Homélie du jour de Pâques

20 avril 2022

Simon-Pierre, qui le suivait, arrive à son tour. Il entre dans le tombeau ; il aperçoit les linges, posés à plat, ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus, non pas posé avec les linges, mais roulé à part à sa place.

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Texte de l’homélie :

Frères et sœurs bien-aimés, nous célébrons aujourd’hui un événement qui a changé l’histoire de l’humanité : la résurrection du Christ. Notre foi n’est pas une philosophie. Ce n’est pas une construction de l’esprit humain ou le fruit de l’imagination. Elle accueille un événement qui nous dépasse et nous change la vie. Elle nous permet d’entrer en communion avec Jésus vivant.

La résurrection du Christ : « Christ est ressuscité », le fait

Il est bon de revenir aux premiers récits de Pâques pour voir combien cette bonne nouvelle n’était pas dans les projets des apôtres.

Le tombeau vide

Manifestement les disciples ne s’y attendaient pas. Mais c’est une réalité incontournable à laquelle ils ont été confrontés. En soi, ce n’est pas une preuve définitive car on pourrait invoquer d’autres explications de l’absence du corps. Mais cela a été pour eux le premier choc.

Les apparitions

Là encore il y a un décalage entre le Jésus qu’ils voudraient voir (un Jésus réanimé) et le Jésus qu’ils voient (un Jésus ressuscité). Ces apparitions ne sont pas une expérience mystique mais une rencontre réelle avec une personne qui, de l’extérieur, s’approche d’eux.

La cohérence avec les Écritures

Cette cohérence les incite à intégrer le scandale de la passion et de la mort de Jésus qui était pour eux jusqu’alors inaudible. Il suffit de penser aux disciples d’Emmaüs qui s’éloignent de Jérusalem tout tristes. « Selon les Écritures » est le refrain qui revient fréquemment lorsqu’il s’agit de la résurrection.

Dans tous les trois cas, l’accueil de la nouvelle de la résurrection a rencontré des résistances. Dans l’évangile d’hier soir, les apôtres qualifiaient de délirantes les explications des femmes. Le premier moment est plutôt l’incrédulité. Jusque là, Marie-Madeleine, de Pierre et de Jean, si on leur avait posé la question « qu’est-ce que la résurrection ? » auraient sans doute parlé d’une sorte de réanimation, un peu comme celle de Lazare. C’est plus facile à comprendre : on efface d’un revers de main l’épisode de la passion et de la mort pour revenir à la période où Jésus avait du succès auprès des foules. On fait un petit retour en arrière, comme une machine à remonter le temps.

Grâce à Dieu, les apôtres ont accepté de se déplacer. Ils ont accepté d’entrer dans quelque chose de fondamentalement nouveau : la résurrection n’est pas un retour en arrière mais un saut en avant vers une nouvelle manière d’être homme qui leur est inconnue. Ce faisant, tout d’un coup, tout s’est éclairé. Ils ont pu relire les événements et les paroles de Jésus avec une lumière nouvelle.

Nous sommes appelés à revenir sans cesse à ce cœur de notre foi qui est exprimé dans le kérygme et qui est le noyau de la prédication des apôtres.

Notre résurrection : « pour nous » (cf. Rm 8, 31-39)

Le deuxième pas consiste à ne pas se limiter à affirmer la vérité de la résurrection du Christ en elle-même mais à en voir les conséquences pour nous. La résurrection ne se limite pas à nous donner une « garantie » sur Jésus (Ac 17, 31 ; cf. Benoît XVI 5 novembre 2008). Elle nous ouvre un horizon car si Jésus est ressuscité, ce n’est pas pour lui, c’est pour nous. Le but de Jésus, ce n’est pas de montrer qu’il avait bien raison. Son but, c’est de nous sauver. La résurrection ne prouve pas seulement la vérité du christianisme, elle fonde la réalité de la vie chrétienne ; elle alimente la fontaine de la grâce.

En cela nous pouvons aussi nous appuyer sur le témoignage d’innombrables chrétiens pour qui la foi en la résurrection de Jésus a changé la vie.

Le pardon de nos péchés

Ce n’est sans doute pas un hasard que ce soit Marie-Madeleine qui soit la première à qui est faite l’annonce de la résurrection. Elle est l’humanité pécheresse qui découvre son Sauveur. Quand Jésus apparaît à ses apôtres le soir de Pâques, il leur confie le pouvoir de pardonner les péchés.

« Tout homme qui croit en lui reçoit par lui le pardon de ses péchés. » (Ac 10, 43)

Si le Christ n’est pas ressuscité, nous sommes encore dans nos péchés. Mais la résurrection fait que nous ne sommes pas enfermés dans notre passé et nos péchés. Jésus nous ouvre un chemin. On n’efface pas le passé – Jésus apparaît avec les plaies de la croix après sa résurrection – mais une vie nouvelle est possible. L’espérance est sortie du tombeau.

L’accès à une vie nouvelle

La résurrection nous ouvre l’éternité. Mais l’éternité n’est pas seulement pour la fin de notre vie terrestre. Elle nous est déjà offerte aujourd’hui. C’est aujourd’hui qu’il faut vivre, pas demain ! Il ne s’agit pas de vivre une autre vie mais de vivre autrement notre vie. Cette vie nouvelle consiste à laisser la vie de Jésus se déployer en nous :

« Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi. » (Ga 2, 20)

Si Jésus est mort et ressuscité,

« C’est pour que nous menions une vie nouvelle, nous aussi, comme le Christ qui, par la toute-puissance du Père, est ressuscité d’entre les morts » (Rm 6, 4)

Dans l’épître aux Colossiens, quelques versets après le passage que nous avons entendu tout à l’heure, saint Paul explicite en quoi consiste la vie nouvelle que Jésus nous offre par sa résurrection :

« Revêtez-vous de tendresse et de compassion, de bonté, d’humilité, de douceur et de patience. Supportez-vous les uns les autres, et pardonnez-vous mutuellement si vous avez des reproches à vous faire. Le Seigneur vous a pardonnés : faites de même. » (Col 3, 12-13)

Jésus nous donne la grâce de ne pas nous laisser entraîner par nos réactions héritées du péché. Il nous donne d’être vainqueurs du mal par le bien.

« Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais sois vainqueur du mal par le bien. » (Rm 12, 21)

Comme le disait l’épître lue lors de la vigile pascale, la toute-puissance du Père qui a ressuscité Jésus d’entre les morts est aussi à l’œuvre en nous pour que nous menions une vie nouvelle (cf. Rm 6, 4).

Très concrètement, en ce jour de Pâques, nous pourrions demander au Père du Ciel d’œuvrer en nous de sorte que notre regard sur les autres soit un regard qui donne la vie et non pas un regard qui enferme les autres dans un tombeau. Pâques est le jour de l’espérance pour soi et pour les autres.

Une possibilité d’intégrer la souffrance et la mort

La résurrection de Jésus nous promet-elle une vie épargnée par la souffrance et la mort ? Évidemment non. Sinon nos églises seraient certainement pleines. Nous aimerions tellement que la résurrection nous rende invulnérables. Le grand saint Paul est comme nous. Il aurait bien voulu que Dieu lui retire cette écharde qui le faisait souffrir :

« Par trois fois, j’ai prié le Seigneur de l’écarter de moi. 09 Mais il m’a déclaré : ’Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse.’ C’est donc très volontiers que je mettrai plutôt ma fierté dans mes faiblesses, afin que la puissance du Christ fasse en moi sa demeure. » (2 Co 12)

Cela marque vraiment un avant et un après dans la vie des apôtres. Une fois qu’ils ont la foi en la résurrection de Jésus chevillée au corps, les apôtres n’ont plus le même rapport à la souffrance. On le voit dans les Actes des Apôtres : après avoir été fouettés,

« Ils repartaient tout joyeux d’avoir été jugés dignes de subir des humiliations pour le nom de Jésus. » (Ac 5, 41)

Par la résurrection, les choses terrestres se trouvent remises en perspective. Les difficultés de la vie, qu’elles soient matérielles, physiques, psychiques, … ne sont pas la fin de tout. On passe tous par la Croix. On ne peut pas l’éviter. Mais nous pouvons toujours y découvrir le chemin qui conduit à la vie. Il s’agit de parvenir à goûter la vie telle qu’elle nous est donnée.

Nous pouvons déjà goûter une véritable joie, qui est encore une joie dans la foi. Grâce à la résurrection de Jésus, les béatitudes trouvent un sens. Comme le disait très bien Benoît XVI, elles sont la traduction – dans notre vie chrétienne – du mystère de la mort et de la résurrection.

Notre horizon n’est plus la tombe mais l’éternité.

« Si c’est pour cette vie seulement que nous avons mis notre espoir dans le Christ, nous sommes les plus à plaindre de tous les hommes. Mais non ; le Christ est ressuscité d’entre les morts, prémices de ceux qui se sont endormis. » (1 Co 15, 19-20)

Conclusion :

En ce beau jour de Pâques, je pense qu’il ne s’agit pas seulement d’être confortés par rapport à la vérité de la résurrection de Jésus. Nous sommes appelés à être renouvelés dans notre foi en la puissance de cette résurrection. La puissance qui a relevé Jésus d’entre les morts peut aussi agir en nous et nous faire vivre d’une vie nouvelle. Mais elle ne peut le faire que si elle rencontre en nous la foi.

Nous avons la chance de pouvoir nous appuyer sur le témoignage d’innombrables chrétiens qui ont osé y croire, et en premier lieu la Vierge Marie et tous les saints. Nous pouvons nous nourrir de ces témoignages et aussi nous appuyer sur l’intercession de tous ces disciples de Jésus.

Que Marie nous aide à vivre d’une communion plus profonde avec le Seigneur ressuscité !

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre des Actes des Apôtres 10,34a.37-43.
  • Psaume 118(117),1.2.16-17.22-23.
  • Lettre de saint Paul Apôtre aux Colossiens 3,1-4.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean 20,1-9 :

Le premier jour de la semaine, Marie Madeleine se rend au tombeau de grand matin ; c’était encore les ténèbres. Elle s’aperçoit que la pierre a été enlevée du tombeau.
Elle court donc trouver Simon-Pierre et l’autre disciple, celui que Jésus aimait, et elle leur dit : « On a enlevé le Seigneur de son tombeau, et nous ne savons pas où on l’a déposé. »
Pierre partit donc avec l’autre disciple pour se rendre au tombeau.
Ils couraient tous les deux ensemble, mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre et arriva le premier au tombeau. En se penchant, il s’aperçoit que les linges sont posés à plat ; cependant il n’entre pas.
Simon-Pierre, qui le suivait, arrive à son tour. Il entre dans le tombeau ; il aperçoit les linges, posés à plat, ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus, non pas posé avec les linges, mais roulé à part à sa place.
C’est alors qu’entra l’autre disciple, lui qui était arrivé le premier au tombeau. Il vit, et il crut.
Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas compris que, selon l’Écriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts.