Porter du fruit en abondance grâce à la Foi

10 août 2021

« Ne vous conformez pas au monde présent mais transformez-vous en renouvelant votre manière de penser. »

C’est bien la clef de toute vie chrétienne qui vient au service du couple, dans la durée. Dans le mariage, on se reçoit du Seigneur. La vie de Foi nous permet de renouveler notre regard, ce qui nous aide à cheminer avec l’autre et à porter du fruit en abondance.

Écouter l’homélie

Texte de l’homélie

Frères et sœurs bien-aimés,

Nous allons méditer la parole que les fiancés ont choisie. Dans la très sérieuse préparation au mariage qu’Émilie et Stanislas ont faite, nous avons en effet parlé du choix des lectures. Nous savons que toute la Parole de Dieu nous est ouverte par la Bible. Et comme elle fait un certain nombre de pages, je leur ai donné un critère : choisissez une parole qui exprimera à l’assemblée le jour J ce que vous voulez vivre. La vraie question est qu’est-ce que vous voulez vivre, qu’est-ce qui va dire la présence de Dieu au fur et à mesure de vos années de vie matrimoniale.

La parole de Dieu est une parole vivante. Et au bout de dix ou vingt ans de vie matrimoniale, quand vous relirez cette parole, ces paroles qui viennent du Seigneur – première lecture, psaume et évangile – que vous diront-elles ?

Vous qui êtes ici et qui vous êtes donné l’un à l’autre le sacrement du mariage il y a cinq, dix, vingt ans ou plus, quelles lectures avez-vous choisies ? C’est une bonne manière de relire sa vie de couple : en quoi cette parole éclaire et illumine votre vie de chaque jour.
Comme critère, je

Passer du « je » au « nous »

La première lecture que vous avez choisie est un programme de vie.

« Ne prenez pas modèle sur le monde présent, mais transformez-vous en renouvelant votre façon de penser. »

Très certainement, un renouvellement de la manière de penser intervient dans la vie matrimoniale : il faut passer du « je » au « nous ». Ce n’est pas quelque chose de spontané dans notre société individualiste où on pense d’abord en « je ».

Dans la préparation au mariage, je pose souvent la question au fiancés en prenant un exemple : pour l’organisation de votre emploi du temps, est-ce que vous vous consultez ou est-ce que vous vous informez ? Demandez-vous l’avis à l’autre ou est-ce que vous le (ou la) tenez juste au courant ?
« Je ne suis pas là le week-end prochain, débrouille-toi comme tu l’entends ! » Vous voyez bien que ce n’est pas pareil. Il y a une vraie réforme, comme un changement de logiciel… La vie à deux, c’est vraiment passer du « je » au « nous », sans effacer nos individualités.

Il ne s’agit pas de se couler, d’effacer ce que nous sommes, au contraire. Le fait de dire « nous » nous aide dans notre vie personnelle. Au contraire, c’est très beau de se dire que la vie matrimoniale me fait advenir à moi-même. Une vraie vie d’amour me fait devenir plus moi-même que ce que j’étais avant en tant que célibataire.

« Ne prenez pas modèle sur le monde présent.
Réformez votre manière de penser. »

Ne prenez pas modèle sur le monde présent

Cela veut dire aussi : ne prenez pas modèle sur ce que nos concitoyen ont comme conception de l’amour comme on le voit dans le titre de cette émission « mariés au premier regard ». On pourrait ajouter « divorcés au deuxième »…

Nous n’avons pas cette manière de concevoir l’amour car nous ne prenons pas modèle sur le monde présent : ce n’est pas instinctif, c’est un cheminement, un vrai choix, une vraie liberté qui s’engage avec un travail de discernement au rendez-vous.

Ainsi, il est intéressant que vous ayez choisi cette parole de Saint Paul apôtre aux Romains pour cette messe. Elle éclaire votre choix, Émilie et Stan : vous voulez vraiment suivre le Seigneur dans votre vie à deux, et vous affirmez que vous aurez une autre vie à deux que lorsque vous étiez célibataires. Vous nous dites aussi que vous choisissez aussi la simplicité.

« Ne brisez pas l’élan de votre générosité, mais laissez jaillir l’esprit.
N’ayez pas le goût des splendeurs, laissez vous attirer par ce qui est simple. »

C’est vraiment un programme de vie. Et chacun suivant notre état de vie, nous pouvons lire ce programme et nous l’approprier : que ce soit dans notre réalité de célibataire, d’époux ou de consacrés dans le célibat. Nous pouvons aussi faire nôtres les paroles de l’apôtre Paul.

Puis, il y a l’évangile des talents.

La parole de Dieu, une parole de vie

Lorsqu’avec Émilie et Stan nous avons préparé cette célébration, nous nous sommes demandé si nous l’allions pas enlever une partie de ce texte, en particulier la fin. Elle n’est ni facile à lire ni à entendre un jour de noces : "ce bon à rien, jetez-le dehors là où il y a des pleurs et des grincements de dents." Est-ce pertinent de lire ces mots qui évoquent l’anticipation de l’enfer dans une journée si festive ?

Mais, il est intéressant de voir qu’il y a des grâces qui ont été données.

Par ailleurs, j’aime à croire qu’il ne s’agit pas de trois personnes, mais d’une seule à qui, à différents moments de la vie, des talents ont été donnés. Cela change l’interprétation du texte que nous connaissons tous.

Quand vous envisagez qu’il s’agit d’une seule et même personne qui a reçu des grâces dans différentes étapes de sa vie, cela nous rappelle qu’à certains moments, nous avons pu prendre des grâces à pleine brassée, et nous avons pu les redonner en abondance.
Il y a aussi eu des moments de notre vie où nous avons eu peur, comme on l’entend aussi dans la Genèse :

« J’ai eu peur et je me suis caché… »
« J’ai eu peur et j’ai caché le talent… »

Il y a des moments où nous avons eu peur du Seigneur, des moments où nous avons eu peur de l’autre dans notre vie de couple, peur de l’engagement que suppose le don de Dieu.
On le sait bien, le Seigneur attend de nous selon la mesure des dons qu’Il nous a faits.

Oui, nous avons eu peur et il est intéressant de resituer cette parabole sur nous-mêmes, dans nos étapes de vie : vie personnelle mais aussi vie matrimoniale, et il y a comme une conversion à avoir dans notre vie personnelle, dans notre vie de couple, dans la vie professionnelle, nous demandons où nous en sommes par rapport aux grâces et ces talents reçus.
A ce sujet, on peut revenir sur le mot talents qui a une signification particulière en Français : c’est à la fois un charisme et une pièce de monnaie.

Interrogeons-nous si nous n’avons pas eu ce repli sur nous-même, et si à d’autres moments, nous avons pu laisser fructifier dans la confiance et l’abandon ce qui m’a été donné. Fleurir là où l’on est planté, voilà le charisme, voilà l’appel qui vous est lancé Émilie et Stanislas.

N’ayez pas peur, comme nous le dit Jésus à travers un autre passage de la Parole. C’est cette invitation à rejeter la peur qui est mise en forme de manière plutôt sombre et violente à la fin de la parabole, avec les pleurs et les grincements de dents. Ils expriment une tristesse de ne pas redonner ce qui a été reçu.

Alors oui, frères et sœurs bien-aimés, chère Émilie, cher Stanislas, c’est une vraie grâce que vous nous faites de choisir ces passages de la parole du Seigneur, parce qu’ils parlent hautement du mariage, ils parlent hautement de la vie à deux, et généralement de toute vie chrétienne.
Nous sommes invités à réformer notre manière de faire, à nous laisser aller vers ce qui est simple, à être joyeux avec ceux qui sont dans la joie, à être d’accord entre nous, à ne pas rendre le mal par le mal, mais à redonner le bien autant que cela est possible.

Comment la Foi vient-elle soutenir la vie matrimoniale

Nous sommes invités à ce changement de mœurs et à ces changements de regard. La Foi, c’est le cheminement du regard, c’est le chemin du regard, et c’est important qu’entre vous, il n’y ait pas seulement un regard horizontal, dans le sens psychologique, mais qu’il y ait un regard de Foi entre vous deux.
Émilie et Stanislas, dans ce regard de Foi, vous vous recevez de la main du Seigneur.

Au cours de la préparation, je vous ai d’ailleurs posé la question :

« Est-ce que vous voyez l’autre comme un don de Dieu ? » centre

J’imagine que cela dépend des jours, et c’est normal. Nous en faisons tous l’expérience dans la vie en communauté. Et pourtant, c’est là où l’on porte du fruit et que l’on peut redonner en abondance, c’est quand on change son regard. Et la vie chrétienne, la vie de Foi, c’est un regard renouvelé.

C’est pour cela que l’on a besoin du sacrement. Vous le savez, le sacrement, c’est le Salut qui est appliqué à chaque circonstances de nos vies. Et le sacrement du mariage, c’est le Salut qui est appliqué au couple.

De quoi le couple a-t-il besoin d’être sauvé ? De quoi votre couple a-t-il besoin d’être sauvé ? Il est bon de se poser cette question plus précisément de ce manque d’émerveillement, de ce manque d’action de grâces, de cet enfermement sur nous-même qui nous guette tous.
On le sait, le temps peut flétrir les plus grands éblouissements.

Oui, frères et sœurs bien aimés, dans la vie matrimoniale comme dans toute vie, nous avons besoin d’être sauvés de ce regard de peur que l’évangile nomme à travers la dernière personne qui a reçu un seul talent. On peut imaginer qu’il s’agit d’un regard de comparaison, de jalousie – celui-ci en a eu plus que moi – qui a fait rentrer le serviteur dans un sentiment malsain qui l’aurait enfermé sur lui-même.

Nous sommes invités à réformer regard, et toute la vie matrimoniale est une invitation à renouveler notre manière d’entrevoir, d’envisager événements et personnes… C’est l’histoire d’une vie ! Et nous n’avons pas assez d’une vie pour changer de regard.

Et c’est pour cela que pour des moments clefs comme le mariage ou une naissance, et avec la progression dans la vie chrétienne, nous recevons les différents sacrements pour nous aider à prendre conscience que le Seigneur est au cœur de notre couple. N’ayons pas simplement un regard de face à face emprunt de nos psychologies blessées. Ayons au contraire un regard qui s’ouvre à plus grand que nous-même. Ayons un regard d’espérance.

Frères et sœurs bien-aimés, chère Émilie, cher Stanislas, c’est une vraie joie de pouvoir méditer avec vous cette parole de Dieu. Puissiez-vous être, par ce sacrement, des témoins d’un Dieu qui nous appelle des ténèbres à Son admirable lumière,

Amen !