Texte de l’homélie :
Mes biens chers Frères,
Depuis plus de dix jours nous avons commencé notre route vers Pâques. Nous avons certainement pris quelques bonnes résolutions qui puissent préparer nos cœurs à vivre pleinement le grand mystère de la Semaine Sainte : la passion, la mort et la résurrection de Notre Seigneur. Déjà nous nous réjouissons de la lumière qui va jaillir du tombeau le matin de la Résurrection. Cette lumière disperse les ténèbres du péché et de la mort, elle témoigne de la victoire du Ressuscité et elle éclaire tous ceux qui gisent dans l’ombre de la mort, c’est-à-dire chacun d’entre nous.
Dimanche dernier, nous avons médité sur les tentations que Notre Seigneur a accepté de subir au début de sa vie publique. Aujourd’hui la sainte liturgie nous fait contempler le Christ transfiguré. Or cet épisode se situe alors que Jésus prend la route de Jérusalem pour y subir la trahison, le rejet, la douleur de sa passion, l’angoisse de son agonie et le supplice de sa croix. C’est dire si cet évangile nous situe déjà dans la perspective du mystère pascal, un mystère de mort et de résurrection qui nous obtient tout à la fois le pardon de tous nos péchés, la grâce du salut et le don de la vie éternelle.
Si l’Église nous fait méditer cet épisode si important de la vie de Notre Seigneur c’est bien pour nous soutenir dans nos efforts de conversion et de réforme spirituelle. Par la foi, il nous est fait le don, la grâce, de pouvoir contempler le visage transfiguré de Jésus, notre Dieu et notre sauveur. Durant sa vie terrestre, Jésus laisse deviner sa divinité par ses miracles et par l’autorité de sa parole. C’est par sa vertu divine qu’il a terrassé le démon en ne succombant point à la tentation. Mais aujourd’hui, devant ses trois apôtres préférés, il se révèle comme le Fils éternel et bien-aimé de Dieu en qui le Père a mis tout son amour. Comment ne pas l’aimer ? Comment ne pas nous mettre à son service ? Comment ne pas le suivre sur le chemin de sa passion pour pouvoir être à notre tour transfiguré par la lumière de sa résurrection ?
Cet épisode, cette manifestation, cette grande révélation du mystère même de Jésus a été préparée dans l’Ancien Testament. Lorsque Dieu envoie à son peuple un libérateur en la personne de Moïse, lorsqu’il suscite un prophète comme le grand Élie, il manifeste sa fidélité et son dessein de salut. L’alliance célébrée avec le peuple dans le désert après la sortie miraculeuse d’Égypte prépare le peuple juif à accueillir en son sein Dieu lui-même qui vient faire alliance directement et personnellement avec l’humanité tout entière. La prédication de feu du prophète Élie rappelle les exigences de la loi aux fils d’Israël qui succombent à la tentation de l’infidélité et de l’idolâtrie. Mais cette parole prépare aussi les cœurs bien disposés, le cœur des humbles qui se reconnaissent incapables de vivre vraiment les exigences de la loi.
Élie et tous les autres prophètes annoncent que Dieu lui-même va leur donner un cœur de chair et non de pierre, un cœur capable d’aimer vraiment, un cœur prompt à obéir et fort face aux tentations, un cœur sage et intelligent, un cœur généreux et noble, un cœur qui aime de l’amour même de Dieu. La contemplation du Seigneur Jésus transfiguré nous révèle quelle est notre vocation et notre destinée : être à notre tour transfiguré par la gloire de Dieu, par cette nuée lumineuse qui a accompagné le peuple d’Israël durant toute sa marche au désert, qui a reposé sur le Temple de Jérusalem et qui aujourd’hui enveloppe le Christ et ses disciples. La tradition théologique et spirituelle de l’Église a vu dans cette nuée le signe de la présence du Saint-Esprit qui nous révèle la gloire du Père et nous révèle l’identité véritable du Fils de Dieu, devenu pour notre salut le Fils de l’homme.
Les apôtres bénéficient de cette révélation pour leur permettre de surmonter le scandale de la croix. En effet, ce sont les trois mêmes disciples, Pierre, Jacques et Jean qui dévisageront à Gethsémani le visage souffrant de Jésus, défiguré par l’angoisse épouvantable que Notre Seigneur devra assumer pour nous racheter, pour nous sauver, pour nous arracher à l’horreur du péché et au désespoir d’une mort certaine. Mais dans la croix du Christ, Dieu manifeste tout à la fois son amour et sa gloire, c’est déjà un cri de victoire que la liturgie nous fait entonner le Vendredi Saint. L’amour du Christ pour son Père et pour nous, ses frères, a vaincu la haine, le péché et la mort.
Plus rien ne peut nous séparer de la gloire de Dieu et de la lumière de son éternité.
Au seuil du nouveau millénaire, Saint Jean-Paul II nous invitait à contempler le visage du Christ, ce visage tout à la fois défiguré par nos péchés et transfiguré par la gloire de la résurrection, ce visage qui irradie l’amour miséricordieux de Dieu pour nous et qui nous communique le pardon de toutes nos fautes. Mais pour contempler ce visage, pour faire l’expérience de la lumière et de l’amour divins qui s’en dégagent, il faut le chercher, et le chercher vraiment. Voilà pourquoi l’Église nous invite, durant ce temps de préparation et de pénitence, à un effort accru de prière.
Mettons à profit ces jours pour consacrer plus de temps à la lecture et à la méditation de la Parole de Dieu : Nous pourrons faire l’expérience de la gloire divine parce que nous aurons écouté Jésus, le Fils de Dieu, tel que nous l’a transmis les prophètes et les apôtres.
Oui, mes bien chers frères, nous devons rendre grâce pour ce temps béni du Carême parce qu’il nous donne l’occasion de mieux découvrir le mystère de notre vocation. Déjà depuis le jour de notre baptême, nous sommes transfigurés par l’amour de Dieu et nous devons communiquer cette lumière à ceux qui nous entourent, pour que, de proches en proches, elle atteigne les limites de la terre.
Ainsi soit-il.
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Références des lectures du jour :
- Première lettre de saint Paul Apôtre aux Thessaloniciens 4,1-7.
- Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 17,1-9 :
En ce temps-là, Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère, et il les conduisit à l’écart, sur une haute montagne.
Et il se transfigura devant eux : son visage resplendit comme le soleil, et ses vêtements devinrent blancs comme la lumière.
Et voilà que Moïse et Élie leur apparurent, conversant avec lui.
Prenant la parole, Pierre dit à Jésus :
— « Seigneur, il nous est bon d’être ici ; si vous le voulez, je ferai ici trois tentes, une pour vous, une pour Moïse et une pour Élie. »
Il parlait encore, lorsqu’une nuée lumineuse les couvrit, et voilà que du sein de la nuée une voix dit :
« Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai mis mes complaisances : écoutez-le. »
En entendant, les disciples tombèrent la face contre terre et furent saisis d’une grande frayeur.
Et Jésus, s’approchant, les toucha et dit :
— « Levez-vous, ne craignez point. »
Levant les yeux, ils ne virent plus que Jésus seul.Comme ils descendaient de la montagne, Jésus leur fit ce commandement : « Ne parlez à personne de cette vision, jusqu’à ce que le Fils de l’homme soit ressuscité des morts. »