Homélie du deuxième dimanche de l’Avent

6 décembre 2021

« Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers. Tout ravin sera comblé, toute montagne et toute colline seront abaissées ; les passages tortueux deviendront droits, les chemins rocailleux seront aplanis ; et tout être vivant verra le salut de Dieu. »

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Texte de l’homélie :

Mille neuf cent quarante, c’est la débâcle de la France. Des peuples sont vaincus démoralisés, pieds et poings liés, livrés à l’ennemi - comme le disait un homme politique - face à un adversaire déterminé. Et comme poursuit cet homme politique : « la France vit à terre, mais elle vit toujours. »
Mais cette France sait bien qu’elle ne veut pas se relever toute seule. Alors, on appelle à la rescousse mille forces immenses matérielles et morales qui se lèveront un jour pour écraser les ennemis. Il faut qu’il y ait un soleil, il faut qu’il y ait une espérance.

Bref, en France, on appelle un salut qui doit venir d’outre-atlantique mais qui tarde à venir. Et quand ce peuple d’outre-atlantique décide de rentrer en lice, de rentrer dans la guerre, cela va susciter une immense joie, une immense espérance qui va vivifier tous les réseaux de résistance et animé d’une force nouvelle tous ceux qui aiment leur pays.

J’aime cette image parce qu’elle permet de mieux comprendre les textes d’aujourd’hui. Que nous disent-ils en filigrane ? Ils nous disent que l’humanité a été terrassée par un ennemi, elle vit à terre mais elle vit toujours. Elle ne peut pas se relever sans que quelque chose intervienne.

Une foi qui espère

Et justement, le prophète nous dit aujourd’hui que Dieu a décidé de rentrer en guerre, et, si vous me permettez cette image un peu osée, Il a décidé de « faire son débarquement ». C’est ce que dit la première lecture : Dieu a décidé que les hautes montagnes et les collines éternelles seraient abaissées sur l’ordre de Dieu les arbres des forêts produiront ce cet ombrage
Puis, dans la deuxième lecture, Saint Paul déclare qu’il est sûr que ce salut va arriver.

Dans les temps où nous sommes, je crois que c’est très important de déclarer que Dieu veut notre Salut, et que ce Salut va se réaliser infailliblement à la manière de Dieu. Et l’avant c’est le moment on se souvient de cette décision de Dieu cette décision qui va se concrétiser.

Pourquoi est-ce important de se souvenir de ceci pendant le temps de l’Avent ? C’est parce que cette décision de Dieu c’est le fondement ultime de notre joie.

Mais, comment Dieu intervient-Il dans notre vie ? Certes, les États-Unis fabriquent beaucoup de grands bateaux et de beaux avions à trois ou quatre mille kilomètres de l’autre côté de l’Atlantique. Et, cela ne nous sert à rien tant que cela se passe loin de nous : les entraînements sur les terrains militaires peuvent être prêts à intervenir, ce qu’il faut, c’est que tout cela s’approche et que la distance soit franchie.
Pour prendre une autre image, à quoi nous servirait le soleil s’il brûle à quelques milliards de kilomètres plus loin ? Notre terre serait dans le froid, on ne pourrait pas vivre.

Rappelons-nous alors qu’avec l’Incarnation du Seigneur, c’est Dieu qui s’approche, Dieu qui franchit l’Atlantique, le soleil qui se rapproche pour réchauffer notre terre.
A ce sujet, le chapitre de Saint Luc est extraordinaire, c’est un grand littérateur. On le voit particulièrement au début du chapitre trois lorsqu’il décrit l’avènement du Seigneur en évoquant tous ces noms compliqués : Lysanias , Philippe, Hérode… et il veut montrer que tout est préparé : le pouvoir politique, le pouvoir religieux, et tous préparent un nouvel âge d’or. C’est un nouvel âge d’or que veut évoquer Saint Luc. Quelqu’un viendra et on lui a préparé le terrain. Et en effet, il faut préparer le terrain pour que Dieu puisse intervenir. Et pour reprendre notre métaphore, il a fallu que la résistance prépare le terrain pour que le débarquement puisse avoir lieu.

Alors, soyons un peu honnête : est-ce que nous préparons le terrain au Bon Dieu ? est-ce que l’on est si content que cela qu’Il s’approche de nous et qu’Il nous sauve ? Et on va essayer de voir un peu quelles peuvent être les façons que nous avons de remettre la proposition du Salut à plus tard. Est-ce que nous désirons intimement plus que tout d’être sauvés par le Seigneur ?

Pour qu’un feu brûle, il faut en avoir un contact direct. Or, aujourd’hui, il me semble que parfois le christianisme devient trop un ensemble d’idées, de valeurs, une sorte d’identité mais ce n’est plus la personne vivante du Christ. C’est comme si pour se réchauffer on avait la photo du feu. Est-ce qu’une photo de feu ça réchauffe ? Pas vraiment.
Il faut donc que ce christianisme décidé devienne un christianisme concret.

Mais, comment cela va-t-il se faire ? Il faut que notre foi soit aussi une Foi qui espère ! Nous sommes parfois très forts pour le dogme : on sait tout de dieu mais on n’attend rien de Lui.

Une foi qui espère

C’est-à-dire que l’on veut que Jésus intervienne concrètement dans les situations de notre vie quotidienne, et on le Lui demande avec instance : cette situation difficile dans mon travail, les dégradations des relations dans mon couple quand cela devient difficile et que l’on arrive plus à communiquer, les situations compliquées d’éducation dans lesquelles je ne comprends plus mes adolescents, où ils m’échappent. « Seigneur, interviens ! viens ! »
Et peut-être aussi quand on regarde notre pays, ce délabrement moral qui nous qui nous fait souffrir : est-ce que je crois vraiment que Dieu peut intervenir là-dedans, qu’il y a des intercesseurs prodigieux qui sont les saints – et nous en avons de nombreux en France. Est-ce qu’on les supplie ? non pas simplement pour sauver une identité mais parce que pour que renaisse ce brasier et cette beauté du Christ vivant au milieu de nous dans notre nation et dans nos familles.

Voilà je pense que si beaucoup de gens sont déprimés, c’est parce que Dieu est devenu plus « une idée » qu’une personne vivante et aimante.

Comment cela va se faire et bien justement par la prière ! Notre prière, c’est justement ce qui fait de Dieu cette personne vivante. Si nous ne prions pas Dieu, Il reste comme une entité rationnellement satisfaisante peut-être mais pas plus. J’aime cette phrase du Père Lamy. Il dit ceci :

« Qu’est-ce que la prière, sinon la toute puissance de Dieu mise à notre service. »

Oui, la prière est la toute puissance de Dieu mise à notre service ! Est-ce que nous le croyons vraiment ? la prière est puissante parce que Dieu est puissant !
Souvenez-vous de cette image ou plutôt de ce fait du dix-neuvième siècle dans l’apparition de la Vierge-Marie à Sainte Catherine Labouré. On se rappelle de la Sainte Vierge avec Ses mains dont sortent des rayons. Comme vous vous en souvenez, certains des rayons sont allumés et d’autres éteints. Catherine demande alors pourquoi cette différence entre les rayons et la Vierge-Marie répond que les rayons éteints correspondent à toutes les grâces qu’on ne me demande pas et pour lesquelles on ne supplie pas assez, et moi le premier….

En occident, on est devenu très auto-suffisant, on sait très bien se débrouiller dans la vie, on a une économie qui ne fonctionne pas mal, si on la compare avec celle d’autres pays du reste du monde. Alors, on en déduit que l’on a pas besoin de Dieu, on ferme la trappe, on ferme le couvercle et entre Dieu et nous, il y a ce plafond qui fermé parce qu’on supplie plus…

Comment allons-nous faire pour que cette Foi puisse grandir, cette Foi qui espère c’est le contact intime avec la parole de Dieu. Elle nous manque trop !

Un contact intime avec la Parole de Dieu

Vous souvenez-vous de ce que dit Saint Paul ?

« La foi naît de ce que l’on n’entend. »

Si on n’entend pas cette parole, la foi est anémie, elle est malade, elle est faible. Et ce contact avec la parole de Dieu, pas simplement le dimanche à la messe, pas simplement au passage en en attrapant un petit bout peut-être, un contact intime, vivant et quotidien avec la Parole. Il ne s’agit pas de la lire « pour l’avoir lue », ce serait terrible, mais pour la lire, comme quand on rencontre un ami pour le rencontrer, et non pas pour l’avoir rencontré. A quoi ça nous sert ? c’est une insulte si on fait ça à ses paroles ou à cette ami…

Donc, il nous faut la prière, un contact avec la Parole. Troisièmement, il nous faut aussi entrer dans une attitude de conversion.

Une conversion en profondeur

Il y a peut-être aussi dans notre cœur des choses qui font obstacle à Dieu. On ne prépare pas ce « débarquement », on est un petit peu fermé sur soi-même. Qu’est-ce que signifie : « il faut ôter les obstacles ! » comme le dit Jean-Baptiste à ceux qui viennent le trouver, aux militaires qui sont violents avec les populations ?

Il nous faut débusquer dans notre cœur tout ce qui est connivence avec le péché. Il y a parfois des péchés qu’on se permet et qu’on dénonce pas. Hier, nous sommes allés avec les ados dans la maison Notre-Dame de Consolation. Et en ouvrant un tiroir, nous avons trouvé une souris ! Alors, après le film, une fois que les jeunes étaient partis, j’ai essayé de lui courir après pour la mettre dehors. Mais comme elle est forte, je n’y suis pas arrivé ! Et je me suis alors dit que c’était une bonne image du péché qui dans notre cœur, qu’on dénonce pas. C’est comme d’avoir cette petite souris chez soi, de ranger de la nourriture saine qui va être mangée ou salie car elle va passer partout. Les réserves risquent d’être grignotées de l’intérieur sans que je n’en sache rien. Et c’est la même chose avec le péché : je vais être mangé de l’intérieur.
C’est bien pour cela qu’il faut mettre la souris dehors puisqu’elle est très bien dans la nature mais très mal dans la maison. Le péché, lui, est très bien en enfer mais il n’est pas à sa place dans mon cœur.

Ainsi, interrogeons-nous sur ce qui n’est pas à sa place dans notre cœur : la dureté avec mon épouse, peut-être, cette paresse qui habite mon cœur, ou bien encore cette difficulté de caractère que j’ai avec tous ceux qui m’entourent, ce désir de dominer… à nous de voir, et moi le premier encore une fois !
L’Avent sert donc à ôter les obstacles, sinon ça veut rien dire.

La pénitence

Enfin, une dernière chose : il ne faut pas oublier la pénitence. Savez-vous comment faire pour qu’un feu s’alimente ? il faut y mettre du bois. S’il n’y en a pas, le feu s’éteint. Ainsi, petites pénitences sont le bois que l’on met dans le feu. Cela peut être un petit effort de caractère, cette petite privation volontaire de jeux vidéo, ce petit moment de prière supplémentaire : voilà tout le bois que nous pouvons ajouter au feu.

Chers frères et sœurs, demandons cette Foi qui espère, ce contact intime avec la Parole de Dieu, cette conversion et cette pénitence. Alors la puissance de Dieu va traverser notre vie et puis peut-être qu’elle changera le monde !
Demandons toutes ces grâces à la Vierge-Marie,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre de Baruch 5,1-9.
  • Psaume 126(125),1-2ab.2cd-3.4-5.6.
  • Lettre de saint Paul Apôtre aux Philippiens 1,4-6.8-11.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 3,1-6 :

L’an quinze du règne de l’empereur Tibère, Ponce Pilate étant gouverneur de la Judée, Hérode étant alors au pouvoir en Galilée, son frère Philippe dans le pays d’Iturée et de Traconitide, Lysanias en Abilène, les grands prêtres étant Hanne et Caïphe, la parole de Dieu fut adressée dans le désert à Jean, le fils de Zacharie.
Il parcourut toute la région du Jourdain, en proclamant un baptême de conversion pour le pardon des péchés, comme il est écrit dans le livre des oracles d’Isaïe, le prophète : « Voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers. Tout ravin sera comblé, toute montagne et toute colline seront abaissées ; les passages tortueux deviendront droits, les chemins rocailleux seront aplanis ; et tout être vivant verra le salut de Dieu. »