Où est le roi des juifs ?
Tout le monde est intéressé à un titre ou à un autre à le trouver. Mais ils ne trouveront dans la crèche qu’un enfant et sa mère.
Où est le roi ? Jésus toute sa vie se défilera, se soustraira à la pression populaire qui veut le faire roi. Après la multiplication des pains on veut se saisir de lui pour en faire le roi, il s’échappe et c’est simplement après, lorsqu’il part en vacances avec ses disciples sur le bord de la mer, qu’il rencontre cette femme syro-phénicienne, une étrangère, dont il louera la foi immense.
C’est bien la foi qu’il nous faut.
Où est le roi des juifs ?
Nous le trouvons à un seul endroit dans l’évangile : sur la croix, avec le motif de sa condamnation, Jésus de Nazareth, roi des juifs. C’est d’ailleurs l’année de saint Luc, qui nous donne le texte du Christ Roi.
On pourrait penser qu’il est à Jérusalem, c’est le réflexe de nombre de personnes, des mages qui arrivent, d’Hérode lui-même, qui sait bien le pouvoir qu’il a. Tout le monde sait que le Seigneur, le roi d’israël, habite à Jérusalem. Car la royauté est vue ici à la manière humaine, comme ici Hérode.
Quand nous parlons du roi Hérode nous vient un frisson, parce qu’on connaît l’histoire de l’évangile, mais les historiens modernes pensent qu’il s’agissait d’un très bon chef d’état, un très bon politique qui a su mener son peuple. Certes cruel et fou dans sa cruauté à la fin de sa vie, mais qui a fait une oeuvre admirable.
Mais il confond, il est un homme de pouvoir, et son réflexe, on le voit ici, c’est qu’un autre peut venir, fusse-t-il le messie, fusse-t-il Dieu, et c’est un rival à abattre.
Le pape Benoît XVI dans ses méditations, nous invite aussi à y réfléchir pour nous : Dieu apparaît comme un rival, particulièrement dangereux, qui voudrait priver les hommes de leur espace vital, de leur autonomie, de leur pouvoir, qui indique la route à parcourir dans la vie mais qui nous empêche de faire tout ce qu’on veut. N’est-ce pas ainsi avec Adam et Ève, inspirés par le serpent ?
Le pape Benoît XVI nous rappelle :
Sommes-nous aveugles, sommes-nous sourds à la Parole ?
Nous pensons que Dieu pose des limites à notre vie et ne nous permet pas de disposer de notre existence à notre gré. Il faut rentrer dans ce chemin de foi, de libération, de voir et d’accueillir les signes du Seigneur pour découvrir comme le peuple d’Israël en Égypte les gestes de libération et de rentrer dans cette libération que le Seigneur nous donne. Le Roi n’est pas à Jérusalem, il n’est pas sur le trône. Il n’est pas, comme le dira encore Benoît XVI, dans les lieux de pouvoir.
Alors on va chercher les scribes et les pharisiens qui, d’une manière étonnante, savent, connaissent, mais comment se fait-il qu’ils n’ont pas emboîté le pas des mages pour aller adorer Jésus ?
Certes Hérode veut emboîter le pas, mais c’est pour abattre celui qui peut être un rival.
Les spécialistes de l’Écriture savent, mais ils ne font pas. Ils sont des guides pour le peuple : faites tout ce qu’ils vous disent, mais ne les imitez-pas, car ils ne marchent pas dans les pas du Seigneur. Ils spéculent, ils jouent avec l’Écriture, mais ils ne rentrent pas en relation.
Et pourtant, dans la citation de Michée qui est faite, quelque chose peut nous ouvrir le cœur :
Et toi, Bethléem, terre de Juda, tu n’es certes pas le dernier parmi les chefs-lieux de Juda, car de toi sortira un chef, qui sera le berger de mon peuple Israël.
D’une manière étonnante, le verbe est changé. Dans Michée c’était « qui gouvernera » et ici « qui sera le berger », qui fera paître.
C’est cette figure de Jésus qui est le Bon Pasteur, qui connaît ses brebis, qui connaît chacune par son nom. Cette relation que Dieu vient faire grandir, vient faire paître, vient nourrir, vient protéger et indiquer les verts pâturages.
Où est le roi des juifs ?
Les mages, ces hommes savants, marchands, ces hommes qui représentent une caste de gens qui cherchent dans la création la signature de Dieu, ces sages assimilés aussi à des philosophes, des amants de la sagesse, recherchent quelque chose de plus. Ils recherchent la véritable lumière qui soit capable d’indiquer la voie à parcourir.
Ils sont guidés par cette lumière. On a spéculé sur cette étoile, Kepler pensait que c’était une super nova avec l’alignement de Jupiter et de Vénus, mais en même temps à l’époque s’ils ont vu quelque chose dans les astres, la prophétie de Balaam, ils se sont mis en route pour chercher la vérité avec leur raison, avec leur foi, avec tout leur coeur. Comme Abraham, venant de l’Orient, ils se sont mis en route.
C’est donc à Bethléem, cette petite bourgade, grande à cause de l’évènement qui y arrive, qu’ils vont découvrir cet enfant. Il faut qu’ils dépassent la soif du pouvoir d’Hérode, qu’ils dépassent la manière des prêtres, des scribes, des pharisiens de regarder l’Écriture pour se mettre sans cesse en chemin. C’est étrange dans ce passage, on nous dit :
Quand ils virent l’étoile, dépassant Jérusalem, ils furent saisis d’une grande joie.
On aurait pu penser que la grande joie aurait été quand ils découvrent l’enfant, mais non, c’est quand ils voient ce signe, quand ils se mettent vraiment en marche, quand ils sentent dans cette marche qu’ils vont vraiment sur un chemin de vie, sur le chemin du Seigneur. Alors, arrivant, ils reconnaissent dans cet enfant, cette famille, pauvre, humble, dans ce logement où rien n’est éclatant, ce Dieu qui est amour.
Demandons la grâce de nous mettre en chemin avec cette fête de l’Épiphanie.
Demain ce sera la baptême de Jésus, puis le temps ordinaire, le temps de la marche, le temps de nous mettre en marche pour découvrir sans cesse le Seigneur, pour être dans cette joie, et non pas comme les scribes ou les pharisiens que l’on voit dans l’évangile, rouspétant, râlant contre ce qui n’est pas bien chez Jésus, ou comme Hérode et les gens de pouvoir, toujours mécontents et insatisfaits. Lorsque nous sommes mécontents et insatisfaits, n’est ce pas que c’est simplement que notre volonté de puissance, notre désir de tout diriger est mis en danger ?
Alors que si nous accueillons la vie avec l’enfant, si nous accueillons la vie à la recherche de la vérité, nous vivrons dans cette grande joie qui est celle des mages, qu’ils veulent partager, que Dieu veut nous donner aujourd’hui.
Amen !
Références des lectures du jour :
- Livre d’Isaïe 60,1-6.
- Psaume 72(71),1-2.7-8.10-11.12-13.
- Lettre de saint Paul Apôtre aux Éphésiens 3,2-3a.5-6.
- Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 2,1-12 :
Jésus était né à Bethléem en Judée, au temps du roi Hérode le Grand.
Or, voici que des mages venus d’Orient arrivèrent à Jérusalem et demandèrent : « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? Nous avons vu son étoile à l’orient et nous sommes venus nous prosterner devant lui. »
En apprenant cela, le roi Hérode fut bouleversé, et tout Jérusalem avec lui. Il réunit tous les grands prêtres et les scribes du peuple, pour leur demander où devait naître le Christ.
Ils lui répondirent : « À Bethléem en Judée, car voici ce qui est écrit par le prophète : ‘Et toi, Bethléem, terre de Juda, tu n’es certes pas le dernier parmi les chefs-lieux de Juda, car de toi sortira un chef, qui sera le berger de mon peuple Israël.’ »
Alors Hérode convoqua les mages en secret pour leur faire préciser à quelle date l’étoile était apparue ; puis il les envoya à Bethléem, en leur disant : « Allez vous renseigner avec précision sur l’enfant. Et quand vous l’aurez trouvé, venez me l’annoncer pour que j’aille, moi aussi, me prosterner devant lui. »
Après avoir entendu le roi, ils partirent. Et voici que l’étoile qu’ils avaient vue à l’orient les précédait, jusqu’à ce qu’elle vienne s’arrêter au-dessus de l’endroit où se trouvait l’enfant.
Quand ils virent l’étoile, ils se réjouirent d’une très grande joie.
Ils entrèrent dans la maison, ils virent l’enfant avec Marie sa mère ; et, tombant à ses pieds, ils se prosternèrent devant lui. Ils ouvrirent leurs coffrets, et lui offrirent leurs présents : de l’or, de l’encens et de la myrrhe.
Mais, avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode, ils regagnèrent leur pays par un autre chemin.