Texte de l’homélie de mariage :
Frères et sœurs bien-aimés,
C’est une grande joie pour moi d’être là aujourd’hui dans cette église, et - comme pour vous tous aussi - d’entourer Pauline et Nicolas dans leur union, une grande joie aussi de pouvoir retrouver des visages connus et aimés.
Et la célébration que nous avons aujourd’hui est clairement une interpellation pour chacun d’entre nous. Dans mon ministère, je fais beaucoup de préparation au mariage, et ainsi, je rencontre beaucoup de couples : c’est l’essentiel de mon ministère.
Et je suis toujours attentif quand un couple vient frapper à la porte de notre communauté pour être accompagné dans cette démarche, il vient frapper à la porte de l’Église ; il faut être attentif à leur cheminement personnel.
Comme il est important d’être humble aussi dans la démarche que chacun peut avoir…
Lorsque Pauline et Nicolas m’ont demandé de les accompagner, c’était une grande joie, parce que cela fait pratiquement une vingtaine d’années que nous sommes amis avec la famille de Nicolas, et ça a été une joie de découvrir Pauline aussi, et de voir leur cheminement.
J’ai premièrement été marqué par le sérieux qu’ils ont mis dans ce temps de préparation au mariage. Nous avons utilisé les technologies nouvelles, puisque - vous savez - ils sont de l’autre côté de l’Atlantique. C’est donc par Skype que nous avons pû faire cette préparation, pratiquement huit à dix fois à peu près.
Je leur ai également dit de travailler sur leur célébration, sur leur messe, je leur ai passé le rituel, des exemples de déroulement complet de messe, et ils ont travaillé là-dessus.
Alors que, je ne pense pas trahir un grand secret, Pauline est Nicolas, même s’ils sont nés dans la foi catholique, ne sont pas des grands pratiquants. Mais c’est d’autant plus intéressant comme démarche, parce que précisément qu’est-ce qui les pousse ?
Puiser dans vos racines pour découvrir au cœur de votre amour quelque chose de plus grand
Oui, bien sûr, vous avez été dans une famille catholique, vous avez été baptisés, vous avez fait votre première communion, etc.Vous avez reçu un certain nombre de choses, que ce soit par le scoutisme, que ce soit par l’enseignement catholique, que ce soit par des amis prêtres de la famille ou par les différentes célébrations familiales auxquelles vous avez participé.
L’Église a compté pour vous, c’est cela dont je me suis rendu compte.
Pour vous ce n’était pas une option, se marier à l’Église ou ne pas se marier à l’Église. C’était se marier à l’Église ou se marier à l’Église ! Pour vous c’était très important.
Et je trouve cela beau parce que justement vous avez puisé dans vos racines, pour découvrir aussi au cœur même de votre amour quelque chose de plus grand. Parce qu’au fond il s’agit bien de cela, il s’agit de grandir dans l’amour.
L’Église vous accueille tels que vous êtes
Si vous frappez à la porte de l’Église pour que le Seigneur bénisse votre amour, l’Église vous accueille tels que vous êtes, très certainement et avec joie, mais pas pour vous laisser tels que vous êtes.
Elle vous accueille tels que vous êtes pour vous emmener plus loin, vous emmener plus haut, vous emmener plus profond, pour vous faire cheminer.
Et c’est important aussi que cette démarche spirituelle ne soit pas simplement une oasis spirituel dans un désert spirituel, mais une démarche, une étape de foi dans une démarche de foi.
Alors oui, progressivement, j’ai vu au fur et à mesure des rencontres qu’il y avait un approfondissement, qu’il y avait quelque chose qui était de l’ordre d’un épanouissement de votre amour, d’une maturité de votre amour.
J’ai eu cette image : je vous ai vus un peu comme un tableau impressionniste, comme ceux de Turner par exemple, le grand spécialiste du ciel - quand vous trouvez un impressionniste dans vos maisons c’est plutôt une bonne nouvelle ! C’était donc plutôt une bonne nouvelle de voir Nicolas et Pauline comme un tableau impressionniste, dans le sens où il y avait plusieurs touches…
L’Église accompagne votre chemin
C’est vrai que la pratique n’est pas hebdomadaire, dominicale, mais l’Église a marqué leur chemin.
Comme le disait l’une de vos amies :
On sent que pour vous l’Église fait partie de votre paysage.
Et comme pour beaucoup de vous aussi, chers jeunes, cela fait partie aussi de votre paysage. Vous avez trouvé comme une source, comme quelque chose où vous dites : « ça compte vraiment ». Et c’est vrai qu’à travers votre préparation, on a pu approfondir votre démarche. Je me réjouis aussi de cela.
Je me réjouis du sérieux que vous y avez mis, et en même temps de voir comment vous avez découvert, au fond, dans ce que vous aviez reçu, quelque chose qui vous porte plus loin. D’une certaine manière il faut des racines aussi pour pouvoir s’envoler et aller au-delà, de s’envoler bien loin puisque vous êtes en Amérique latine.
C’est dans ces racines-là, spirituelles, que vous puisez pour pouvoir enraciner votre amour. C’est vraiment important.
La question spirituelle, qu’elle soit toujours ouverte pour vous comme pour chacun d’entre nous. Que cette question-là ne reste pas simplement du domaine de l’héritage familial, mais que cette question-là, spirituelle, puisse approfondir de jour en jour la présence du Seigneur, qui est plus intime à nous-mêmes que nous-même, de découvrir dans la présence du Seigneur une source, et donc de découvrir dans votre amour aussi une source qui va bien plus loin que vous, qui vous tire vers le haut.
C’est cela que vous avez remarqué, vous frappez à la porte de l’Église pour être tirés vers le haut, pour que, quelque part, cela vous transcende, parce que la communion demande la transcendance.
Si on est livré à nos psychologies blessées, on ne va pas très loin.
Si on est juste livré à notre bonne volonté, à notre générosité, il suffit qu’on nous marche sur le doigt de pied pour qu’on voit tout un océan de violence se déchaîner en nous.
Et bien non, vous dites :
Donc, à travers cette démarche, vous nous dites à chacun d’entre nous :
Chacun s’y approche, de façon différente, chacun d’entre vous : je ne vous connais pas tous personnellement : au plan spirituel vous en êtes à des degrés différents, à des étapes différentes, mais ayez foi que le Seigneur déjà vous accueille tels que vous êtes, et c’est tels que vous êtes aussi qu’Il veut vous emmener plus loin.
Apprendre à faire confiance
Ayez foi aussi qu’à travers l’engagement de Pauline et de Nicolas c’est au fond quelque chose qui nous est dit à chacun de nous :
Apprenez à faire confiance : un engagement dans la confiance, c’est cela qui est vraiment le propre du croyant.
Le propre du croyant c’est qu’il apprend à faire confiance au-delà même de ce qui peut paraître parfois difficile, et vous me l’avez partagé, il y a eu des moments de difficultés, il y a eu des moments d’éloignement géographique qui n’ont pas été faciles à vivre pour vous. Mais vous vous êtes fait confiance l’un à l’autre et dans cette confiance, vous avez grandi.
Et aujourd’hui, vous nous dites, à chacun d’entre nous de grandir dans cette confiance.
On est dans un monde où, d’une certaine manière, il faut tout contrôler, où il faudrait atteindre le risque zéro, tout dominer. Ce n’est pas la réalité humaine, qui elle, veut que l’on grandisse progressivement dans la confiance. Ça n’est pas simplement avoir le contrôle de tout.
Je trouve que c’est un beau témoignage que vous nous donnez, et si j’ai pris l’exemple de Turner, ce grand peintre impressionniste, c’est qu’il y a le Turner de la Jeunesse et il y a le Turner de la maturité. Dans le Turner de la maturité il y a trois choses qui le caractérise, l’apaisement, le calme et la plénitude.
C’est vraiment ce que je vous souhaite, chère Pauline, cher Nicolas : grandir dans cette dimension peut-être plus contemplative de votre amour, cette dimension où vous vous enracinez dans un calme et dans une plénitude qui fait que ça rayonne autour de vous, qui fait que vous portez des fruits et un fruit qui demeure.
Amen !