Homélie de la solennité de Sainte Marie, Mère de Dieu

2 janvier 2023

Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur.

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Texte de l’homélie

Chers frères et sœurs

On peut dire que Noël est comme le mystère d’une descente : Dieu vient sur la terre ! Il y a un beau choral de Bach qui dit, la musique reflétant ce mouvement :

Il ne s’agit pas d’une altitude physique, comme si Dieu était placé sur un trône élevé, et qu’Il en descendait solennellement les degrés pour venir jusqu’à nous… Non, car la descente de Dieu manifeste une attitude intérieure du Seigneur, c’est le signe de Son amour pour les hommes. Car, comme le dit le Saint Curé d’Ars, le propre de l’amour c’est de s’abaisser, du ciel sur la terre, de la gloire à l’humilité, de Dieu à l’homme…

Mais, tout ce qui se voit de l’extérieur ce n’est que le début d’un voyage, car il doit se continuer à l’intérieur. C’est l’extraordinaire mouvement de chute de Dieu : Dieu tombe en notre monde, mais Sa chute ne s’arrête pas une fois qu’Il est sur terre. Il veut tomber en nous, Il veut tomber dans nos cœurs pour rejoindre le plus profond.
Vous connaissez cette phrase de Saint Augustin :

« Mon amour, c’est mon poids »

Et voilà que Dieu est entraîné par son amour. Saint Jean de la Croix prend la belle image de cette pierre qui tombe mais que la surface de la terre arrête. S’il n’y avait pas cette surface, elle continuerait encore son chemin vers le centre de la terre.

Quand il est dit que « Marie retenait ces événements dans Son cœur », cela veut dire qu’Elle donne la possibilité à cette parole de continuer à tomber au plus profond de Son cœur, et quand Son cœur est atteint, il est transfiguré.

Marie est justement Celle qui n’oppose aucune résistance. On l’a chanté dans les antiennes, Elle est comme cette toison sur laquelle descend la rosée, cette terre sur laquelle descendent la pluie et la neige et qui ne remontent pas au ciel sans avoir porté du fruit.
Voilà l’exemple que Marie nous donne pour que nous laissions nous aussi Dieu tomber en nous. Pour cela, il faut le silence, le calme au fond de nous et la vérité. Tout autre mouvement troublerait cette lente descente. C’est ce que nous dit le prophète :

« Dans le silence et le calme, était votre salut. »

Que se passe-t-il quand le cœur est atteint ?

Que se passe-t-il quand Dieu a rejoint cet intime de notre être et que notre être s’unifie, de dispersé qu’il était ? Comme un aimant qui tout d’un coup va agréger autour de lui la limaille de fer répandue.

C’est très exactement ce que fait la Vierge Marie.

Dans l’Evangile de ce jour, nous avons entendu :

« Marie retenait et méditait ces événements dans son cœur. »

Le terme le plus proche est qu’elle « symbolisait » ces événements dans Son cœur, c’est à dire qu’Elle en faisait la synthèse. De dispersés qu’il étaient, Elle en faisait une unité. Ainsi, tous ces événements sont comme des bribes du mystère de Jésus, de Sa personnalité : le recensement, les bergers, les mages, la fuite en Égypte sont comme les pièces d’un puzzle qu’on assemble pour qu’apparaisse l’image, que l’on puisse en comprendre le sens.

Ainsi Marie ne veut rien laisser perdre pour avoir cette image du Christ la plus fidèle de ce que lui offre le Seigneur à travers tous ces événements. Elle se souviendra de toutes ces paroles. Et ce sera ensuite le principe de toute Sa vie : Elle ne va rien manquer des gestes et des paroles de Jésus, des miracles et des guérisons opérées par Lui.

Sans doutes vous rappelez-vous de ce passage film de Mel Gibson, au moment de la Passion, après la flagellation, Elle va prendre un linge et Elle va recueillir avec ferveur le sang qu’avait fait couler le Seigneur pour que rien de Sa sainte humanité ne soit perdue.

« Marie gardait toutes ces choses dans son cœur… »

Ainsi, Elle voit l’unité de la personne du Christ, le mystère d’unifier le Ciel et la Terre.

,du Christ. et alors elle comprend tout le sens du nom qui a été donné à cet enfant : Jésus, Dieu sauve. Oui La Vierge Marie est mère du Christ, à la fois homme et Dieu, chair et esprit, Voilà la mère de Dieu c’est aussi la mère de l’unité.

Pourquoi Marie peut-elle accéder à cette vision ? C’est justement parce qu’Elle est profonde, Elle n’est pas superficielle. Si nous sommes superficiels, nous divisons. Nous restons à la surface, avec nos opinions politiques, nos sensibilités diverses au sein d’une famille, en communauté. Et si nous en restons là, nous nous diviserons, nous nous déchirerons.
Si nous allons plus profond, nous allons percevoir ce qui fait notre unité : nous sommes fils et fille de Dieu, nous sommes tous appelés par Lui, chacun et chacune. Alors, l’unité peut s’opérer.

Marie mère de l’unité

Marie unifie en Elle la vie de Jésus, mais elle va aussi unifier notre vie si nous la Lui confions.

Voici une petite anecdote : Il a quelques années, nous avions un petit groupe de pop louange, et la presse, curieuse de ce phénomène des moines rockers, avait invité les frères à présenter ce qu’ils faisaient au JT de 20h. Cette journal était présenté par une journaliste vedette. Ainsi, un de nos frères avait dû se rendre dans les studios de TF1 et il avait assisté à l’élaboration du JT. La journaliste devait alors visionner chaque reportage proposé et se prononçait rapidement avec le verdict : « poubelle » ou « on garde »… Ce qui me fait réfléchir c’est que cela ressemble à ce que nous faisons parfois dans notre vie : mettre à la poubelle des épisodes peu glorieux, marqués par l’échec, le deuil, la souffrance.

Or, le Salut, c’est de ne rien jeter ! Le Salut, c’est tout garder ! Etiam peccata ! Même le péché qui, s’il est donné à Dieu, devient chemin de grâce.
Ainsi, quand je suis dans la détresse, dans l’échec et même dans le péché, Marie continue à me regarder et à m’aimer dans l’amour qu’Elle me porte. Quand je suis dans le bonheur, dans le succès, dans une relation qui épanouit mon cœur, Elle continue à me regarder et à m’aimer, Elle garde toutes ces choses dans Son cœur, et Elle en fait l’unité pour que ma vie devienne une histoire sainte.

Marie est mère de l’unité

Elle est la mère de l’unité de la personne du Seigneur, Mère de l’unité de nos vies, aussi Mère de l’unité de notre monde. Elle regarde chacun des hommes à la manière de Dieu. Et en chacun Elle voit briller l’image de Son Fils, et ainsi, chaque âme trouve dans Son cœur sa place.
Nous-mêmes, nous faisons pourtant un tri entre les bons et les mauvais. Même le grand Dante ne s’était pas privé de faire un tri dans la divine comédie en envoyant en enfer ses ennemis personnels. Même sans être écrivain talentueux, nous avons aussi cette tendance là…

A l’inverse, Marie porte cette affection à chacun, parce que, comme Dieu, Elle ne veut qu’aucun d’entre-nous ne se perde. C’est la volonté du Père, c’est donc aussi la Sienne. Elle veut par là réaliser l’unité de l’Humanité, cette unité qu’est l’Église, cette unité qu’est le Christ total, Lui qu’Elle veut mettre au monde. C’est cette maternité sur l’Église qui est si belle. Ainsi, Elle achève Son rôle de Mère.

Le Père Lamy disait :

« Si, dans sa colère, Dieu brisait le monde, Marie lui en rapporterait les morceaux… »

Ne nous laissons pas impressionner par cette formule qui peut sembler faire date et que nous pourrions traduire par : Si Dieu laissait le monde accomplir son dynamisme de désagrégation à cause du péché qui nous divise et nous éloigne, Marie continuerait d’exercer cette force d’attraction sur chacun d’entre nous pour qu’en Elle, puisse se réaliser notre unité.
Elle est le principe de l’unité dans notre monde, dans nos familles et dans nos communautés.

Alors, en ce premier jour de l’année, journée de la paix, confions Lui particulièrement la Paix : De chaque côté de la frontière, il y a des cœurs qui l’aiment, il y a des cœurs qu’elle aime. De chaque côté des frontières, Marie est aimée et veut aimer.

Qu’advienne ainsi la Paix !

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre des Nombres 6,22-27.
  • Psaume 67(66),2b.3.5abd.7.8b.
  • Lettre de saint Paul Apôtre aux Galates 4,4-7.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 2,16-21 :

En ce temps-là, les bergers se hâtèrent d’aller à Bethléem, et ils découvrirent Marie et Joseph, avec le nouveau-né couché dans la mangeoire.
Après avoir vu, ils racontèrent ce qui leur avait été annoncé au sujet de cet enfant. Et tous ceux qui entendirent s’étonnaient de ce que leur racontaient les bergers.
Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur.

Les bergers repartirent ; ils glorifiaient et louaient Dieu pour tout ce qu’ils avaient entendu et vu, selon ce qui leur avait été annoncé.

Quand fut arrivé le huitième jour, celui de la circoncision, l’enfant reçut le nom de Jésus, le nom que l’ange lui avait donné avant sa conception.