Texte de l’homélie :
Chère Agathe, cher Baptiste, chers amis,
Lors de la très sérieuse préparation au mariage que les fiancés ont suivie, quand il s’est agit de donner un critère pour choisir les textes de cette célébration, je leur est dit de privilégier ceux qui, à l’intérieur de la parole de Dieu, donnent une lumière pour leur couple, qui indiquent un chemin et qui disent aussi à l’assemblée ce qu’ils veulent vivre, ce qu’ils attendent de ce sacrement et de la vie matrimoniale et familiale qui suivra.
Ces textes ont donc été choisis avec soin, et je voudrais les méditer avec vous car ils donnent un chemin à chacun d’entre nous.
« Renouvelez votre manière de penser »
Tout d’abord, Saint Paul s’adresse aux Romains, et les encourage à renouveler leur manière de penser, à ne pas se modeler sur le monde présent. Cette parole est lumineuse, mais que veut-elle dire ?
Elle conseille de ne pas suivre la manière habituelle de faire que l’on voit dans le monde présent. Il s’agit de cette habitude de contrôle, cette volonté d’affirmation de soi, ce développement du pouvoir et de l’amour de l’argent. Et Saint Paul indique que tout cela ne doit pas être un critère pour nous.
Mais alors, on peut de demander quel critère il faut choisir pour renouveler sa façon de penser ? Est-ce que l’Apôtre ne nous invite pas à fonder notre manière de voir sur la confiance, à vivre une forme de lâcher prise ? Ils nous sont parfois donnés de vivre de manière providentielle comme les problèmes de circulation qu’une partie de cette assemblée a connus en traversant Toulon pour se rendre ici…
La parole de Dieu est une parole vivante et lumineuse : que nous dit-elle de cette situation concrète que nous avons vécu à l’instant ? En quoi faut-il renouveler notre manière de penser ? Et l’on voit dans ce cas qu’il s’agit précisément de rentrer dans un chemin de confiance. Au delà même de la question du retard et de ses conséquences, c’est une manière très particulière de vivre chrétiennement selon le temps de Dieu.
Vous le savez, il y a deux manières de qualifier le temps en Grec : il y a le kronos, le temps de la montre, et le kaïros, le temps de grâce. Ainsi, nous sommes appelés à renouveler notre manière de penser en ayant un autre rapport au temps, en ayant une manière différente d’envisager événements et personnes, en demandant au Seigneur de nous transformer intérieurement et de rentrer dans cette intériorité qui fait que l’on est d’abord à l’écoute du Saint Esprit qui se manifeste dans les circonstances quotidiennes.
J’aime bien cette phrase du philosophe Pascal qui nous dit :
Les circonstances et les nécessités sont les choses que nous ne choisissons pas car elles s’imposent à nous : il s’agit des événements qui concernent les horaires, la santé, la vie professionnelles, les relations familiales et amicales, tout ce que nous ne choisissons pas dans la vie. Et Pascal nous invite à les vivre de manière spirituelle, à renouveler notre manière de penser en tirant du quotidien un chemin de vie, une manière de vie.
Ainsi, frères et sœurs bien-aimés, ce choix d’Agathe et Baptiste est tout à fait pertinent pour cette célébration. Et Saint Paul continue ainsi :
« Laissez-vous attirer par ce qui est simple, n’ayez pas le goût des grandeurs. »
« Laissez-vous attirer par ce qui est simple »
Préparant souvent des couples au mariage, je vois ce chemin comme l’union de deux pauvres. Le mariage c’est l’union de deux personnes qui, dans une simplicité de cœur, renoncent aux grandeurs de ce monde et aux modèles que propose la société, et se présentent comme des pauvres devant le Seigneur.
Et Agathe et Baptiste, il est important que vous ayez cette attitude intérieure de vous remettre face au Seigneur comme des personnes qui attendent tout de la grâce. Qu’est-ce que le sacrement de mariage si ce n’est le Salut qui est appliqué au couple.
Ce sacrement est très particulier car il est le seul que l’on reçoit à deux. Tous les autres sacrements sont personnels, que ce soit de l’initiation ou de la vie du Chrétien. Pour le mariage, c’est un sacrement que l’on reçoit à deux. Et donc, forcément, vous vous remettez face au Seigneur comme des pauvres demandant cette attitude de simplicité et d’humilité l’un envers l’autre. Cela permet d’accueillir ce que sera votre vie et de ce que chacun est avec ses propres limites.
Vous demandez à ce que le Salut du Christ soit appliqué à votre couple, que le Christ vous sauve.
De quoi le Seigneur va-t-il vous sauver ?
De quoi le Christ va-t-il sauve les fiancés dans le sacrement du mariage ? Il les sauve souvent d’eux-mêmes ! C’est ce qu’Il fait dans chaque sacrement car c’est le sacrement du Salut. Ils nous auvent de nous-mêmes, de la toute puissance que nous voulons avoir sur le temps, sur notre manière de faire que nous voulons imposer, au lieu d’accepter celle de l’autre.
Vous qui vivez en couple depuis des années, vous savez que la vie de couple demande un travail intérieur. On n’est pas fait l’un pour l’autre, mais on se fait l’un à l’autre.
Et ce travail intérieur que vous êtes amenés à faire va vous permettre de débusquer dans votre vie ce qui va s’opposer à l’amour, cette volonté de toute puissance qui nous pousse à vouloir régenter l’autre, à le transformer et le rendre à notre image et ressemblance. Et cela concerne chacun d’entre nous, pas seulement les fiancés qui sont devant nous nous sommes tous concernés par cette tentation de domination de l’autre.
Ainsi, renouveler sa manière de penser et se laisser attirer par ce qui est simple, c’est un beau chemin de vie que nous montrent Agathe et Baptiste, pour eux-mêmes d’abord, pour leur vie. Que vous puissiez relire régulièrement ce texte de Saint Pau dans votre vie personnelle et spirituelle, dans votre vie de prière.
Et celles et ceux d’entre vous ici présents qui vous êtes mariés à l’Église, puissiez-vous reprendre les textes que vous avez choisis il y a cinq, dix, vingt ou trente ans, et de voir comment ils viennent éclairer votre chemin car la parole de Dieu est une parole vivante.
Ce que l’on va demander au Seigneur les uns pour les autres, c’est de renouveler notre manière d’être et de faire. C’est ce que dit aussi Saint Paul un peu plus loin :
« Ne vous fiez pas à votre propre jugement. »
« Ne vous fiez pas à votre propre jugement. »
C’est la grâce d’être à deux et on la vit aussi en communauté : c’est à la fois une grâce et un défi, car on se laisse éclairer par le discernement de l’autre. Et la difficulté est là car notre orgueil refuse bien souvent de s’y soumettre, pour ne suivre que notre propre manière de faire.
En revanche, dans une attitude d’humilité, on se laisse éclairer, accueillir par l’autre pour être tiré vers le haut, et découvrir face au Seigneur ce qu’aimer veut dire.
Vous connaissez cette parole que j’aime bien :
Agathe et Baptiste, c’est ce que vous faites en ce moment : vous regardez ensemble dans la même direction. D’où l’importance de la prière, de la prière de couple. C’est difficile, ne le cachons pas, même pour des couples pratiquants et assidus l’Eucharistie, parce que dans la prière, je ne contrôle pas. Dans la prière, j’accueille la grâce et je me montre comme un pauvre face à l’autre, et c’est de loin l’intimité la plus grande.
Développez l’intimité de votre couple par la prière
Vous qui êtes en couple, faites cette expérience de prier ensemble. Je ne parle pas de prier ensemble pendant une célébration liturgique, mais à deux, chez vous, dans votre coin prière. Se tourner ensemble vers le Seigneur et invoquer Sa grâce développe une intimité extrêmement forte au sein du couple. Certes, l’intimité du corps et celle des cœurs est grande, mais l’intimité spirituelle est de loin la plus grande des intimités et c’est pour cela aussi que c’est si difficile. Même si on est très attaché à sa foi, ce n’est pas facile de le vivre en couple.
Cela demande de se laisser transformer intérieurement, de se laisser bousculer :
« Ne rendez pas le mal pour le mal, appliquez vous au bien autant que possible, vivez en paix avec chacun. »
Le danger de la vie de couple, c’est d’en faire le face à face de psychologies blessées, le face à face d’ego ou chacun veut avoir raison, cela peut être une tentation. Et dans cette situation, la prière ouvre à une espérance, l’espérance du Salut : nous ne sommes pas livrés à nos propres blessures, à nos manques d’amour, à nos difficultés d’accueil car il y a quelque chose de plus grand. Et vous qui êtes jeunes, et je suis heureux qu’il y ait tellement de jeunesse dans cette assemblée, soyez attentifs à garder la vie spirituelle comme un vrai questionnement.
Je ne vous connais pas et je ne sais pas où vous en êtes de votre vie spirituelle et de foi, mais que ça reste toujours une question. Restez en chemin !
Et vous aussi Baptiste et Agathe, restez en chemin, que cette question de la vie de Foi, la question de la vie éternelle et de la présence de Dieu dans votre couple par le sacrement reste toujours un lieu où vous allez vous tirer vers le haut.
Nous allons demander au Seigneur cette grâce les uns pour les autres, pour vous évidemment, et que nous puissions être les témoins d’un Dieu qui nous appelle des ténèbres à Son admirable lumière,
Amen !