Homélie du 13e dimanche du Temps Ordinaire

1er juillet 2020

« Et celui qui donnera à boire, même un simple verre d’eau fraîche, à l’un de ces petits en sa qualité de disciple, amen, je vous le dis : non, il ne perdra pas sa récompense. »

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Texte de l’homélie :

Dans les moments troublés de doute ou de remise en cause, la société occidentale - et en son sein les Chrétiens eux-mêmes - peuvent être tentés d’oublier l’Évangile pour se tourner vers des pseudo-révélations, croire des prophéties frelatées, s’abandonner à tout vent de doctrine, selon les idéologies et les modes du moment.
Au lieu de se nourrir de la doctrine solide transmise et communiquée par la Tradition qui remonte aux Apôtres eux-mêmes, au lieu de se mettre à l’école de la prédication des Pères de l’Église et des Docteurs de la foi, on joue à se faire peur en prévoyant la fin du monde pour la semaine prochaine.
Ce fut le cas dès la première prédication de l’Évangile, puis autour de l’an 1000, après la Révolution française, à l’occasion de grands conflits mondiaux et encore aujourd’hui.

Certes il ne s’agit pas de minimiser la présence du mal en ce monde, ni de tomber dans un optimisme béat, cet optimisme que Georges Bernanos appelait « l’espérance des lâches et des imbéciles ».
Non, il s’agit seulement d’affronter les enjeux du moment et les défis de demain, en Chrétien, c’est-à-dire en baptisé.

Qu’est-ce que le baptême, sinon de passer de la mort à la vie avec le Christ, puisque nous Lui appartenons ? C’est exactement ce que décrit saint Paul :

« Par le baptême, nous avons été unis au Christ Jésus dans sa mort et dans sa résurrection. Nous sommes bien morts avec lui. »

Autrement dit, nous n’avons plus rien à craindre et rien ne saurait nous faire peur. Nous appartenons au Christ ressuscité et Il nous fait participer à Sa victoire sur le péché, sur la mort et sur le démon depuis le jour de notre baptême.

Lorsque Jésus décrit à la fin de l’Évangile ce que sera tout à la fois le destin de Jérusalem au bout d’une génération et celui du monde à la fin de toutes les générations, Il ne dit rien qui puisse nous effrayer ou nous émouvoir, puisque nous sommes déjà passés de la mort à la vie et que nous avons en nous le Saint-Esprit qui est promesse déjà commencée et réalisée de résurrection et de vie éternelle.

Et ce qui est vrai de chaque Chrétien l’est aussi de toute l’Église. Sa mission est bien d’enseigner avec autorité et de célébrer les sacrements de la foi, sans s’émouvoir par les contradictions et les persécutions.
Certes sa nature est comme obscurcie aux yeux des hommes lorsque ses enfants sont eux-mêmes infidèles à l’Évangile, lorsqu’ils oublient la vérité et les exigences de leur vocation, lorsqu’ils bafouent les commandements de Dieu et de l’Église, lorsqu’ils oublient la doctrine du salut, lorsqu’ils s’embourgeoisent et adoptent la manière de penser et de vivre de la majorité.

Voilà pourquoi il faut aussi qu’en son sein naissent de nombreuses et saintes vocations de prêtres, de religieuses, de consacrés, qui entendent cet appel à tout quitter pour suivre le Seigneur Jésus.

En cette période d’ordinations sacerdotales, prions avec plus d’ardeur le Maitre de la moisson d’envoyer des ouvriers à sa moisson.
Si nous devons affronter depuis soixante ans une crise de vocations sans précédent dans l’histoire de l’Église, c’est bien parce que nos communautés chrétiennes manquent de ferveur et d’enracinement dans la vraie foi. C’est donc d’abord par la prédication, par la liturgie, par le catéchisme qu’il faut commencer cette œuvre de refondation à laquelle nous sommes tous appelés.

Le premier précepte que Notre Seigneur donne à Ses disciples est bien d’enseigner, c’est-à-dire de prêcher ce qu’il faut croire pour être sauvé, les vérités à croire, les commandements à observer, les secours à espérer. Et c’est par l’accueil de la grâce des sacrements, de la vie même de Dieu, que nous sommes rendus capables d’agir comme le Christ, servant nos frères, donnant notre vie pour eux, leur témoignant confiance et estime, les invitant à la conversion pour qu’ils connaissent comme nous la joie du salut.

Tout baptisé, mes bien chers frères, est appelé à ce choix radical, à ne rien préférer au Christ parce que c’est le Christ qui donne valeur à toute notre vie, qui nous permet d’aimer nos parents, nos enfants, nos proches comme ils doivent être aimés.

Si le Verbe de Dieu fait chair est au cœur de notre existence, au centre de notre liberté, de notre intelligence, de notre capacité d’aimer et de comprendre, de notre affectivité et de notre sensibilité, de notre corps et de notre âme, bref, au centre de notre personne, alors nous communions à Sa liberté infinie, nous participons à Son autorité puisque tout pouvoir Lui a été remis au ciel et sur la terre.

Sauvés par lui de l’insignifiance et du désespoir, nous devenons à notre tour des sauveurs dans Le Sauveur ! C’est cela, être catholique.
De même que le Christ met Sa puissance divine et Son autorité qui éclatent dans Ses paroles et dans Ses miracles au service de Sa bonté, de même nous devons mettre au service de tous les dons de nature et de grâce qui nous ont été départis par le plan de la Providence et Sa puissance créatrice. C’est cela, l’évangélisation.

Mais si nous croyons que notre rayonnement apostolique dépend d’un plan, d’une méthode, d’une recette, d’une vision, d’un discours qu’il faudrait réformer, adapter, apprendre pour mieux manipuler ceux à qui nous nous adressons, alors nous sombrons dans ce que les papes du XIXe siècle, de Grégoire XVI à Léon XIII ont condamné constamment et infailliblement, à savoir le naturalisme, la négation de la présence de Dieu dans l’histoire, la confiance excessive dans les moyens humains, l’oubli de l’Évangile comme source d’inspiration indispensable des institutions et des sociétés.
C’est ce qu’a rappelé aussi Saint Jean-Paul II au jour de l’inauguration de son pontificat, en invitant le monde la culture et de la politique à s’ouvrir à la lumière et à la présence du Rédempteur.

Oui, N’ayons pas peur, ouvrons notre porte au Rédempteur et nous passerons réellement de la mort à la vie,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Deuxième livre des Rois 4,8-11.14-16a.
  • Psaume 89(88),2-3.16-17.18-19.
  • Lettre de saint Paul Apôtre aux Romains 6,3-4.8-11.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 10,37-42 :

En ce temps-là, Jésus disait à ses Apôtres :
« Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi ; celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi ; celui qui ne prend pas sa croix et ne me suit pas n’est pas digne de moi.
Qui a trouvé sa vie la perdra ; qui a perdu sa vie à cause de moi la gardera.
Qui vous accueille m’accueille ; et qui m’accueille accueille Celui qui m’a envoyé.
Qui accueille un prophète en sa qualité de prophète recevra une récompense de prophète ; qui accueille un homme juste en sa qualité de juste recevra une récompense de juste.

Et celui qui donnera à boire, même un simple verre d’eau fraîche, à l’un de ces petits en sa qualité de disciple, amen, je vous le dis : non, il ne perdra pas sa récompense. »