Évangile de Jésus-Christ selon Saint Matthieu :
Voici que quelqu’un s’approcha de Jésus et lui dit :
— « Maître, que dois-je faire de bon pour avoir la vie éternelle ? »
Jésus lui dit :
— « Pourquoi m’interroges-tu sur ce qui est bon ? celui qui est bon, c’est Dieu et Lui seul.
Si tu veux entrer dans la vie, observe Ses commandements. »
Il lui dit :
— « Lesquels ? »
Jésus reprit :
— « Tu ne commettras de meurtre, tu ne commettras pas d’adultère, tu ne commettras pas de vol, tu ne porteras pas de faux témoignage. Honore ton père et ta mère, et aussi, tu aimeras ton prochain comme toi-même. »
Le jeune homme lui dit :
— « Tout cela, je l’ai observé. Que me manque t-il encore ? »
Jésus lui répondit :
— « Si tu veux être parfait, vas, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux. Puis, viens et suis-moi. »
A ces mots, le jeune homme s’en alla tout triste car il avait de grands biens.Et Jésus dit à Ses disciples : « Amen, je vous le dit, un riche entrera difficilement dans le Royaume des Cieux. Je vous le répète : il est plus facile à un chameau de rentrer par un trou d’aiguille qu’à un riche de rentrer dans le Royaume des Cieux. »
Les disciples étaient profondément déconcertés et ils disaient :
— « Qui donc peut être sauvé ? »
Jésus posa sur eux son regard et dit :
— « Pour les hommes, c’est impossible. Pour Dieu, tout est possible. »
Alors, Pierre prit la parole et dit à Jésus :
— « Voici que nous avons tout quitté pour Te suivre : quelle sera notre part ? »
Jésus leur déclara :
— « Amen, je vous le dis, lors du renouvellement du monde, lorsque le Fils de l’Homme siègera sur Son trône de gloire, vous qui m’avez suivi vous siègerez vous aussi sur douze trônes pour juger les douze tribus d’Israël.
Et celui qui aura quitté pour mon nom des maisons, des frères, des sœurs, un père, une mère, des enfants recevra le centuple et il aura en héritage la vie éternelle.Beaucoup de premiers seront derniers, beaucoup de derniers seront premiers. »
Texte de l’homélie :
Qu’est-ce que la vie religieuse ?
C’est l’histoire de quelqu’un qui a été bouleversé par une rencontre, qui a croisé un regard, qui a entendu un appel à se donner totalement et pour toujours. Tous, nous aspirons au bonheur. Tous, depuis l’éveil de notre vie spirituelle, nous cherchons à former notre conscience et à conformer toute notre existence aux commandements du Seigneur.
Nous participons à cette grande aventure humaine et nous demandons au Seigneur dans la prière le don de sa présence, sa bénédiction, son aide, son pardon aussi, pour que nous puissions accomplir du mieux possible notre vocation d’homme et de chrétien.
Beaucoup fondent une famille, éduquent des enfants, s’engagent au service des autres, accomplissent un métier, une profession, pour subvenir aux besoins de leurs proches et de ceux dont ils ont la charge, se dévouent dans nos villages, nos villes et nos quartiers, participent à la vie associative, participent à la mission de L’Église dans leurs paroisses, leurs communautés ou leurs mouvements, pour annoncer Jésus-Christ partout où la Providence les place et les guide.
Mais certains reçoivent un appel très particulier :
« Va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux.
Puis, viens suis-moi ! »
La pauvreté, la chasteté, l’obéissance : voici ce que Jésus nous donne pour que nous soyons vraiment libres, occupés de Dieu seul, entièrement au service du Christ Sauveur et de Sa mission, à l’exemple et à la suite de Marie, l’humble servante du Seigneur, notre Mère et notre Reine.
Libres pour aimer, libres pour se donner, libres pour témoigner que Dieu est notre seule richesse et que son appel transforme notre vie en une grande et perpétuelle action de grâce.
Nous avons tout quitté pour suivre Jésus et nous n’avons pas perdu au change. De sa plénitude, nous avons tout reçu, et grâce après grâce, écrit saint Jean dans son Prologue. C’est le message que nous adresse pour nous Serviteurs de Jésus et de Marie, notre bien-aimé fondateur, le Père Lamy. L’exemple et l’enseignement de saint Bernard et de saint François de Sales témoignent de la fécondité d’une vie totalement donnée à Dieu, avec toutes ses richesses d’intelligence et de liberté, avec toutes les ressources de sensibilité et d’enthousiasme dont une nature humaine est capable. Jésus nous rend au centuple dès cette terre, à condition que nous lui donnions toute notre existence, que nous lui consacrions toute notre vie.
La consécration religieuse, c’est bien ce don total qu’un baptisé fait de toute son existence. Il ne fait pas que renoncer au péché - ce qui est le fait de toute vocation chrétienne - mais il renonce à l’usage autonome des biens de la terre, il renonce à fonder une famille et à diriger sa vie selon ce que bon lui semble, pour accueillir pleinement le projet de Dieu sur sa propre vie.
Ce projet a besoin d’être discerné au cours du postulat et du noviciat. Ce fut le chemin des apôtres et de tous ceux qui, à travers l’histoire de L’Église, ont répondu à cet appel : « Viens, suis-moi. »
En commentant ce passage d’Évangile, dans sa lettre aux jeunes du monde entier, écrite en mars 1985, saint Jean-Paul II déclarait :
Ces paroles-là indiquent alors une vocation particulière dans la communauté du Peuple de Dieu.
L’Église retrouve le ‘suis-moi’ du Christ à l’origine de tout appel au service du sacerdoce ministériel, lié simultanément dans l’Église catholique de rite latin au choix conscient et libre du célibat.
L’Église retrouve le même ‘suis-moi’ du Christ à l’origine de la vocation religieuse, où, par la profession des conseils évangéliques (chasteté, pauvreté et obéissance), un homme ou une femme adopte le programme de vie que le Christ lui-même a réalisé sur la terre, pour le Règne de Dieu.
En prononçant les vœux religieux, ces personnes s’engagent à donner un témoignage particulier de l’amour de Dieu, supérieur à tout, et également de l’appel à l’union avec Dieu dans l’éternité qui s’adresse à tous.
Il faut cependant que quelques-uns en donnent, devant les autres, un témoignage exceptionnel ».
Un témoignage exceptionnel, certes, mais qui s’enracine dans celui de tous ceux qui t’ont précédé, cher Frère Sébastien, et qui t’ont permis aujourd’hui de te consacrer totalement à Dieu.
Depuis tout jeune, tu as reçu de tes parents le témoignage du don, d’une vie entièrement consacrée aux autres et au soulagement de la souffrance et de la maladie. D’où ton premier appel à entreprendre et à réussir un cursus d’études médicales, même si tu as su prendre ton temps aussi pour réaliser ta première année de médecine.
Puis l’appel au sacerdoce, que tu as d’abord pensé réaliser au sein et au service de l’Église diocésaine de Soissons, en terre picarde.
Enfin, l’appel à la vie religieuse, alors que raisonnait dans ton cœur et depuis longtemps ce passage d’Évangile, celui-même que nous venons d’entendre.
Tu ne quittes pas la Picardie - du moins pas encore - mais tu mets ta vie à la disposition du Christ et de sa Mère, pour servir Dieu, pour annoncer l’Évangile du Salut spécialement aux jeunes, pour partager avec tes frères de communauté et avec toute notre famille spirituelle la joie de la Rédemption.
Toute vie donnée, toute vie prise au sérieux comporte son lot de souffrances, d’incertitudes, d’inquiétudes. Le religieux prend sa part des joies mais aussi des angoisses de son temps, de ceux à qui il est envoyé porter la Bonne Nouvelle. Il n’est indifférent à aucune souffrance, à aucune détresse.
La miséricorde de Dieu intervient dans un monde marqué par les ténèbres du péché, par le mal sous toutes ces formes, par la violence injuste. Mais la simple présence du religieux témoigne de la puissance de l’amour qui répare, qui sauve, qui restaure, qui réveille l’espérance et qui suscite le renouveau.
Rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus notre Sauveur, nous dit encore Saint Paul. Dieu a tout fait pour nous, jusqu’à nous donner son propre Fils.
Plus nous suivons le Fils, plus nous l’imitions, plus nous sommes ses disciples en étant chaque jour attentifs à Sa présence dans la prière et dans les sacrements, plus nous participons à Sa vie de Ressuscité, plus nous participons à Sa victoire et à Son autorité.
La vie religieuse est une vocation, un don, l’accueil d’une présence qui nous sauve et nous renouvelle. C’est aussi une mission, un combat, à recommencer tous les jours. Il n’y a rien de plus triste qu’un religieux aigri, découragé ; rien de plus lamentable qu’un consacré qui cherche à aménager les exigences du Royaume, qui s’embourgeoise, qui se trouve mille et un petits accommodements, qui n’obéit que quand il est d’accord, qui ne se passionne plus pour la mission, qui ne recherche plus à vivre vraiment de la charité fraternelle, qui fuit le combat spirituel et a perdu le zèle et la ferveur de son premier appel.
Le Père Lamy a connu lui aussi bien des embûches, bien des obstacles. Sa profonde humilité lui a fait ressentir douloureusement ses limites et sa grande pauvreté, lui qui ne se reconnaissait absolument pas l’âme d’un fondateur. Mais Dieu avait placé auprès de lui une mère et une éducatrice hors-pair. La Vierge Marie a été de tous ses combats, spécialement dans les rares moments où il a été tenté par le découragement.
C’est Elle qui aujourd’hui t’accueille dans notre famille religieuse, cher Frère Sébastien-Marie, et qui protégera ta consécration. Renouvelle lui ta confiance, suis toutes ces bonnes inspirations, accueille le don de sa présence pour toujours et partout répondre fidèlement à l’appel de Dieu, pour ton plus grand bonheur, pour la joie de tes proches et de tous ceux que tu aimes, pour la fécondité de notre famille religieuse et la fidélité à sa mission, pour le rayonnement de toute l’Église, l’Épouse immaculée du Dieu vivant.
Amen.