Texte de l’homélie :
Pierre et Lucille, en vous regardant, je réalise que cela fait plus une année que je n’ai pas célébré de mariage, ce qui est du à la situation que nous connaissons. Nous en avons été privés si longtemps que c’est une belle occasion de réfléchir en profondeur sur le sens des noces.
La parole de Dieu, une parole de vie
Dans cette préparation au mariage que Pierre et Lucille ont vécu avec beaucoup de sérieux, je leur ai demandé de choisir des textes dans la Bible qui disent votre couple, qui soient une lumière pour votre couple.
Il s’agit de prendre un passage qui soit un guide, sur lequel on puisse prendre appui et que vous relirez quand vous referez mémoire de ce jour béni.
Celles et ceux d’entre vous qui se sont mariés à l’Église peuvent aussi se rappeler celui qu’ils ont choisi, même si cela fait très longtemps. Et même si on ne se souvient pas sans rechercher les cartons, c’est une belle expérience de relire ce que l’on avait choisir il y a 30 ans ou plus.
Car nous, le croyons, cette parole de Dieu nous accompagne. La Parole de Dieu n’est pas simplement un texte de sagesse, quelque chose de poétique et allégorique, mais c’est une Parole vivante !
C’est un texte qui unit la vie et la parole, à l’image de cette parole que Pierre et Lucille vont se donner l’un à l’autre va être source de vie : vie spirituelle, de vie charnelle.
Les noces de Cana ou l’expérience du manque…
Si nous sommes habitués à entendre ce texte, avons-nous conscience du fait qu’il parle d’un manqua ? Les noces de Cana se veulent comme étant l’archétype de toutes les noces, comme un modèle : voilà comment devraient toujours se dérouler des noces ! Et pourtant, au cœur de cette fête, voici le manque qui surgit :
« Ils n’ont plus de vin. »
Tout comme vous, le maître de cérémonie avait tout prévu pour que les festivités se déroulent sans encombre, sans trop d’excès espérons-le. Et cette aventure de vin manquant est étonnante car on aurait tendance à prévoir trop que pas assez, afin que les convives aient l’impression d’être bien accueillis. Et pourtant, dans ce texte de la Bible, il y a un manque…
Et ce manque peut être interprété de différentes manières et notamment avec le fait que la société est habituée au contrôle des événements. On ressent bien qu’il y a une grande pression dans ce sens à commencer par le principe de précautions, les normes sécuritaires et sanitaires qui sont appliquées dans tous les domaines de notre vie. Et dans ce cas, visiblement, le contrôle était défaillant.
Et pour vous, Lucille et Pierre, cela ne signifie-t-il pas que dans votre vie de couple, il faut laisser une place à l’imprévu, à quelque chose que vous n’aurez pas prévu ni contrôlé.
Nous connaissons le tempérament organisé de Pierre qui sait si bien planifier, comme scientifique qu’il est.
Chers fiancés, ce texte vous invite à accueillir le contre-temps. Ce n’est pas si facile, car si certains tempéraments sont plus détendus, d’autre sont plus angoissés et ont tendance à tout verrouiller.
De la confiance en Dieu surgit le miracle
Pierre et Lucille, vous entendez cette invitation à lâcher prise et à vivre dans une confiance.
Ceux qui ont beaucoup d’années de vie matrimoniale le savent bien : on a des idées précises sur comment sera notre mariage et la réalité est tout autre, pas exactement comme on l’avait prévu.
Avec ce choix d’Évangile, vous faites cette démarche de Foi et de confiance, foi et confiance étant synonymes. Cela signifie que dans votre couple, il y a une place qui est réservée à Dieu, une place dans votre couple qui ne dépend pas uniquement de ce que l’on peut prévoir.
Oui, il y aura peut-être des choses qui manqueront, et cela nous invite à une forme d’abandon à la providence, un mouvement de remise de soi-même au Seigneur dans la prière avec la certitude que Dieu y pourvoira. Car on le sait, ensuite, le miracle intervient dans la suite de l’histoire.
Si tout est bordé, tout est contrôlé, tout est organisé, où est la place pour Dieu ? De même, où est la place pour l’ami qui arrive à l’improviste ? Quelle place pour la personne qui vient frapper à votre porte ?
Et si vous ne faites que ce qui est prévu, où est la place pour l’amour ? n’est-ce pas un « tue l’amour » que de tout prévoir ?
Ainsi, il est important de pouvoir vivre cet accueil. Et à travers ce texte, vous nous dites : « Laissez une place au manque, laissez une place à la limité, à ce qui fait défaut, à votre fragilité et à votre vulnérabilité. »
Du manque à la surabondance !
Mettons-nous à la place des mariés des noces de Cana : tous seuls, ils ne vont pas y arriver…
Et ensuite, il est intéressant de voir qu’avec le miracle que Dieu opère par le Christ, c’est la surabondance ! C’est ce qu’il se passe quand on laisse une place pour Lui.
Et je fais ce lien entre le manque et la surabondance. Le chiffre n’est pas donné dans ce texte là, mais on le voit chez un autre évangéliste : il s’agit de 6 jarres de 100 litres chacune. 600 litres de vin devraient suffire pour continuer de la fête…
Ce débordement nous parle aussi de gratuité. Et c’est justement parce que Dieu est intervenu alors qu’ils n’avaient pas prévu.
C’est intéressant de pouvoir méditer sur ce sujet, car cette surabondance est pour chacun d’entre nous. Nous sommes tous invités à nous en remettre au Seigneur avec foi et confiance, à demander à Jésus, par Son Esprit-Saint, de nous rejoindre là où nous en sommes.
Où que vous en soyez dans votre vie spirituelle, restez en chemin, ne vous laissez pas aller dans une sorte de raidissement intérieur qui ne laisserait pas à la place à la nouveauté. Si vous avez une spiritualité ouverte et que vous êtes en quête d’une rencontre avec le Christ, vous bénéficierez de cette surabondance, de ce surplus non prévu que le Seigneur va donner.
Si ce n’est pas la première fois que nous entendons ce texte à un mariage, il n’en est pas moins pertinent car il nous dit des choses extrêmement profondes.
Pierre et Lucille, c’est cette grâce que nous allons demander pour vous : ce lâcher prise, cet accueil. Déjà, dans votre couple, il y a des tas de choses qui sont arrivées que vous n’aviez pas prévues et qui sont belles, à commencer par votre rencontre !
N’oubliez pas de voir l’autre comme un don de Dieu, d’envisager la vie comme un cadeau, quelque chose qui se donne au delà même de ce que l’on peut prévoir.
Demandons cette grâce les uns les autres, demandons d’être confortés dans la confiance,
Amen !