Texte de l’homélie de mariage :
Chère Claire, cher Stanislas, chers frères et sœurs,
Quand il s’est agi de choisir les textes de cette célébration, j’ai donné aux fiancés un critère de choix. Ce critère c’est que la Parole, qu’ils vont choisir dans la célébration de leur mariage, puisse être comme une source qui les accompagne tout au long de leur vie.
Il pourrait être bon, pour ceux d’entre vous qui avez reçu ce sacrement du mariage, de faire mémoire de la Parole de Dieu que vous aviez choisi au moment de la célébration de vos noces.
Cette Parole de Dieu est une parole vivante, nous le savons bien, c’est une Parole qui nous accompagne, qui est source de vie, qui nous donne une lumière, parce que Dieu lui-même est lumière.
Le mariage, un appel à la sainteté, soutenu par la grâce
On voit bien déjà à travers l’Ancienne Alliance, dans le livre de Tobie, ce désir de se confier au Seigneur pour pouvoir fonder son foyer :
Je pense que dans votre démarche, comme de la démarche de tous foyers chrétiens, il y a cette dimension de dire que c’est une grâce qui vous a appelé à faire route ensemble.
Vous répondez à un appel.
Le Concile Vatican II le rappelle très bien, il dit que cet appel à la sainteté que les époux reçoivent est un véritable appel, un appel qui vient de Dieu et que vous voulez construire avec le Seigneur lui-même.
Ce n’est pas simplement une générosité humaine, même si elle est au rendez-vous, un amour simplement humain, mais c’est quelque chose qui transcende votre amour. C’est pour cela que vous venez devant l’autel du Seigneur, Claire et Stanislas, pour confier cet amour, parce que vous prenez conscience que cet amour est en vous, mais qu’en même temps, comme toute réalité humaine, cet amour reste fragile.
Du coup vous demandez au Seigneur sa grâce pour pouvoir vivre jour après jour, comme le dit le texte de Tobie, « pour nous mener ensemble à la vieillesse ».
Avec l’allongement de la durée de la vie, cette prière de Tobie n’est que trop d’actualité.
On voit bien que, face à l’égoïsme qui peut nous habiter, face au désir de dominer, face à tout ce qui peut s’opposer à l’amour, on a besoin de cette grâce de Dieu. C’est pourquoi vous venez devant l’autel du Seigneur pour demander cette grâce.
Le mariage c’est d’abord l’union de deux pauvres, qui ont fait l’expérience aussi qu’ils ne savent pas aimer, c’est très important dans la préparation au mariage de prendre aussi conscience des obstacles, en moi, à l’amour.
Il y a quelque chose en moi qui s’oppose à la logique du don, qui est signe de l’amour.
Comme prêtre, comme religieux, comme couple, nous prenons conscience chaque jour que c’est la grâce de Dieu qui nous soutient, qui nous fait sortir de nous-mêmes pour aller à la rencontre de l’autre, mais livrés à nos propres forces, à nos psychologies blessées, on voit bien qu’on est capable de pas grand-chose.
Vous venez devant l’autel du Seigneur, parce que vous êtes des catholiques fervents, mais parce que vous prenez conscience aussi de votre fragilité, Claire et Stanislas, comme tout couple, comme tout chrétien prend conscience de sa fragilité, parce que dans cette fragilité vous demandez que le Seigneur mettre sa force à lui.
D’où l’importance de la vie de prière que vous avez vécu avec beaucoup de sérieux, et je dois dire le sérieux aussi avec lequel vous avez fait cette préparation au mariage et préparé cette célébration.
Alors je trouve que c’est bien pour nous aussi, de nous rappeler cette phrase du curé d’Ars :
La communion demande la transcendance, c’est évident, parce que si c’est juste le face à face de psychologie blessée, et bien forcément ça n’ira pas très loin, l’absence de vie spirituelle dans un couple fait que le couple lui-même se fragilise.
C’est l’invitation que vous nous lancez, Claire et Stanislas, à remettre, j’allais dire, l’Église « au centre du village », c’est-à-dire à remettre le Seigneur au centre même de notre vie. Dieu premier servi.
Aimer, un commandement pour le couple pour rayonner dans le monde
A travers l’Évangile, évidemment connu et qui est le cœur même de notre foi, ce « commandement nouveau », vous nous dites que vous rentrez par votre engagement dans une logique qui est déjà présente dans votre baptême, qui est une logique de don de soi.
Parce qu’aimer c’est entrer dans une logique de don de soi et donc vous répondez à cet appel de Jésus :
« Ce n’est pas vous qui m’avez choisi,
c’est moi qui vous ai choisi et établis ».
Quelque part aimer c’est comme un exode de soi-même, c’est une sortie de soi-même, c’est faire que je me décentre de moi-même, c’est toute la vie chrétienne.
C’est pour ça aussi que vous venez régulièrement auprès du Seigneur dans la prière, mais aussi dans les sacrements, pour demander d’accomplir ce commandement.
Et c’est pour cela que c’est un commandement.
Aimer, il n’y aurait peut-être pas besoin de le commander.
Mais aimer est un commandement parce qu’aimer n’est pas spontané, sinon cela se saurait, aimer n’est absolument pas spontané, donc le Seigneur nous demande de nous aimer les uns les autres précisément parce qu’il connaît l’homme, il sait de quoi l’homme est fait.
Nous sommes comme le dit Jérémie « des hommes compliqués et malades », du coup il nous demande, et il nous enjoint, de nous aimer, parce qu’il y a justement en nous quelque chose qui s’y oppose et qui résiste à l’amour.
Ce commandement, c’est à la manière de Dieu, c’est un amour qui se donne jusqu’au bout, c’est ce que dit Jésus aujourd’hui :
« Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis ».
Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande.
Donc en vous mariant, Claire et Stanislas, vous voulez grandir dans l’amitié avec le Seigneur, parce que vous voulez accomplir ce qu’il vous commande de faire et que vous voulez aussi le faire rayonner.
Il s’agit bien de cela aussi, ce choix de Dieu, cet appel de Dieu auquel vous répondez, a à voir aussi avec la fécondité de vos vie :
« Pour que vous partiez et que vous donniez du fruit et un fruit qui demeure ».
Le Seigneur nous choisit pour que nous puissions portiez du fruit.
La question de la fécondité de nos vies est centrale, la fécondité pour un foyer est dans l’immense majorité nos enfants, mais il n’y a pas que les enfants, c’est aussi le fait que votre amour puisse rayonner au-delà de vous, que vous rendiez ce monde plus juste et plus fraternel, que cet engagement retentisse aussi dans votre entourage, dans votre vie professionnelle, dans votre vie amicale et familiale.
C’est cela aussi l’appel auquel vous répondez.
Pour nous aussi c’est une invitation à nous demander si nous sommes fidèles à cet appel reçu à notre baptême, à être témoins de Jésus et Dieu sait si aujourd’hui, contrairement à ce qu’on pense, les chrétiens sont très attendus dans leurs paroles et dans leurs témoignages.
On voit bien un monde en transformation, un monde aussi dans un certain raidissement, parfois identitaire, parfois un peu violent aussi, la dimension évangélique qui nous habite par le baptême. Cette dimension évangélique elle est au rendez-vous dans le cœur du couple chrétien pour justement rayonner autour du monde.
Ce sont des lectures fréquemment utilisées, mais je trouve que c’est beau de pouvoir reprendre conscience de cela, vous nous aidez, Claire et Stanislas, à reprendre conscience que ce que nous vivons n’est pas simplement tourné vers nous-mêmes.
Bien sûr c’est une démarche personnelle votre mariage, mais ce n’est pas une démarche solitaire, je ne peux pas dire « je » sans dire « tu », je ne peux pas dire « tu » sans dire « nous ».
Évidemment ce que vous vivez retentit autour de vous, ce qui est votre cas Claire et Stanislas, ce qui est mon cas, ce qui est le cas du Père Claude aussi, ce qui est le cas de chacun d’entre nous, de prendre conscience que nous sommes un corps et que à travers ce corps les engagements que nous prenons retentissent aussi dans tous ceux qui nous approche. Il y a tout un enjeu dans l’engagement chrétien et singulièrement dans le mariage.
Demandons au Seigneur qu’il nous aide, qu’il vous aide, Claire et Stanislas, dans ce chemin de sainteté, dans ce chemin qui a parfois des moments difficiles, nous le savons, parce que nous nous heurtons aussi à la fragilité humaine, nous nous heurtons à l’égoïsme, qu’il vous aide aussi à être des témoins et que pour nous aussi nous sachions, à travers votre engagement, reprendre conscience de notre propre vocation.
Amen !