La consécration de la Communauté au Cœur Immaculé de Marie

Un acte fondateur de la conmmunauté

Le 17 janvier, à l’occasion de notre fête patronale, nous avons conclu notre centenaire par un acte de consécration solennel dans chacune de nos maisons. Revenons en quelques mots sur le sens de cet événement.


La Consécration au Cœur Immaculé de Marie : une dévotion née d’un découragement

Coeur Immaculé de Marie


La fête du Cœur Immaculé de Marie, Refuge des pécheurs tient son origine dans le découragement d’un prêtre.
En voici le texte : « […] Une pensée vint saisir mon esprit. C’était la pensée de l’inutilité de mon ministère dans cette paroisse ; elle ne m’était pas étrangère, je n’avais que trop d’occasions de la concevoir et de me la rappeler. Mais dans cette circonstance elle me frappa plus vivement qu’à l’ordinaire. »

Tel est l’état d’esprit de l’abbé Desgenettes, curé de Notre-Dame des Victoires (Paris) au moment même où il s’apprête à monter à l’autel pour célébrer la messe le 3 décembre 1836. En réponse à ce découragement, il entend alors cette locution intérieure à plusieurs reprises :

« Consacre ta paroisse au très saint et immaculé Cœur de Marie ! »

Mû par cette voix intérieure, le curé consacre sa paroisse la semaine suivante. Malgré la très petite diffusion de son appel, non seulement des foules fréquentent aussitôt la paroisse mais le curé a la joie d’être le témoin du retour à Dieu de nombreux ’gros poissons’. L’abbé Desgenettes témoigne que le jour même où il invita ses paroissiens à la petite cérémonie de l’après-midi : « La divine bonté daigna relever notre courage abattu. Nous fûmes suivis en rentrant dans la sacristie par deux négociants, pères de famille, nos paroissiens, que nous n’avions guère l’habitude de voir à l’église. Tous deux nous proposèrent d’entendre leur confession, tous deux ont persévéré, et sont aujourd’hui des chrétiens édifiants. »

C’est tout naturellement que le père Lamy, notre fondateur, entend parler de cette dévotion qui s’est développée à partir de Notre-Dame des Victoires.
Devenu curé de la Courneuve, il introduit et développe cette dévotion chez ses ouailles. La proximité géographique explique l’influence du sanctuaire parisien sur cette paroisse de la banlieue naissante, mais c’est surtout le même contexte difficile qui conduit le Père Lamy à recourir à cette consécration.
Le Père Lamy témoignera plus tard des fruits de cette dévotion à l’occasion d’une visite canonique en 1906 en affirmant que tous les événements décisifs de sa paroisse eurent lieu le jour de la fête du Cœur Immaculé.

Que pouvons-nous retenir de ces événements ?

La vraie fécondité de la vie chrétienne passe par l’accueil de la Mère de Dieu.
Il est remarquable que l’évangile est comme encadré par deux invitations à prendre Marie chez soi : celle à saint Joseph au seuil de l’incarnation « Ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse ! » et celle au disciple bien-aimé « Voici ta mère » au moment où Jésus s’apprête à rendre l’esprit.
La piété mariale trouve son origine en cette invitation adressée à saint Joseph et saint Jean et nous est donnée en héritage. Notre Règle de Vie traduit cette invitation par ces mots : « Jésus nous appelle à lui jusqu’à nous faire partager son amour filial pour sa Mère et nous charger de révéler le don qu’il fait d’Elle aux hommes. » Pour atteindre la plénitude de la stature du Christ, pour croître dans l’ordre de la grâce, il faut vivre dans l’intimité de la Mère de Dieu. C’est l’expérience de l’abbé Desgenettes et du père Lamy : ils désespèrent de l’inutilité de leurs efforts… Ils invoquent Marie… Une fécondité inespérée leur est donnée.

Cette expérience est une bonne nouvelle pour chacun d’entre nous ! Car nous pouvons être visité par l’épreuve comme ces deux curés ; épreuves de la séparation d’avec un être cher, de la sensation d’être oublié, de l’inutilité de nos efforts, du vieillissement, de la difficulté de transmettre ce que nous avons reçu, de l’incompréhension face à nos propres réactions… Dans ces situations, nous recherchons du sens. En emboitant le pas du père Lamy, attention, cependant de ne pas confondre fécondité et succès ou solution magique. Il s’agit d’une fécondité dans l’ordre de la grâce.

Contemplons le Maître : à nos yeux de chair, Jésus en croix semble vivre un échec total alors que c’est précisément là que son action est la plus féconde.
Cette croix, il l’a profondément désirée car il sait que par son obéissance, il est source de salut pour l’humanité entière. C’est l’amour qui le tient, ce ne sont pas les clous. Marie, en bonne disciple du Seigneur, nous apprend à rester ferme dans la foi pour qu’ils aient la vie. L’évangile nous enseigne qu’elle est là, debout, au pied de la croix, non pas prostrée dans la douleur mais solide dans la confiance. À son exemple, la fécondité à laquelle nous devons aspirer passe par le fait de garder la foi alors que tout s’écroule autour de nous, persévérer dans l’espérance alors que tous ont renoncé, poser des actes d’amour, signes du Royaume, alors que tout semble perdu.

Lys


Récemment je partageais ma surprise avec le père Jean de ce que la piété mariale n’est jamais acquise, elle reste toujours à conquérir.
Nous pensons avoir fait ce qu’il faut : nous prions quelques dizaines de chapelet, nous allumons une bougie de temps à autre devant une image pieuse, nous avons fait sérieusement par le passé un acte de consécration… et rapidement nous oublions ! La vraie consécration doit être sans cesse ranimée non seulement par des prières mais par des actes. Il s’agit de demander à la Mère de Dieu de nous façonner à l’image de son fils en développant ses vertus.

Détaillons quelques-unes de ces dispositions :

  • Vivre dans une entière dépendance à son égard tout comme elle-même l’a vécu. Jean Paul II nous donne l’exemple de cette confiance, lui qui avait pris comme devise de son pontificat : Totus tuum, ’(je suis) tout à toi !’. Cette entière dépendance vis à vis de la Mère de Dieu se traduit par un entier abandon à la Providence. « Cherchez d’abord son royaume et sa justice, et tout le reste vous sera donné en plus. Cessez de vous inquiéter pour demain et demain s’inquiétera pour lui-même : à chaque jour suffit sa peine. »
  • Avoir au cœur une vraie Espérance. Nos péchés nous conduisent souvent à désespérer. Quelquefois, tous nos repères s’effondrent. C’est précisément là que commencent l’Espérance. « Je sais que ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni les forces du monde, ni le présent, ni le futur, ni les puissances du ciel ou de l’enfer ou quelque autre créature ne peut nous priver de cet amour de Dieu dans le Christ Jésus notre Seigneur. »
  • Faire de l’Esprit-Saint notre loi. C’est le cœur de la vie chrétienne : nous laisser pousser par les dons de l’Esprit afin d’en porter les fruits. « Les fruits de l’Esprit sont : amour, joie, paix, largeur d’esprit, générosité, bonté, foi, douceur, maîtrise de soi. Ce sont des choses qu’aucune loi ne condamne. Et de fait, ceux qui appartiennent au Christ ont crucifié la chair avec ses mouvements et ses désirs. Si nous vivons par l’Esprit, vivons comme des spirituels : renonçons à la vaine gloire, cessons de vouloir être les premiers et de jalouser les autres. »
  • Devenir des apôtres, là où nous sommes. Quand nous éduquons un enfant dans la foi, quand nous donnons la catéchèse, quand nous conseillons quelqu’un, quand nos actes se font bonne nouvelle, la fécondité de notre action dépendra de l’intensité de la grâce dont nous aurons bénéficié. Or, pour trouver la grâce, il faut trouver Marie, enseigne saint Louis-Marie Grignion de Montfort.
  • Enfin, annoncer le Royaume aux pauvres. La Bonne Nouvelle trouve un terrain de prédilection dans le cœur de ceux qui sont rejetés, méprisés. L’Évangile n’est pas pour les ’gens bien comme il faut’ mais pour ceux qui sont loin. « Je ne suis pas venu, moi, pour appeler des justes mais des pécheurs. » Il est remarquable que la dévotion au Cœur Immaculé de Marie, Refuge des pécheurs s’est développée avec le retour à Dieu de grands pécheurs.

Nous pourrions développer encore et encore les fruits d’une vraie piété envers la Vierge Marie. Arrêtons-nous sur cette dernière disposition. Cette annonce à ceux qui sont le plus loin est à mettre en relation avec l’identité de notre communauté. Sans doute est-ce la raison pour laquelle le père Lamy a choisi le Cœur Immaculé de Marie pour en faire notre fête patronale.
Notre charisme y est exprimé et illustré : Révéler Marie comme chemin de la Miséricorde du Père.