Texte de l’homélie :
Marie, signe d’espérance
Le mal n’a pas le dernier mot
Comme on le sait, l’Apocalypse s’adresse à des chrétiens persécutés pour les soutenir dans leur épreuve : son contenu, de bout en bout, est donc un message de victoire. L’image de l’enlèvement de l’enfant « auprès de Dieu et de son trône » symbolise la Résurrection du Christ ; elle était claire pour les premiers Chrétiens habitués à parler de lui comme le « Premier-Né » désormais assis à la droite de Dieu ; mais son peuple, lui, demeure dans le monde ; comme le dit Jésus dans l’Évangile de Jean :
« Désormais, je ne suis plus dans le monde ; eux restent dans le monde, tandis que moi je vais à toi. » (Jn 17, 11)
Un monde difficile, mais où nous sommes assurés de la protection de Dieu.
Dans ce que nous pouvons vivre de difficile, un signe nous est donné : Marie. Déjà le fait que la Vierge soit enceinte était un signe d’espérance donné au roi (Is 7, 14).
Appelés à la gloire comme Marie, la première en chemin
Cela nous fait du bien de voir quelqu’un qui est déjà arrivé. Cela nous montre que – avec la grâce de Dieu –, c’est possible. C’est d’ailleurs pour cela que dans la procession avec la statue de Marie, nous mettons la statue de Marie en premier. Comme le dit le cantique, Marie est la « première en chemin ». Marie nous indique la bonne direction à prendre. C’est d’ailleurs pour cela que le chapitre concernant Marie est le dernier de ce document sur l’Église (n° 59 et 68 de Lumen Gentium). Nous y lisons :
Nous sommes attendus au Ciel !
Comme Marie, nous sommes faits pour le Ciel. Nous sommes appelés à être immaculés comme le dit saint Paul lorsqu’il s’adresse aux Éphésiens.
Marie est déjà au Ciel et ne pense qu’à une chose : nous y faire entrer. Comme le dit le curé d’Ars :
« L’homme était créé pour le ciel. Le démon a brisé l’échelle qui nous y menait. Notre Seigneur, par sa Passion, nous en a formé une autre… La Sainte Vierge est en haut de l’échelle et la tient à deux mains. »
Présence de Marie
La présence de Marie est signalée à divers moments dans l’évangile
Dans le Nouveau Testament, on trouve quelque chose de très caractéristique concernant la Vierge Marie : avant tout, elle est présente. Bien entendu, elle est présente dans les évangiles de l’enfance. Mais c’est le cas aussi à Cana, au pied de la Croix, dans le Cénacle : « Marie était là ». Les évangélistes signalent la présence de Marie à tous ces moments décisifs. Il ne nous disent pas tellement ce qu’elle fait mais insistent sur le fait qu’elle soit présente.
Marie se manifeste parce qu’elle est notre mère. Jésus nous l’a donnée sur la Croix (cf. Jn 19, 25-27) ; il n’est donc pas inconcevable qu’elle recoure à tous les moyens de grâce pour nous témoigner de sa présence maternelle, comme toute mère a besoin de dire son amour à ses enfants.
Comme le dit magnifiquement Benoît XVI :
C’est d’ailleurs ce que l’on retrouve dans un certain nombre d’apparitions mariales : Marie ne parle pas forcément de manière très abondante mais elle se rend d’abord présente. C’est le cas par exemple à Lourdes, à Notre-Dame du Laus, … Les apparitions mariales s’offrent comme des témoignages de la présence de notre mère céleste au cours de l’histoire humaine et dans chacune de nos vies.
Les effets bienfaisants de cette présence
Dans l’évangile de ce jour, saint Luc fait un rapprochement très clair entre la présence bienfaisante de l’Arche d’Alliance dans la maison d’Obed Edom (2 S 6, 1-15) et la présence de Marie dans la maison de Zacharie et Élisabeth.
La présence de Marie est à juste titre rassurante, protectrice. Voici par exemple ce que disait le pape Benoît XVI à propos de la présence de Marie au Cénacle :
En poursuivant ce parallèle, il est évident que la présence de Marie n’est pas quelque chose de magique. Elle exige de nous un comportement adéquat. Vous avez certainement présent à l’esprit ce moment de l’histoire des hébreux où ils vont chercher l’Arche dans leur combat contre les Philistins (1 S 4, 3-11) : mais ils font l’expérience que ce n’est pas quelque chose de magique ou d’automatique car l’arche est prise.
Comment permettre à Marie de se rendre présente ?
Comme le disait magnifiquement le pape Benoît XVI :
La sainte Vierge est bien élevée : elle ne s’impose pas ! On lui permet de prendre sa place dans notre vie en nous adressant à elle dans la prière du chapelet, en faisant une démarche de consécration, … Il ne s’agit pas d’expériences spirituelles extraordinaires mais plutôt d’un attachement de foi à Marie, qui peut se traduire par la récitation continuelle du chapelet. Il s’agit d’être avec elle, avec tout ce que cette préposition connote de force, d’amitié, voire d’intimité.
Notre fondateur, le Père Lamy disait :
Cette présence est devenue peu à peu union constante. La protection maternelle de Marie s’est traduite par une présence à ses côtés. Présence où il a pu puiser des grâces.
Intercession de Marie
C’est un fait d’expérience
Marie nous a-t-elle oubliés dans sa gloire ? Comme Esther, introduite dans le palais du roi, elle n’a pas oublié son peuple menacé (cf. Esther 5). Comme Thérèse de Lisieux et bien plus qu’elle, elle passe son ciel à faire du bien sur la terre.
« Je sens que ma mission va commencer, ma mission de faire aimer le bon Dieu comme je l’aime, de donner ma petite voie aux âmes. Si le bon Dieu exauce mes désirs, mon ciel se passera sur la terre jusqu’à la fin du monde. Oui, je veux passer mon ciel à faire du bien sur la terre. »
La puissance d’intercession de Marie se démontre a posteriori, par l’histoire et non a priori. Combien de personnes ont eu conscience d’être exaucés par Marie.
C’est en raison de son union à Jésus
Nous voyons de nombreux intercesseurs dans la Bible : Jérémie (cf 2 Maccabées 15, 14), Moïse et Samuel (Jr 15, 1), Abraham, David (cf. Dn 3, 35 ; Ps 132, 1)…
Une fois associée à la glorification de son Fils, Marie est devenue « Mère de Dieu avec puissance ». Cette puissance de la Mère de Dieu n’est pas une puissance autonome et parallèle à celle de Dieu ou du Christ ; c’est une puissance d’intercession.
La puissance d’intercession de Marie se fonde sur son amour pour Dieu. Dieu a promis de donner tout ce que nous lui demandons “selon sa volonté” (cf. 1 Jn 5, 14). Il fait d’autant plus tout ce que Marie demande, parce qu’elle ne demande que ce qui est selon la volonté de Dieu. Quand une créature veut tout ce que Dieu fait, Dieu fait tout ce que veut cette créature. C’est ce que dit aussi le curé d’Ars :
« Dieu fait les quatre volontés de celui qui fait sa volonté. »
Comme le dit magnifiquement Charles Péguy :
Elle est notre avocate pour plaider notre salut
Dans le chapelet, nous répétons sans cesse : « Priez pour nous, pauvres pécheurs ».
« Voyageurs sur la terre, nous avons envoyé en avant notre avocate…, mère de miséricorde, pour plaider efficacement notre salut. » (Saint Bernard)
En conclusion, nous pouvons reprendre ce texte magnifique où saint Bernard nous invite à regarder l’étoile.
Quand se lève le vent des tentations, quand tu es emporté vers les récifs de l’adversité, regarde l’étoile, appelle Marie ! Si tu es ballotté par les vagues de l’orgueil, de l’ambition, du dénigrement, de la jalousie, regarde l’étoile, appelle Marie !
Si la colère ou l’avarice ou les sortilèges de la chair secouent la nacelle de ton âme, regarde vers Marie. Si, tourmenté par l’immensité de tes crimes, honteux des souillures de ta conscience, terrorisé par l’horreur du jugement, tu te laisses déjà happer par le gouffre de la tristesse, par l’abîme du désespoir, pense à Marie !
Dans les périls, dans les angoisses, dans les situations critiques, pense à Marie, invoque Marie !
Que son nom ne quitte pas tes lèvres, qu’il ne quitte pas ton cœur, et pour obtenir le suffrage de ses prières, ne négliges pas l’imitation de sa vie.
Si tu la suis, point ne dévies ; si tu la pries, point ne désespères ; si tu penses à elle, point ne t’égares. Si elle te tient, plus de chute, si elle te protège, plus de crainte, si elle te guide, plus de fatigue. Avec sa bienveillance, tu parviens au port. » (Saint Bernard)
Amen !
Références des lectures du jour :
- Livre de l’Apocalypse 11,19a.12,1-6a.10ab.
- Psaume 45(44),11-12a.12b-13.14-15a.15b-16.
- Première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens 15,20-26.
- Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 1,39-56 :
En ces jours-là, Marie se mit en route et se rendit avec empressement vers la région montagneuse, dans une ville de Judée. Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Élisabeth.
Or, quand Élisabeth entendit la salutation de Marie, l’enfant tressaillit en elle. Alors, Élisabeth fut remplie d’Esprit Saint, et s’écria d’une voix forte : « Tu es bénie entre toutes les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni.
D’où m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? Car, lorsque tes paroles de salutation sont parvenues à mes oreilles, l’enfant a tressailli d’allégresse en moi.
Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur. »Marie dit alors : « Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur !
Il s’est penché sur son humble servante ; désormais tous les âges me diront bienheureuse.
Le Puissant fit pour moi des merveilles ; Saint est son nom !
Sa miséricorde s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent.
Déployant la force de son bras, il disperse les superbes.
Il renverse les puissants de leurs trônes, il élève les humbles.
Il comble de biens les affamés, renvoie les riches les mains vides.
Il relève Israël son serviteur, il se souvient de son amour, de la promesse faite à nos pères, en faveur d’Abraham et sa descendance à jamais. »Marie resta avec Élisabeth environ trois mois, puis elle s’en retourna chez elle.