Homélie de la solennité de la Sainte Trinité

29 mai 2024

« Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Allez ! De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. »

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Texte de l’homélie

Frères et sœurs,

Dans la formation du séminariste, au programme du cursus de théologie, il y a un cours sur les sacrements, un autre sur l’Église, sur le Christ, la Vierge-Marie et les anges, bien évidemment, et il y a aussi un cours sur la Trinité, et j’ai particulièrement apprécié celui-ci. J’ai trouvé intéressante la manière dont le professeur a abordé cette question : il disait que la Trinité manifeste une communion très spéciale : chaque personne est bien distincte – plus que nous ne sommes les uns les autres - et en même temps chaque personne est plus en communion l’une avec l’autre que nous ne le serons jamais dans notre condition humaine, même en étant amoureux transis…

Au fond, quand on réfléchit à ce mystère considérable, on voit qu’en Dieu Lui-même il y a une communion, une altérité : c’est un Dieu unique mais pas un Dieu solitaire. Et nous sommes à limage d’un dieu qui est communion et distinction à la fois. Et cette altérité des personnes divines nous invite à méditer sur nos relations.

Le fait d’être différents n’est pas un obstacle à la communion. Le Père est totalement autre que le Fils et Il est vraiment en communion avec Lui, et cette altérité en Dieu n’est pas un obstacle à la communion en Dieu, et pour nous c’est une nouveauté.

« Écoute Israël, le Seigneur est ton Dieu, Il est un ! »

Le Judaïsme nous a apporté cette grande nouveauté d’un dieu unique par rapport à la multiplicité des dieux de l’Antiquité avant Israël. Et le Christianisme apporte cette très grande nouveauté : non seulement Il est un dieu unique, mais Il est un dieu relationnel. Et cette notion est complètement neuve : personne ne parle de ça. D’autres religions sont apparues après le Christianisme – chacune de ces traditions est respectable – mais elles n’apportent pas une nouveauté.

Cette nouvelle alliance est remarquable et mérite d’attirer de nombreux fidèles et peut toucher chacun profondément :

« Je vous apporte un commandement nouveau. »

Ce commandement nouveau renvoie à une communion transcendante. C’est quelque chose de tout à fait neuf et d’inédit ! On ne trouve rien de semblable dans les autres religions et c’est extraordinaire, c’est heureux. Dieu manifesté en Jésus-Christ nous dit Sa nature, ce qu’Il est. Et Il nous dit que non seulement il y a une altérité en Dieu mais que chaque personne divine est substantiellement une relation. Cela signifie que le Père n’est que paternité, le Fils n’est que filiation et l’Esprit n’est que spiration, c’est à dire amour du Père et du Fils. Ce qui définit les personnes divines c’est d’abord leur relation. Et ces relations sont substantielles car elles définissent ce qu’est chaque personne divine.
Nous sommes nous-même en relation, en famille, au travail, entre amis ou en communauté, mais aucune d’entre-elles ne vous définit complètement : on peut être à la fois parent, enfant, collègue et ami avec des personnes différentes.

Il est donc intéressant que, dans la Trinité, le fait de dire que chaque personne divine n’est que relation et ne subsiste que comme relation signifie que si nous voulons être à l’image et à la ressemblance de Dieu, revisitons nos revisitons nos relations qui ne sont pas substantielles puisque nous en avons plusieurs.

Mais, quand Jésus nous demande être à l’image et à la ressemblance de Dieu, quand Il nous dit de nous aimer les uns les autres, Il nous rappelle la Trinité. Comment nos relations nous définissent-elles ? Si elles ne définissent pas notre être profond, elles ne sont pas sans impact sur notre réalité humaine.

Et à travers cette fête de la Sainte Trinité, c’est beau de méditer sur ce que le Seigneur révèle : Il est à la fois un et trois, un seul Dieu, nous ne sommes pas polythéistes. Parce que Jésus est le Messie, parce qu’Il sait qu’Il vient de Dieu et ce qui habite le cœur de Dieu, pourquoi a-t-Il voulu nous révéler le Père, le Fils et l’Esprit ? Et en même temps, pourquoi nous a-t-Il donné ce commandement nouveau de s’aimer les uns les autres, de découvrir dans l’altérité de chaque personne humaine un lieu de communion et non pas un lieu de menace ?

En tant que Messie, Il est venu pour révéler le Père et nous donner l’Esprit-Saint, c’est Sa mission. C’est aussi certainement parce qu’Il a voulu nous inviter à aller plus loin et à interroger la manière dont nous rentrons en contact les uns avec les autres, la manière dont les différentes interactions que nous pouvons avoir ont aussi un impact.

Et la qualité de la relation que nous avons en famille, dans le couple, dans la vie professionnelle, amicale ou ecclésiale, dit quelque chose de la Trinité. C’est à la fois une différence et à la fois une communion. En Dieu, on arrive à une réalité mystérieuse et suréminente, mais, modestement, parce que l’on croit en la Trinité, parce que l’on croit qu’on est à l’image et à la ressemblance de Dieu – Père, Fils et Esprit-Saint - parce que l’on croit qu’on est le temple du Saint-Esprit, nous croyons que nous avons la capacité de rentrer en contact avec ceux vers lesquels nous ne serions pas allés dans un premier élan.

Nous sommes en capacité de rentrer en contact et si la plupart d’entre vous êtes confirmés, ceux qui la reçoivent à l’âge adulte donnent un signe fort aux autres. Cela signifie que l’on veut vivre nos relations à la manière de la Trinité : à la fois la différence et à la fois la communion. Cette affirmation peut arriver parfois à la fin de l’adolescence, et je ne saurai que vous encourager à faire cette démarche. C’est faire le choix de vivre à la fois à la manière d’une relation et à la fois à la manière d’une distinction des personnes. Je ne peux pas dire « je » sans dire « tu », je ne peux pas dire « tu » sans dire « nous ».

C’est un immense mystère et nous aurons toute la vie éternelle pour le contempler en Dieu : l’altérité et la communion à la fois. A l’aune de ces relations en Dieu, nous serons éclairés par cette gloire des personnes divines entre elles. Nos relations seront ainsi purifiées et transfigurées. Que c’est beau de vivre ainsi. C’est ce que Jésus est venu nous révéler par Son Saint-Esprit : Il est venu nous introduire dans ce mystère même de l’amour trinitaire. Cela peut paraître lointain, et nous pouvons garder ce mystère car il nous ouvre à un au-delà, à un horizon et à un ailleurs, à plus grand… Nous pouvons mettre des mots, mais nous balbutions.

Quelle grâce d’être disciple de Jésus et de rentrer dans cette nouveauté, dans cette ouverture que la Trinité nous propose. Et il peut être intéressant de nous demander avec quelle personne de la Trinité vous êtes le plus en contact. A qui vous adressez-vous quand vous priez ? Au Père, au Fils ou à l’Esprit-Saint ? Ainsi, vous vous adressez à une relation qui est à la fois une personne, chacun étant distinctement en communion.

Quelle est a relation qui vous touche le plus quand vous contemplez Dieu ? où êtes-vous le plus rejoint ?

  • Est-ce dans la paternité d’un Dieu qui est Père,
  • Est-ce dans la vie du Christ Lui-même, le Fils, celui qui Se reçoit complètement du Père, Est-ce que vous vous recevez du Père en chaque eucharistie ?
  • Est-ce le Saint-Esprit, Lui qui nous conduit vers la vérité toute entière, qui nous ouvre au mystère même de l’amour de Dieu ?

De quelle personne divine recevez-vous le plus ?

Demandons ainsi cette grâce au Seigneur de remercier profondément le Seigneur Jésus de nous avoir révélé la Trinité. C’est une très grande chose, c’est une très bonne et magnifique nouvelle… Et nous savons que c’est sur la Croix qu’Il a dit :

« Père, entre tes mains je remets mon esprit. »

Père, Fils et Saint-Esprit sont là présents, parce que chaque action d’une des personnes est aussi celle des deux autres. Que à Jésus de nous aider à être plus conscients de cela et de revisiter nos relations les uns avec les autres, et de nous inspirer de la manière dont chaque relation de la Trinité est vécue : voilà le modèle pour moi.

Puissions-nous devenir, par cette contemplation de la Trinité, des témoins qui nous appellent des ténèbres à Son admirable lumière,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre du Deutéronome 4,32-34.39-40.
  • Psaume 33(32),4-5.6.9.18-19.20.22.
  • Lettre de saint Paul Apôtre aux Romains 8,14-17.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 28,16-20 :

En ce temps-là, les onze disciples s’en allèrent en Galilée, à la montagne où Jésus leur avait ordonné de se rendre.
Quand ils le virent, ils se prosternèrent, mais certains eurent des doutes. Jésus s’approcha d’eux et leur adressa ces paroles : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre.
Allez ! De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. »