Homélie du 11e dimanche du Temps Ordinaire

17 juin 2024

« Celui qui fait la volonté de Dieu, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère. »

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Texte de l’homélie

Frères et sœurs,

Après avoir vécu ces dernières semaines de nombreuses fêtes pour nous expliquer les mystères de la Foi, la liturgie est passée à la couleur verte du temps ordinaire.
Cela tombe bien car aujourd’hui, Jésus nous parle de graines et d’arbres, répondant à merveille aux tonalités environnantes en Picardie en ce moment.

Personnellement, j’aime bien quand un feu passe au vert : c’est le moment où l’on peut passer les vitesses les unes après les autres. Cela peut nous rappeler que ce temps liturgique nous invite à passer la première vitesse et à nous remettre chaque dimanche joyeusement en route avec le Seigneur, et cela pendant plusieurs mois.

Si nous sommes chrétiens, ce n’est pas pour faire du sur place. Cela peut nous arriver par soucis, par souffrance, mais Jésus nous pousse toujours à aller un peu plus loin pour faire de nouvelles expériences avec Dieu.

Rappelez-vous ces dernières paroles de Jésus, Ses dernières recommandations aux apôtres avant de monter au Ciel. Je vous fais confiance, vivez ce que vous avez à vivre dans la joie :

« Le royaume de Dieu est tout proche ! »

Chacun nous le faisons différemment selon notre vocation, mais c’est ce que Dieu nous demande durant ce temps « ordinaire », ce temps couleur verte.

Les deux histoires de ce dimanche sur le règne de Dieu peuvent illustrer ce temps : il y a beaucoup de paraboles que nous connaissons dans les évangiles. Et si Jésus les utilise, c’est justement pour provoquer chacun dans sa liberté - tout en respectant son auditoire - à essayer d’entrer dans cette aventure avec Dieu, dans cette nouvelle expérience du Royaume de Dieu.

Il faut bien comprendre que le Royaume de Dieu n’est pas quelque chose de figé qu’il faut absolument comprendre. Ce n’est pas non plus une définition ni un état avec des frontières, pas plus qu’une métaphore comme la vie après la mort…

Quand Jésus parle du Royaume de Dieu, il faut le considérer comme un déplacement. Le pape François parle d’ailleurs de processus : c’est un mouvement que l’on essaye de faire avec Jésus.

« Le royaume est tout proche, il est au milieu de vous. »

C’est un moment de communiquer avec Jésus, une expérience de surabondance d’amour et de vie avec Lui. Cela renvoie aux Béatitudes et c’est possible ! Cela suppose de laisser la place à Jésus, de Le laisser régner un peu plus dans notre vie. C’est là que l’on découvre le royaume de Dieu, c’est un règne qui ne s’explique pas. Et les deux parabole de ce dimanche nous donnent quelques caractéristiques de ce règne. L’avantage, c’est qu’elles sont très simples, courtes et réconfortantes : parler de plates qui poussent toutes seules, rien de plus évident ni de compliqué ! Même si l’agriculture s’est mécanisée, on voit bien ce dont il s’agit quand on parle d’un semeur… Que les plates poussent et qu’elles produisent habituellement un belle moisson est un fait connu de tous.

Mais, d’un point de vue spirituel, qu’est-ce que Jésus veut nous faire comprendre à travers cette belle image ? C’est que ce Royaume de Dieu que nous ne voyons pas habituellement nous permet d’entrevoir le bien « diffusif de soi », comme le dit Saint Thomas d’Acquin, ce bien qui s’auto-génère en lui-même, c’est une principe. Rien ne peut l’arrêter : quand vous faites du bien, il se multipliera toujours… Mais il faut que ce soit vraiment le bien, avec Jésus.

Il nous le montre par des images avec la graine, l’épi, et cela se fait par des étapes. Nous avons chacun des étapes et des rythmes différents, mais ce qui est réconfortant, c’est que, si nous sommes dans le Royaume de Dieu et que nous faisons le bien avec lui, il va toujours grandir dans notre vie. Il y a toujours plus de bonheur que nous pouvons expérimenter, que nous soyons malades ou en bonne santé, peu importe, le règne de Dieu est tout proche.
Cela ne s’explique pas, cela s’expérimente, on ne sait comment, comme le dit Jésus.

Et en plus, comme le disait le Petit Prince : « L’essentiel est invisible pour les yeux. »
Ce n’est pas évident pour nous d’avoir ce regard qui va au-delà du visible, c’est une grâce à demander.

Cet encouragement que Jésus nous fait encore ce matin de vivre en tant que Chrétien est magnifique ! Il nous appelle à vivre en tant que témoin des choses invisibles.

Comment sommes-nous des témoins des choses invisibles, des choses qui vienne de Dieu dans nos cœurs, dans le monde. Le monde d’aujourd’hui est tout de même très compliqué, on ne peut pas dire qu’il est rayonnant de lumière ni toujours de la gloire de Dieu… Et pourtant, si vous regardez bien, le Seigneur œuvre dans notre monde, dans notre pays aujourd’hui, avec les prochaines élections : nous en sommes participants.

Et, si nous restons bien collés à la parole de Dieu, si nous sommes dans ce désir de vivre des choses de Dieu, il y a une bonification qui se fait progressivement. C’est la bonne nouvelle que nous pouvons expérimenter en tant que Chrétien et que Dieu nous donne à chacun.

Dans ce passage magnifique, Jésus nous invite aussi à être témoins d’un règne qui est déjà présent tout entier ! Il l’est déjà dans nos premiers commencements, dans les petits pas timides que nous pouvons faire. Dans mon petit acte de foi du matin, peut-être pas très glorieux, Jésus nous dit : « je suis déjà avec toi tout entier ! ».
C’est la parabole qui le dit : dans la graine, il y a tout, le chêne est contenu dans entier dans le petit gland. Et nous savons très bien que l’homme tout entier est déjà présent dans une petite cellule embryonnaire. Malheureusement, nos contemporains y sont de plus en plus indifférents, et ils veulent même le détruire, ce « petit rien »… Et pourtant, la parabole nous le rappelle, elle est au cœur de la parole de Dieu.

Frères et sœurs, vous savez que le Jubilé 2025 aura lieu bientôt, et je vous propose de lire la dernière lettre du pape François pour le préparer. Il a choisi un thème magnifique :

« l’Espérance ne déçoit pas ! »

C’est une parole forte pour le monde d’aujourd’hui, et elle permet d’actualiser la parole donnée pour ce dimanche. L’Espérance ne déçoit jamais !

La deuxième parabole ressemble à la première, mais il y a des différences et il y aurait beaucoup d’autres choses à dire. Elle peut aussi nous aider à être des témoins du règne de Dieu. Voyez, pour la première fois, en la méditant, j’ai été surpris que Jésus compare Son royaume à une plante présente dans un potager, alors qu’Ézéchiel et Isaïe, vous avez quelques échos dans la première lecture, n’ont cessé de comparer Israël à un grand et majestueux cèdre du Liban. Cette image nous conviendrait peut-être mieux ?
Vous pourrez aller vérifier, la graine de moutarde donne un petit buisson qui dépasse rarement deux mètres à maturité. comparer le Royaume de Dieu à un simple buisson, Cela peut être un peu choquant pour l’auditoire de Jésus… Il aurait pu au moins choisir un figuier qui porte des bonnes figues ! Un moutardier, ce n’est pas très glorieux, et il faut transformer les graines pour les consommes…
Mais, par cette image, Jésus veut nous signifier quelque chose de particulier :

« Et elle étend de longues branches, si bien que les oiseaux du ciel peuvent faire leur nid à son ombre. »

Quelle magnifique image que celle du refuge des oiseaux. J’imagine Jésus en admiration devant ces oiseaux qui se perchent et y font leur nid : un vrai spectacle !

Cela fait écho dans la Bible car on retrouve cette image dans Daniel 4 lorsqu’il est question de la toute puissance du règne de Dieu.
Avec Jésus, cette puissance ne se manifeste pas par l’éclat du cèdre, cela donnerait une image de domination, et il n’y a pas cette notion là dans le Royaume de Dieu. Il fonctionne par attirance, une attirance irrésistible et respectueuse, comme pour les oiseaux qui trouvent une place pour faire leur nid dans ses branches.

Cela nous rappelle l’image de la Croix, comme un arbre, et cette parole magnifique de Jésus :

« Quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes. »

Cette parole nous laisse de quoi méditer.

D’une certaine manière, c’est bien la modestie irrésistible d’un buisson de moutarde à laquelle l’Église et nos communautés sont appelées à ressembler : pas besoin des glorioles. Mais, il nous faut demander d’avoir cette qualité d’amour qui permet d’attirer nos frères et nos sœurs vers Jésus qui est doux et humble de cœur. C’est ce que fait la Vierge-Marie dans chacune de Ses apparitions : elle n’attire pas les fidèles à Elle, mais toujours à Jésus, en s’effaçant.

Alors, frères et sœurs, pour terminer, je vous pose la question : pour vous mettre en route avec le Seigneur, où est-ce que nous en sommes ? où souhaiterions-nous y être ? quelle est la place que je souhaite avoir dans cet arbre ? comment est-ce que je perçois cette bonne nouvelle que Jésus m’annonce à travers ces paraboles ?

Avec Marie, je vous laisse le soin d’y apporter votre réponse personnelle durant cette semaine,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre d’Ézéchiel 17,22-24.
  • Psaume 92(91),2-3.13-14.15-16.
  • Deuxième lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens 5,6-10.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc 3,20-35 :

En ce temps-là, Jésus disait aux foules : « Il en est du règne de Dieu comme d’un homme qui jette en terre la semence : nuit et jour, qu’il dorme ou qu’il se lève, la semence germe et grandit, il ne sait comment.
D’elle-même, la terre produit d’abord l’herbe, puis l’épi, enfin du blé plein l’épi. Et dès que le blé est mûr, il y met la faucille, puisque le temps de la moisson est arrivé. »
Il disait encore : « À quoi allons-nous comparer le règne de Dieu ? Par quelle parabole pouvons-nous le représenter ? Il est comme une graine de moutarde : quand on la sème en terre, elle est la plus petite de toutes les semences.
Mais quand on l’a semée, elle grandit et dépasse toutes les plantes potagères ; et elle étend de longues branches, si bien que les oiseaux du ciel peuvent faire leur nid à son ombre. »

Par de nombreuses paraboles semblables, Jésus leur annonçait la Parole, dans la mesure où ils étaient capables de l’entendre.
Il ne leur disait rien sans parabole, mais il expliquait tout à ses disciples en particulier.