Texte de l’homélie :
La fête patronale d’une ville, d’une paroisse, d’une communauté, n’est pas simplement le désir de l’un ou de l’autre de confier à telle ou telle intercession la ville, la paroisse ou la communauté. C’est bien plus que cela.
Une fête patronale dit quelque chose de ce qui se vit dans cette ville, dans cette paroisse, et dans cette communauté.
Le Père Lamy nous a confiés à l’intercession du Cœur Immaculé de Marie Refuge des Pécheurs, et pour notre communauté, cette fête patronale exprime quelque chose de notre charisme, et c’est sur cela que j’aimerais méditer avec vous.
Nous en avons déjà une lumière lorsque nous lisons l’Evangile qui est choisi pour cette fête, où Joseph accueille Marie enceinte avant le mariage. Il a ce songe que cet enfant est le fruit du Saint Esprit, Il est le sauveur. Joseph est le premier Serviteur de Jésus et de Marie. Il nous est donc donné comme saint patron pour la vie contemplative. Saint Joseph nous dit profondément qui nous sommes.
Quelle est l’histoire de Joseph si ce n’est d’être au service de l’œuvre de Dieu dans la vie de Marie. Voici aussi notre vocation, notre charisme : se mettre au service de l’œuvre de Dieu dans ceux qui s’approchent de nous, dans ceux qui nous sont confiés.
Alors, me direz-vous, n’est-ce pas au fond le charisme de toute l’Eglise ? Oui précisément, car un charisme est catholique car il peut s’étendre à des dimensions universelles, mais il est singulier parce qu’il s’inscrit dans une histoire singulière. Et dans quelle histoire s’inscrit le charisme de la communauté si ce n’est dans l’histoire de son fondateur ?
D’où vient l’idée du Père Lamy de confier la congrégation au Cœur Immaculé de Marie Refuge des Pécheurs ?
C’est tout d’abord une démarche qu’il a faite lui-même en 1911 lorsqu’il a confié la paroisse de la Courneuve dont il avait eu la charge à cette intercession particulière de Marie, faisant écho à ce qui avait été vécu le siècle antérieur – en 1836 - quand l’Abbé Desgenettes avait confié sa paroisse Notre-Dame des Victoires au Cœur Immaculé de Marie. Découragé, il voyait que les gens d’adonnaient au négoce et aux choses de ce monde et ne se tournaient par vers Dieu, quelque chose de somme toute très actuel.
Et lorsqu’il a fait cette démarche de confier sa paroisse au Cœur Immaculé de Marie, des conversions sont arrivées par centaines, et de 50, ce fut 500, 1000 personnes qui participaient par office et se mirent à participer à la vie de la paroisse…
C’est parce que Marie, à travers Son Cœur Immaculé, est donnée comme un remède à la désespérance, au découragement.
Notre fondateur a expérimenté le découragement à plusieurs reprises : non seulement il le ressentait parfois dans sa paroisse, mais aussi au moment de fonder la congrégation. Vous le savez, en 1909, il reçut cette intuition, cette demande de la Vierge Marie dans expérience mystique : celle de fonder la congrégation ainsi qu’un pèlerinage. Il a cependant tardé : il ne sentait pas à la hauteur, revendiquant ses origines modestes de la Haute Saône - cela ferait-il de lui un bon fondateur ?- et à travers ces hésitations du Père Lamy, nous reconnaissons aussi celles de notre communauté aujourd’hui. On peut constater parfois aussi ce manque de confiance dans la grâce qui nous a été donnée.
Cette grâce d’être serviteur de l’œuvre de Dieu dans le cœur de ceux qui nous approchent. Et de fait, voici deux preuves que cette intuition mystique qui a été donnée au Père Lamy véritable :
- Ce pèlerinage à Notre-Dame des Bois, près de Langres, existe toujours,
- L’existence de la communauté, bien entourée des fidèles que vous êtes.
Avec le Père Lamy, nous pouvons croire que cette parole n’est pas simplement le fruit de quelques personnes plus ou moins équilibrées : il y a une vraie intuition, quelque chose de véritable donné à notre temps.
Il est intéressant de voir que l’Abbé Desgenettes qui était curé de Notre-Dame des Victoires, le premier à avoir eu cette motion intérieure mystique de confier ainsi sa paroisse dans un monde - celui du XIXe siècle - marqué par le rigorisme moral, il fallait oser ainsi mettre la miséricorde au cœur de la vie paroissiale ! Ensuite, cela a connu le succès que nous savons.
Pour le Père Lamy, c’est pareil : il a mis la miséricorde au cœur de sa paroisse, et cela a porté des grands fruits à partir de 1911.
Nous sommes aussi appelés à être serviteurs en mettant la miséricorde au cœur de notre apostolat, de notre ministère. Nous sommes disponibles pour les jeunes, car c’était le désir de notre fondateur. Ce n’est pas exclusif, mais à travers cela, il y a quelque chose qui est donné à notre temps.
Ce découragement peut aussi gagner notre temps, comme il peut gagner notre communauté. Il y a peut-être une tentation, un combat spirituel à donner à travers notre fête patronale : « Votre combat sera de ne pas vous décourager ». De fait, les motifs de découragement ne manquent pas.
Nous pouvons constater que les motifs de découragement ne manquent pas, que ce soit en se regardant soi-même, et à plus forte raison autour de nous.
Mais, en Marie, le Seigneur nous dit que le découragement n’est pas le plan de Dieu. C’est l’œuvre du démon de nous faire perdre confiance que l’œuvre de Dieu s’accomplit en nous et autour de nous, quoi qu’il advienne, quoi qu’il paraisse.
Nous sommes serviteurs des desseins de Dieu de ce point de vue là.
Et Marie est bien plus qu’un modèle. Bien souvent, on rappelle dans notre règle : « Marie comme modèle. » Certes, et cela fait écho au Concile. Mais, Elle est plus qu’un modèle : Elle est une pédagogie, une méthode que Dieu nous donne. Cela signifie que Marie est celle qui, dans notre humanité, a rouvert la porte à l’Espérance.
Dans une humanité touchée par le péché de génération en génération – à commencer par le péché originel - Marie est cette irruption d’une nouveauté qui redonne l’Espérance à l’Humanité toute entière : nous ne sommes pas livrés à nos psychologies blessées, à nos travers et à nos vices… Non : il y a quelque chose de bien plus grand qui habite le cœur de Dieu dans Sa vision sur la personne humaine, et c’est en Marie que cela se manifeste.
Donc, si Marie est un modèle donné pour toute l’Église, Elle est pour nous cette pédagogue, cette méthode que Dieu nous donne pour nous approcher de chaque âme de façon à ne pas être des idéologues. Et le fait qu’il n’y ait pas d’idéologue parmi nous est une grâce de la communauté. Dans les principes de l’idéologue, tout est simple. Si vous commencez à raisonner dans les principes philosophiques et théologiques, tout s’huile de façon parfaitement claire et limpide. Mais, quand on rentre dans l’humanité et dans le cœur de chacun, ça devient plus complexe, et l’œuvre de la miséricorde de Dieu prend toute son ampleur : elle tient en compte chacun de façon personnelle.
Dans l’Evangile, on voit bien qu’il y a une multitude de rencontres personnelles qui manifestent l’œuvre de Dieu et à travers lesquelles Jésus redonne espoir et confiance : Zachée, la Samaritaine, la femme adultère, pour ne citer qu’eux…
Ainsi, nous sommes heureux de pouvoir célébrer cette fête patronale, car elle nous redit qui nous sommes, elle nous revigore dans le combat spirituel qui est le nôtre – et cette lutte contre le découragement peut aussi rejoindre la vôtre, chers frères et sœurs…
Elle nous aide à remettre le curseur sur Marie, car c’est auprès d’elle que l’on va puiser une source d’espérance et de confiance. Regarde Marie, tu verras que c’est l’œuvre de Dieu qui a le dernier mot dans la vie de chacun et dans la vie de l’humanité entière.
Oui, frères et sœurs bien-aimés, nous croyons que notre communauté est belle non pas parce qu’elle est composée de personnes admirables et extraordinaires – nous vous laissons en discerner – mais parce qu’elle est un vrai signe d’espérance pour notre temps. Ainsi, nous avons confiance que l’œuvre de Dieu va jusqu’au bout et qu’elle nous touche de l’intérieur. Certes, il y a un combat – en particulier celui du manque de vocations, qui peut être source de découragement pour les uns et les autres – mais nous pouvons être confiants que notre communauté est un chemin sûr pour ceux qui souhaitent s’engager. C’est un appel que je lance pour ceux qui souhaitent nous rejoindre, j’assure qu’elle est un chemin sûr de sainteté, pour se laisser habiter par l’œuvre de Dieu et la découvrir pour soi-même, d’abord, par ce que nous avons fait les uns les autres. C’est là où notre expérience est pertinente, et que notre parole est légitime : si nous sommes en communauté, c’est parce que nous avons fait l’expérience de l’œuvre de Dieu en nous, et que, bien au-delà de notre misère, nous avons fait l’expérience de Sa miséricorde en nous. Et ainsi, nous pouvons – en premier lieu auprès des jeunes, mais pas exclusivement - l’annoncer auprès des jeunes.
C’est une mission enthousiasmante, un champ extraordinaire qui s’ouvre à nous. Comme le dit Jésus :
« La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux. »
C’est pourquoi nous demandons au Seigneur de façon insistante : « Donne-nous des ouvriers pour cette moisson qui est une bonne nouvelle pour notre temps, et dont notre monde a besoin. »
C’est ce dont l’Eglise témoigne de façon universelle et ce dont nous voulons témoigner singulière à travers notre charisme, par notre consécration.
Ainsi, nous nous confions à votre prière, demandant que le Seigneur nous rende fidèles, car c’est sur la fidélité que peut peser le découragement.
Que cet éventuel découragement face au manque de pratique, à une certaine manifestation du désintérêt de la Foi de nos contemporains nous appelle à un combat spirituel et intérieur. Et Marie nous est donnée avec ces paroles encourageantes : "Regarde ce que Dieu a fait en moi – de façon unique, car il n’y - Il veut le faire aussi en toi de façon particulière."
Et nous, comme Serviteurs de Jésus et de Marie, nous portons ce beau nom de serviteurs, et nous voulons redire à chacun : « Regarde l’œuvre de Dieu en toi !"
Nous sommes à ce service-là pour que vous puissiez devenir témoin d’un dieu qui nous appelle des ténèbres à Son admirable lumière,
Amen !
Références des lectures du jour :
- Livre de la Sagesse 11, 23 - 12, 2.
- Psaume 1 Sam 2.
- Première lettre de saint Paul Apôtre aux Romains 5,12. 17 à 19.
- Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 1, 18-25 :
Voici quelle fut l’origine de Jésus-Christ : Marie, la mère de Jésus, avait été accordée en mariage à Joseph.
Or, avant qu’ils aient habité ensemble, elle fut enceinte par l’action de l’Esprit-Saint. Joseph, son époux, qui était un homme juste, ne voulait pas la dénoncer publiquement. Il décida de la répudier en secret.
Il avait formé ce projet lorsque l’Ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit :
« Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie ton épouse. L’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit-Saint. Elle mettra au monde un fils auquel tu donnera le nom de Jésus, c’est à dire, " Le Seigneur sauve ". Car, c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés ».
Tout cela arriva pour que s’accomplit la parole du Seigneur prononcée par le prophète :
« Voici que la vierge concevra et elle mettra au monde un fils auquel on donnera le nom d’Emmanuel, qui se traduit : " Dieu avec nous." »Quand Joseph se réveilla, il fit ce que l’Ange du Seigneur lui avait prescrit : il prit chez lui son épouse