Texte de l’homélie du mariage :
Chère Bernadette, cher Grégoire,
Un journaliste facétieux posait la question suivante au Pape Benoît XVI :
« Combien y a-t-il de chemin pour aller vers Dieu ? »
Et ce journaliste - fort de la mauvaise réputation que ses confrères avaient fait de ce saint pape - pensait qu’il allait répondre "une seule foi, celle de la foi catholique".
C’était compter sans l’intelligence de ce grand universitaire et en même temps sa finesse spirituelle.
Il a répondu ainsi : « Il est autant que de personnes que de chemins vers Dieu. »
Lorsque vous m’avez demandé de vous préparer au mariage, chère Bernadette, cher Grégoire, j’ai pensé à cette réponse du pape Benoît XVI parce que votre cheminement est singulier.
Vous me direz, n’est-ce pas le cas de tous les couples, oui certainement, mais il m’arrive de temps à autres, de marier des couples d’étudiants, c’est un peu plus commun, des couples qui n’ont pas ce même cheminement que vous. J’ai découvert, au fur et à mesure de la préparation que vous avez faite très sérieusement, comment vous aviez un vrai désir de répondre à l’appel du Seigneur.
Vous avez une maturité humaine, c’est beau comme engagement, on le sait bien combien, avec l’âge, parfois il nous est difficile de quitter nos habitudes. Vous allez commencer la vie commune après le mariage et cette vie commune demande une adaptation, de laisser ses habitudes et parfois ses propres travers, ses certitudes, que ce soit en matière de cuisine, ou en matière de rangement.
Mais le Seigneur nous demande vraiment d’abord de répondre à cet appel.
Vous aurez un temps d’adaptation, c’est absolument évident, et c’est heureux, et en même temps je trouve beau la manière dont vous avez vraiment vécu cette préparation. Vous vous êtes découverts, vous vous êtes apprivoisés, progressivement, vous vous êtes rapprochés l’un de l’autre, vous avez découvert en l’autre à la fois sa beauté et à la fois ses limites et vous aimez et la beauté et les limites de l’autre.
C’est ainsi qu’i en va pour que l’amour puisse grandir. C’est accueillir l’autre de la main du Seigneur.
Parce qu’au fond, vous répondez à un appel.
Et c’est vrai pour tous ceux qui, dans l’assemblée, se sont mariés, ont pris cet engagement, ils répondent à un appel.
Dieu appelle un homme et une femme à construire un foyer, à construire une vie de couple, et c’est appel là qui vous rendra féconds, c’est cet appel-là qui vous permettra de porter du fruit.
La lecture de l’évangile de Saint Jean que vous avez choisi est très heureux, on connait bien ce passage du commandement nouveau :
« Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ».
Mais aimer n’est pas spontané.
Aimer demande toujours de rentrer dans une logique de don envers l’autre et cette logique de don demande aussi que nous puissions nous défaire de tout ce qui est égoïsme, orgueil, volonté de dominer, volonté de s’approprier l’autre, volonté d’être le plus fort et d’avoir le dernier mot. Il nous faut nous défaire de ces travers pour rentrer dans le commandement nouveau.
C’est ce que Saint Jean relate des paroles de Jésus :
« Tout sarment sec, on le jette au feu ».
Tout ce qui n’est pas uni à l’amour de Dieu, on le jette au feu. Et il nous faut nous laisser émonder.
A travers cette vie commune que vous commencez, vous commencez un chemin d’émondage, pour couper en vous, dans vos attitudes, ce qui peut aussi ne pas être selon le cœur de Dieu.
Que chacun d’entre nous reprenne conscience que l’amour c’est rentrer aussi dans un combat spirituel, ce n’est pas spontané, c’est aussi demander au Seigneur qu’il nous transforme, qu’il nous modèle, qu’il fasse de nous des hommes et des femmes qui sommes attachés à faire le bien.
Alors oui, nous pourrons porter du fruit.
La grande question de nos vies, c’est la fécondité de nos vies. On le sait bien, la fécondité du couple, bien au-delà des enfants, vient de leur désir de ne faire qu’un. C’est de là que viennent la fidélité et la fécondité du couple. Il faut demander cette fécondité, parce qu’au fond c’est en étant ami de Jésus que je peux vraiment rentrer dans cette fécondité et porter du fruit. Porter du fruit, cela veut dire que ma vie ai du sens, que ma vie de couple ai du sens et que ma vie personnelle et matrimoniale ai du sens. C’est être proche du Seigneur, de ne pas lâcher sa main, d’être à ses côtés. On le sait bien, sans une dimension transcendante dans le couple, c’est le face à face misérable de deux psychologies plus ou moins équilibrées. C’est tout.
Alors que nous, nous croyons que le mariage c’est d’abord l’union de deux pauvres qui viennent aux pieds du Seigneur et qui lui disent : « je ne sais pas faire, je ne sais pas aimer, enseigne-moi ».
Comme il est bon de refaire mémoire de cela. C’est à mesure que l’on découvre les fragilités de l’autre que l’on peut grandir dans une communion sincère. C’est à mesure que l’on découvre ses propres fragilités qu’on peut rentrer dans un chemin de pardon, et de profonde communion. Sans cela, c’est bien difficile de durer longtemps et avec l’allongement de la durée de la vie, c’est bien pour 40 ans ! Mais vous nous dites : « c’est possible ! » Non pas par nos forces, et vous avez éprouvé aussi à travers cette préparation, vos propres limites, vous nous dites c’est possible grâce à la confiance. Pas de confiance, pas d’amour, pas d’amour durable, pas d’amour au long cours.
Frères et sœurs bien aimés, demandons au Seigneur à travers cette célébration, qu’il nous aide à refaire nos forces.
Venons puiser au corps et au sang du Seigneur cette invitation à nous greffer sur lui.
Et si nous nous sommes éloignés, et peut-être certains d’entre vous ne sont pas habitués à une vie spirituelle, qu’ils se sentent appelés à se rapprocher de cette source, qu’ils viennent boire à la source pour que nus puissions être, avec Bernadette et Grégoire, les témoins d’un Dieu qui appelle des ténèbres à son admirable lumière.
Amen !