Homélie du deuxième dimanche du Carême

9 mars 2020

« Quand ils entendirent cela, les disciples tombèrent face contre terre et furent saisis d’une grande crainte. Jésus s’approcha, les toucha et leur dit : « Relevez-vous et soyez sans crainte ! »
Levant les yeux, ils ne virent plus personne, sinon lui, Jésus, seul. »

Écouter l’homélie

Texte de l’homélie :

Dans la prière d’ouverture, nous avons pris acte qu’il fallait écouter le Fils bien-aimé. Et nous avons demandé : « Fais-nous trouver dans Ta parole les vivres dont notre Foi a besoin. »
Cherchons alors ces vivres tout d’abord avec Abraham : que nous enseigne-t-il dans le récit du début de sa vocation ? Peut-être en premier lieu qu’il nous faut repartir, refaire mémoire de notre propre vocation, de notre premier appel.
En réunissant ses prêtres au début du Carême, l’évêque les invitait à relire ce premier appel, comme Jean dans l’Apocalypse : à travers lui, l’Esprit-Saint appelle l’Eglise d’Ephèse à se souvenir de son premier amour, de ce premier élan.

Pour nous arracher aux ténèbres, au monde sujet à la violence et à la convoitise, cette première parole adressée à Abraham ainsi - qu’à nous – est : « Quitte ton pays, va pour toi-même, avance… »
Et il doit partir des bords de l’Euphrate pour aller vers le pays de Canaan, c’est à dire, comme le dit le pape François, pour aller aux périphéries.

Au lieu d’avoir sa vie toute programmée suivant sa pensée propre et de celle de sa famille, Abraham va rentrer dans la vie comme dans une aventure. Et il va découvrir petit à petit cette vie avec le Seigneur, cette vie conduite par l’Esprit Saint. Elle n’est pas toute gagnée pour lui : nous voyons qu’il a besoin de grandir, qu’il fait des erreurs, nous voyons qu’il passe par des impasses. Mais, le Seigneur va le modeler petit à petit.
Et une leçon que nous pouvons en tirer pour faire vivre notre Foi est de demander d’entrer dans ce dialogue où nous ne vivons pas seulement sur nos acquis, mais où nous nous laissons enseigner par le Seigneur.

Avec le psaume et son refrain, nous voyons combien notre vie est appelée à être ce dialogue avec le Seigneur.

« Que Ton amour soit sur nous comme notre espoir est en Toi ! »

Il nous faut apprendre à recevoir notre pain de la parole de Dieu, du Seigneur. Et cela met en relief la première lecture – comme toujours, même s’il faut creuser un peu pour le trouver – qui donne cette bénédiction :

« Je te bénirai et je bénirai ceux qui te béniront… »

Encore une fois, c’est notre vie qui est en dialogue avec le Seigneur, en dialogue du Seigneur avec les uns et les autres, dans un échange constant.

Il y a énormément de choses dans cet évangile. Et s’il faut en choisir une, quel vivre pourrions-nous en retirer ? d’abord, dans cette version, on les voit se retrouver avec Jésus seul. Dans cette expérience de la Transfiguration, ils ont vu à la fois tout le passé et tout le futur : ils ont été invités à voir en Jésus combien Il récapitulait la personne du Messie annoncé.
Rien qu’à travers cette petite phrase, nous avons toutes les figures du Messie :

« Celui-ci est Mon Fils bien-aimé en qui je trouve toute ma joie, écoutez-Le »

  • « Mon Fils » appelé comme un roi, nommé comme un pasteur qui guide le peuple,
  • « Bien-aimé en qui je trouve toute ma joie », « en qui j’ai mis mon choix » – dira-t-il aussi - évoque le chant du serviteur d’Isaïe, ce serviteur comme lumière des nations, mais aussi ce serviteur souffrant tel qu’Isaïe décrit également
  • « Ecoutez-Le ! », c’est Lui qui donne la Loi, c’est ce qui a été dit dans le Deutéronome au chapitre 18 de Moïse :

    « C’est lui que vous écoutez. »

C’est Lui qui parlera, comme il a été annoncé pour venir comme Moïse : c’est Lui qui est annoncé.
Comme Jésus le reprendra d’ailleurs sur le chemin d’Emmaüs à travers Moïse et Elie, toute la Loi reprend la personne de Jésus accomplie, on seulement dans ce qui saute aux yeux, mais encore plus avec l’annonce de la Croix. Saint Luc le dit : Il parle de Son exode, de Son passage à Jérusalem, Il parle de Sa mort et c’est ce chemin vers Pâques que nous prenons.
Les tentes reprennent le passé et l’avenir dans la dimension eschatologique, c’est à dire qu’elles représentent les demeures du Ciel que Jésus va préparer tout autour de Lui pour Son peuple.
Mais cela passe par cette vie, par cette annonce de l’Evangile.

Et nous sommes appelés à toujours recentrer notre regard vers Jésus et à rentrer dans cette lumière extraordinaire, à ne pas inventer un Messier suivant nos schémas mais à recevoir ce Messie qu va passer, par le Passion, par prendre sur Lui le péché du monde comme un agneau. PUIssions-nous unir notre vie à ce chemin de Jésus.

Que pouvons-nous encore retirer comme vivre pour vivre notre Foi ?
La deuxième lecture est encadrée par deux figures identiques :

  • « Prends ta part des souffrances liées à l’Evangile. » avec Jésus.
  • « Il a fait resplendir la vie et l’immortalité par l’annonce de l’Evangile ».

Nous voyons là encore cette annonce : Dieu nous a sauvés, Dieu nous a libérés. C’est une chose qu’Il fait en Jésus. Mais dans ce temps du Carême, nous demandons de marcher avec Lui et nous savons que nous progressons et nous ouvrons nos cœurs pour ce salut qui ne dépend pas de nous nous et qui nous est déjà acquis. Que nous puissions Lui ouvrir les portes toujours plus profondément. C’est notre défi du Carême : mettons-nous en marche avec Abraham, avec tout le peuple de Dieu.

Que cette grâce qui nous est déjà donnée, devenue visible en Jésus, qu’elle soit visible en nous aussi. Demandons-le par la grâce de Dieu,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre de la Genèse 12,1-4a.
  • Psaume 33(32),4-5.18-19.20.22.
  • Deuxième lettre de saint Paul Apôtre à Timothée 1,8b-10.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 17,1-9 :

En ce temps-là, Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère, et il les emmena à l’écart, sur une haute montagne.
Il fut transfiguré devant eux ; son visage devint brillant comme le soleil, et ses vêtements, blancs comme la lumière.
Voici que leur apparurent Moïse et Élie, qui s’entretenaient avec lui.
Pierre alors prit la parole et dit à Jésus : « Seigneur, il est bon que nous soyons ici ! Si tu le veux, je vais dresser ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. »
Il parlait encore, lorsqu’une nuée lumineuse les couvrit de son ombre, et voici que, de la nuée, une voix disait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie : écoutez-le ! »
Quand ils entendirent cela, les disciples tombèrent face contre terre et furent saisis d’une grande crainte. Jésus s’approcha, les toucha et leur dit : « Relevez-vous et soyez sans crainte ! »
Levant les yeux, ils ne virent plus personne, sinon lui, Jésus, seul.

En descendant de la montagne, Jésus leur donna cet ordre : « Ne parlez de cette vision à personne, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts. »