre qu’ils ne sont pas en dehors du Royaume de Dieu, mais qu’ils y sont invités, tout préparés qu’ils sont par leur expérience.

Une règle de vie

Pour les autres

Cette parole du sel de la terre et de la lumière que nous devons être est aussi une règle de vie qui nous est donnée : le bonheur n’est pas simplement à accueillir de nous-même, de notre propre habileté à affronter le monde. Il nous vient par un autre, par le Seigneur. C’est ici ce qui est donné aux disciples et aux les communautés - qui sont aux prises avec les persécutions - auxquelles Saint Matthieu s’adresse. Ainsi, sans occulter le fait de la pauvreté, Jésus vient révéler à tous l’Amour du Père, ce Royaume, cette confiance de Dieu pour chacun qui va leur permettre de retrouver la vie.

« Vous êtes de sel de la terre » : Jésus redonne goût, le goût de vivre à des toutes ces personnes qui ne savaient plus comment avancer.

« Vous êtes la lumière » : Jésus apporter la lumière. Et c’est comme cela que sont définis Son ministère et Son action auprès de chacun, comme le prophétisent les textes d’Isaïe, déjà.

Nous sommes appelés à porter cette lumière. Et ici, Il le dit bien : « On ne va pas cacher une lampe sous le boisseau ». Autrement dit, ce n’est pas pour nous-mêmes que nous sommes chrétiens. Ce n’est pas pour nous-mêmes que nous prions. Mais, c’est pour que cette lumière dont nous sommes les bénéficiaires puisse rayonner, flamboyer, illuminer, transfigurer le monde.

Pour nous-mêmes

Nous sommes aussi cette lumière pour nous-mêmes, pour savoir - au sein de l’épreuve – voir la lumière qui brille au fond du cœur de celui que nous rencontrons, pour aller découvrir ce goût qu’il ignore peut-être encore, qui n’a pas été « mis en relief », mais qui va prendre cette dimension par la rencontre à la quelle le Seigneur nous invite.

Demandons au Seigneur de nous apprendre, de faire de nous Ses disciples, de nous mettre à Son école pour pouvoir apprendre à rencontrer chacun dans ses attentes, à travers cette humanité brisée, bouleversée par le péché, par les difficultés de toutes sortes. Que nous puissions, avec Lui, faire advenir le Royaume, du moins, être les collaborateurs de ce royaume qui vient.

Voilà rien que moins que notre mission de chrétien ! Voilà rien de moins que ce à quoi Jésus nous invite…
Et comme si nous n’avions pas compris, l’Eucharistie se poursuit avec geste du Seigneur qui nous donne Sa vie, qui nous donne Son amour, qui nous donne Son Corps et Son Sang pour nous soyons nous aussi lumière, comme Lui est la lumière du monde.

C’est impressionnant comme, après qu’Il ait déclaré dans l’Évangile de Jean « Je suis la lumière du monde », Jésus nous l’applique ainsi : Il ne fait pas de différence entre Lui et nous…

Alors, le Seigneur nous invite à nous réveiller, tout comme, dans la première lecture, le prophète Isaïe invite le peuple à se laisser réveiller. Il dit :
« Vous faites des jeunes, vous faites de prières, vous faites beaucoup de choses pour le Seigneur, mais en même temps, au lieu de vous consacrer totalement, vous continuez vos affaires, vous opprimez le pauvre, vous ne regardez pas les autres qui sont autour, et qui sont dans les ténèbres ».
Et on a l’impression que le prophète Isaïe a écouté le pape François… à moins que ce ne soit l’inverse ! car il nous dit : sortez à la périphérie.

« Le malheureux sans abri, celui qui est sans vêtement, celui qui n’a pas à manger…
Allez à sa rencontre ! »

Un don inattendu

Et il nous donne la clef. Parce que, tout comme je le disais pour le sel, c’est par cette clef et non pas par notre action que va jaillir la lumière : c’est par le fruit de cette rencontre. Quand tu sais te passionner, quand tu sais ouvrir ton cœur, quand tu sais rencontrer, aller chercher ce que l’on peut révéler en l’autre, que font le sel et la lumière si ce n’est révéler la réalité, révéler le goût qui sont déjà là.

Ainsi, c’est dans cette rencontre que ta propre ténèbre devient lumière. C’est l’expérience de beaucoup de ceux qui sont au service, qui vivent avec les pauvres d’une manière engagée : découvrir que, nous-mêmes, nous en sommes les bénéficiaires. Mais, pour cela, il faut nous donner et pas être simplement tournés vers nous-mêmes. Il faut oser aller de l’avant.

La parole pourrait paraître dure :

« Si le sel se dénature, avec quoi le salera t-on ? »

Tout comme cette mise en garde, que fait aussi le pape François, de ne pas rester avec une vie chrétienne centrée simplement sur nous-mêmes. Bien sûr, la vie chrétienne nous fait vivre au centre, elle nous fait trouver notre centre, mais pour que ce centre puisse rayonner.

Alors, ensemble et chacun pour soi, demandons au Seigneur que nous sachions comment nous pouvons donner du goût à la vie de notre prochain, comment je peux apporter de la lumière.
Quelque fois, nous pouvons être décontenancés devant l’ampleur de la tâche, devant les difficultés. Mais, encore une fois, ce n’est pas de notre « industrie » : nous sommes simplement ces témoins de Jésus, nous avons simplement à Le regarder comme je vous y invitais au début de cette homélie, regarder comme Il fait, et laisser Sa présence - que nous aimons appeler, que nous aimons chérir – opérer elle-même.

Là encore, comme je le disais, c’est dans la suite des conclusions des Béatitudes :

« Bienheureux les pauvres ! »

Mais, si tu es pauvre, mais ouvert avec ton prochain, alors, le Royaume de Dieu est là, Jésus est présent au milieu de nous. Une fois encore, dans cette Eucharistie, Il se fait présent au milieu de nous pour nous faire devenir Lui-même, pour nous faire devenir lumière,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre d’Isaïe 58,7-10.
  • Psaume 112(111),1a.4.5a.6.7-8a.9.
  • Première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens 2,1-5.
  • Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 5,13-16 :

Comme les disciples s’étaient rassemblés autour de Jésus, sur la montagne, Il leur disait :
« Vous êtes le sel de la terre. Si le sel se dénature, comment redeviendra-t-il du sel ? Il n’est plus bon à rien : on le jette dehors et les gens le piétinent.
Vous êtes la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut être cachée. Et l’on n’allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau ; on la met sur le lampadaire, et elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison.

De même, que votre lumière brille devant les hommes : alors en voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux. »